Décembre, mois du passage au solstice d’hiver, période au cours de laquelle nos nuits sont les plus longues de l’année. Nettoyée par le froid, l’atmosphère montre le ciel sous son plus bel aspect. Rigel, Aldébaran, Bételgeuse brillent d’un éclat plus lumineux. Contempler ces étoiles nous console un peu de l'année mouvementée qui s’achève. Comment ne pas penser aux massacres perpétués sur notre sol. Après les attentats de 2015, celui du 7 janvier qui nous priva d'une partie de la rédaction de Charlie Hebdo, de Cabu, un grand ami du jazz, et ceux du 13 novembre qui firent de nombreuses victimes, les assassins nous frappèrent durement à Nice le 14 juillet dernier. L’état d’urgence a été maintenu et la présence de militaires en armes patrouillant dans nos rues nous rappelle que le pire peut à nouveau arriver.
L’on ressent donc un certain malaise à l'approche de ces Fêtes de fin d’année, moments de paix, de trêve, de temps partagés en famille. Non, le cœur n’y est pas. Les gesticulations de nos hommes politiques, fiers de leurs bilans pitoyables, ne nous font pas rire. Mais déjà les élections présidentielles occupent leurs esprits. On s’agite, on prépare les coups bas, on étale les peaux de bananes pour faire trébucher l’adversaire. Ont-ils compris que les Français ne veulent plus d’eux, réclament d’autres visages ? Tous veulent être califes à la place du Calife et nous promettent monts et merveilles. Seuls les enfants croient encore au Père Noël. Triste époque qui voit Paris devenir une ville de plus en plus sale et malodorante. Seul un blanc manteau de saison pourrait en dissimuler les miasmes, la rendre plus pure, immaculée. Y-aura-t-il de la neige à Noël ?
On nous annonce un biopic sur Chet Baker pour le 11 janvier. Son titre : “Born to Be Blue”. Lionel Eskenazi en dit grand bien dans Jazz Magazine. Robert Budreau son réalisateur a placé la musique au centre d’un film qui « évite clichés et pièges mélodramatiques ». Ethan Hawke en est l’acteur principal.
Comme chaque année ce blog sera mis en sommeil autour du 20 décembre jusqu’à la mi-janvier. Auparavant, vous seront dévoilés mes « Chocs de l’année », 12 nouveautés et un inédit. Patience…
QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT
-A l’occasion de la publication de l’album “Jazz, 100 photos pour la liberté de la presse” en vente le 1er décembre – photos de Guy Le Querrec, Dennis Stock, Leonard Freed, Burt Glinn, Robert Capa, Philippe Halsman, Wayne Miller et de la collection Frank Driggs ; textes de Pierre Assouline, Jacques Gamblin, Francis Marmande, Jean-Pierre Marielle, Michel Butor –, Reporters sans frontières, la Fondation BNP Paribas et France Musique organisent un concert pour la liberté de la presse, le mardi 6 décembre 2016 au Studio 104 de la Maison de la Radio (19h45).
-Un All Stars de 22 musiciens confié au saxophoniste Pierre Bertrand (direction musicale) et soutenu par la Fondation BNP Paribas en assurera la première partie – avec Airelle Besson, Sylvain Beuf, Emanuel Bex, Julien Charlet, Ablaye Cissoko, Jean-Pierre Como, Laurent Cugny, Sophia Domancich, Thomas Enhco, Stéphane Guillaume, Stéphane Huchard, François Moutin, Louis Moutin, Murat Öztürk, Anne Paceo, Manuel Rocheman, Olivier Temime, Baptiste Trotignon, Jacques Vidal, Christophe Wallemme et Louis Winsberg. Le pianiste Shai Maestro et son trio compléteront ce programme.
-Une exposition de photographies de Guy Le Querrec et de Patrick Zachmann (Magnum Photos) consacrée au jazz sera également présentée dans la nef et le hall Seine de la Maison de la Radio du 5 au 23 décembre 2016.
-Patricia Barber au New Morning le 7. Aujourd’hui moins médiatisée, on l’a un peu perdue de vue. La chanteuse de Chicago qui est aussi une très bonne pianiste se fit remarquer par ses albums et ses textes dès le début dès années 90. “Distorsion of Love”, son disque premier date de 1992. On découvrit une voix grave et envoûtante, une vraie présence qu’elle manifeste également sur scène. La consécration survint lorsqu’elle devint une artiste Blue Note. “Live, A Fortnight in France” (2004) obtint le Prix du Jazz Vocal de l’Académie du Jazz. “Smash”, son dernier enregistrement officiel pour le label Concord, date de 2013. Elle nous rend visite en trio, Patrick Mulcahi (contrebasse) et Jon Deitemyer (batterie) complétant sa formation.
-Le 12, “You & The Night & The Music” (14ème édition), grand concert de jazz qu’organise chaque année en décembre la radio TSF verra l’Olympia accueillir 12 formations. Il y en aura pour tous les goûts, mais The Amazing Keystone Band, Mark Turner & Avishai Cohen, Bireli Lagrene, Marquis Hill (trompettiste vainqueur en 2014 de la Thelonious Monk Competition), Laurent de Wilde & Ray Lema (tous deux au piano), Jacky Terrasson & Stéphane Belmondo, le Laurent Courthaliac Octet, Fred Nardin & Jon Boutellier valent le déplacement.
-Un concert de Fred Hersch est toujours un événement. Le pianiste retrouve le Duc des Lombards les 15 et le 16 décembre (deux concerts par soir, à 19h30 et à 21h30) pour des concerts en solo, exercice sans filet dans lequel il excelle. Son disque “Solo” (Palmetto) obtint l’an dernier le Grand Prix de l’Académie du Jazz. Outre des reprises de quelques-uns de ses thèmes, le pianiste y reprend des mélodies d’Antonio Carlos Jobim, Thelonious Monk, Jerome Kern et Joni Mitchell, les rend sensibles et rêveuses, espiègles et fluides. Ses choix harmoniques, sa capacité à faire vivre simultanément plusieurs lignes mélodiques, ses longues tapisseries de notes contrapuntiques révèlent la profonde complicité qui l’unit à son piano.
-Géraldine Laurent retrouve le Sunside le 16 avec les musiciens de “At Work” (Gazebo / L'autre distribution), album qui obtint également en 2015 le Prix du Disque Français de l’Académie du Jazz. Avec elle, Paul Lay au piano (Prix Django Reinhardt la même année), Yoni Zelnik à la contrebasse et Donald Kontomanou à la batterie. Brillante saxophoniste, Géraldine aime la scène, le contact direct avec le public. Le jazz moderne qu’elle propose s’inscrit dans la continuité des années 50 et 60. Charlie Parker, Johnny Hodges et Paul Desmond se font entendre dans son alto qui en conserve la mémoire.
-Après des concerts très remarqués avec le saxophoniste Dave Liebman, notre pianiste de jazz le plus célèbre, Martial Solal, revient les 17 et 18 décembre au Sunside nous faire tourner la tête en compagnie d’un pianiste qui lui ressemble quelque peu. Comme lui, Jean-Michel Pilc aime masquer les thèmes qu’il reprend, les truffer de citations. Tout standard est le point de départ d’une nouvelle aventure, d’un nouveau morceau. Audaces harmoniques, cascades d’arpèges et de notes perlées, netteté de l’attaque, phrasé fluide, les deux hommes se plaisent à surprendre, à jouer les prestidigitateurs avec humour et logique. Deux concerts par soirée : 19h30 et 21h30 le 17, 18h30 et 20h30 le 18.
-Le Fred Nardin / Jon Boutellier 4tet au Duc des Lombards le 17. Respectivement pianiste et saxophoniste au sein du Amazing Keystone Big Band, ils ont publié cette année “Watt’s” (Gaya) avec Patrick Maradan (contrebasse), Romain Sarron (batterie) et quelques invités. Deux plages bénéficient ainsi de la voix chaude de Cécile McLorin Salvant. Bon musicien, Jon Boutellier est aussi un arrangeur talentueux. On s’en rendra compte le 19 au Duc lors d’une soirée consacrée à une relecture du “West Side Story” de Leonard Bernstein par le Amazing Keystone Septet, David Enhco (trompette), Bastien Ballaz (trombone), Jean-Philippe Scali (saxophone baryton) et Florent Nisse (contrebasse) rejoignant Fred Nardin, Jon Boutellier et Romain Sarron.
-Jacky Terrasson et Stéphane Belmondo au Sunside du 27 au 30 décembre inclus (deux concerts par soir, à 19h30 et à 21h30). Publié en septembre, leur disque “Mother” rassemble quatorze morceaux dont de nombreux standards, des ballades essentiellement, morceaux mélancoliques qui traduisent son atmosphère feutrée. Stéphane joue du bugle mais aussi beaucoup de trompette. Le piano de Jacky se fait rêveur et tendre, puissant et énergique selon les plages, des compositions originales, mais aussi First Song de Charlie Haden, Que reste-t-il de nos amours que chantait Charles Trenet, You are The Sunshine of My Life de Stevie Wonder et La Chanson d'Hélène, extraite du film “Les Choses de la vie” que Jacky sait si bien enrichir d’harmonies délicates. Un must à découvrir sur scène.
-New Morning : www.newmorning.com
-Olympia : www.olympiahall.com
-Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com
-Sunset-Sunside : www.sunset-sunside.com
Photos : Miles Davis © Magnum Photos – Patricia Barber © Jimmy Katz – Fred Hersch © Vincent Soyez – Géraldine Laurent, Fred Nardin / David Enhco / Jon Boutellier, Stéphane Belmondo & Jacky Terrasson © Philippe Marchin – Paris sous la neige, Martial Solal & Jean-Michel Pilc © Photos X/D.R.