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16 octobre 2017 1 16 /10 /octobre /2017 08:50
Une quinzaine qui interpelle

Dizzy Gillespie pour président : le trompettiste aurait fait un bien meilleur chef d’état que le Donald aujourd’hui au pouvoir. Il se présenta par deux fois à la présidence des Etats-Unis (1964 et 1972). Sans succès malgré sa notoriété. Car Dizzy ne fut pas seulement le musicien qui rendit populaire le be-bop, il fut aussi son ambassadeur. À partir de 1956, le Département d’État le chargea de faire connaître le nouveau jazz au Moyen-Orient, en Amérique du Sud, en Yougoslavie et en Grèce. Détenteur de la National Medal of Arts, Commandeur des Arts et des Lettres, Dizzy Gillespie, né le 21 octobre 1917, aurait eu cent ans dans quelques jours. Que sa musique soit aujourd’hui moins jouée que celle de Thelonious Monk, n’explique pas l’étrange silence qui entoure cet anniversaire. Les hommages pleuvent sur le pianiste dont on fête le centenaire de la naissance (il est du 10 octobre 1917) et Jazz Magazine lui consacre ce mois-ci un volumineux dossier. Rien sur Dizzy, oublié dans ce concert de louanges, sauf par la page Facebook de l'Académie du Jazz*. Il est encore temps de réparer cette injustice.

 

Jazz sur Seine c’est parti ! Entre le 13 et le 28 octobre, à l’initiative de l’association Paris Jazz Club, les clubs de la capitale et de l’île de France s’associent pour nous offrir des concerts à prix doux. Je vous en ai parlé au début du mois. Reportez-vous à mon dernier édito. L’autre événement incontournable d’octobre pour l’amateur de jazz, c’est le festival Jazz en Tête de Clermont-Ferrand, le seul de l’hexagone qui programme du jazz en majorité afro-américain. Point de musiques invertébrées qui remplissent amphithéâtres, vélodromes, pots de yaourt, boîtes à chaussures, grands magasins et ascenseurs mais un jazz inventif qui, nullement coupé de ses racines, ressemble encore à du jazz.

 

* Académie du Jazz / Facebook : http://fr-fr.facebook.com/academiedujazz/  

-Bruno Angelini & Stephan Oliva en solo le 17 (20h00) à la Cité Internationales des Arts (18 rue de l’Hôtel de Ville 75004 Paris – Billetterie sur place. Tarif unique : 10€). Un double concert au cours duquel le jazz se penchera sur des musiques de films. Bruno Angelini poétisera deux partitions d’Ennio Morricone, “Il était une fois la révolution et “Le bon, la brute et le truand deux films de Sergio Leone. Sorti en 2015, “Leone Alone”, est toujours disponible sur www.illusionsmusic.fr. Cinéphile passionné, Stephan Oliva jouera des œuvres de Bernard Herrmann qu’Alfred Hitchcock a souvent fait travailler. Hélas épuisé, l’album qu’il lui a consacré en 2007, “Ghosts of Bernard Herrmann”, s’impose par ses relectures décalées, les jeux d’ombre et de lumière qu’il projette sur une musique teintée de noir.

-Le trompettiste Wallace Roney au New Morning le 18 (et au festival Jazz en Tête de Clermont-Ferrand le 26), avec Emilio Modeste au saxophone ténor, Oscar L. Williams Jr. au piano, Curtis Lundy à la contrebasse et Eric Allen à la batterie, presque le groupe qui l’accompagna au Sunside en mars dernier, Modeste étant un nouveau venu. Miles Davis lui offrit sa trompette lors du dernier concert qu’il donna à Montreux. Il brilla au sein de la formation du batteur Tony Williams (quintette puis sextette) dans les années 80, et enregistra quantité d’albums sous son nom dont les derniers sont malheureusement mal distribués en France. Produit par Teo Macero et enregistré en 1995 avec déjà Eric Allen à la batterie, “The Wallace Roney Quintet” (Warner Bros.) reste pour moi une de ses grandes réussites.

-Danilo Pérez (piano), John Patitucci (contrebasse) et Brian Blade (batterie) au New Morning le 18. Ils accompagnent Wayne Shorter depuis des années, se pliant aux bizarreries du grand saxophoniste, donnant souvent une direction à sa musique totalement improvisée. Ces trois grands musiciens ont donc une grande habitude de jouer ensemble et leurs concerts pleins de surprises car d’une grande interactivité peuvent se révéler très créatifs. On attend donc une suite à “Children of The Light” (Mack Avenue 2015), leur seul album à ce jour en trio.

-Sylvain Rifflet au Flow le 19 (20h30), une péniche amarrée rive gauche, 4 Port des Invalides, contenant restaurant et salle de spectacle. Un concert donné à l’occasion de la sortie de “Re-Focus” son nouvel album, mon coup de cœur de la rentrée (vous lirez ma chronique dans le numéro d’octobre de Jazz Magazine). Le modèle est bien sûr “Focus” que Stan Getz enregistra pour Verve, en 1961, un disque à part dans sa discographie et l’un de ses chefs-d’œuvre. Hommage à Getz “Re-Focus” est toutefois un autre disque. Il contient de nouveaux morceaux superbement arrangés par Fred Pallem (le Sacre du Tympan) et n’est nullement un pastiche. Sylvain Rifflet l’interprétera sur scène avec les cordes de l’Ensemble Appassionato que dirige Mathieu Herzog, présentes dans l’enregistrement, Florent Nisse à la contrebasse et Guillaume Lantonnet à la batterie remplaçant Simon Tailleu et Jeff Ballard, la section rythmique de cet album étonnant.

-Le samedi 21 à 20h00, dans le cadre de l’émission Jazz sur le Vif, le Studio 104 de Radio France accueille le pianiste Hervé Sellin pour fêter en big band le centième anniversaire de la naissance de Thelonious Monk (il aurait eu 100 ans le 10 octobre). Sa musique arrangée par Hall Overton, Monk se produisit à deux reprises en grande formation. La première en février 1959 au Town Hall de New York et la seconde en décembre 1963 au Philharmonic Hall du Lincoln Center. Les deux concerts furent enregistrés. C’est le répertoire que Monk joua au Town Hall que reprend Sellin qui, lui-même au piano, a réuni autour de lui Nicolas Folmer (trompette), Lucas Spiler (trombone), Pierrick Pédron, Rick Margitza et André Villéger (saxophones), Armand Dubois (cor), Franz Langlois (tuba), Thomas Bramerie (contrebasse), et Philippe Soirat (batterie). Le quartette de Pierrick Pédron (je donne les noms de ses musiciens dans la notice que je lui consacre dans cette même rubrique) assurera la première partie de ce concert événement.

-Studio d’enregistrement, mais aussi label, La Buissonne fête le 23 octobre au New Morning son trentième anniversaire. Marc Copland, Stephan Oliva, Bill Carrothers, Bruno Angelini, pianistes que j’apprécie y ont enregistré mais aussi nombre de musiciens qui inventent une musique séduisante et souvent inclassable, de la musique improvisée, du jazz de chambre, de la musique tout simplement. Philippe Ghielmetti et Jean-Jacques Pussiau, aujourd’hui retiré ont fait confiance à Gérard de Haro pour enregistrer des disques inoubliables. Le label La Buissonne accueille les musiciens amis, une certaine avant-garde qui sait prendre des risques. Il y aura du monde au New Morning le 23 au soir, le label publiant à cette occasion sa trentième référence “Bandes Originales” de Vincent Courtois. Ce dernier en jouera la musique avec Daniel Erdman et Robin Fincker (saxophones) qui l’accompagnent dans ce nouvel album, librement inspiré par des bandes-son plus ou moins célèbres. D’autres musiciens seront aussi sur scène à l’occasion de cet anniversaire. Inscrits sur l’affiche, leurs noms ne peuvent laisser indifférents.

-On retrouve le saxophoniste (alto) Pierrick Pédron au Duc des Lombards pour fêter la sortie de “Unknown” (Crescendo), un album que Pierrick a enregistré avec Carl-Henri Morisset au piano, Thomas Bramerie à la contrebasse et Greg Hutchinson à la batterie. Ils seront avec lui au Duc les 23, 24 et 25 octobre (2 concerts par soir, 19h30 et 21h30) et nous aussi. Car ce vrai disque de jazz est probablement le meilleur opus du saxophoniste. Les ballades sont particulièrement réussies. Carl-Henri, vingt-trois ans, épaule Pierrick au piano. Ses doigts agiles colorent la musique, surprennent par ses harmonies et ses accords inattendus. Un quartet à découvrir sur scène .

Maison de la Culture de Clermont-Ferrand, salle Jean Cocteau :

Festival Jazz en Tête 30ème édition du 24 au 28 octobre.

 

Mardi 24 : Tigran Hamasyan (piano, en solo) – Charenée Wade (chant) avec TBE (saxophone alto), Darryl Hall (contrebasse) et Justin Faulkner (batterie). Mercredi 25 : Baptiste Herbin (saxophones alto et soprano) en quintette avec Renaud Gensane (trompette), Eduardo Farias (piano), Darryl Hall (contrebasse) et Justin Faulkner (batterie) – Eric Harland (batterie) avec James Francies (piano et claviers). Jeudi 26 : Logan Richardson (saxophone alto) en trio avec Joe Sanders (contrebasse) et Jeff Ballard (batterie) – Wallace Roney (trompette) en quintette avec Emilio Modeste (saxophone ténor), Oscar L. Williams Jr. (piano), Curtis Lundy (contrebasse) et Eric Allen (batterie). Vendredi 27 : E.J. Strickland (batterie) en quintette avec Marcus Strickland (saxophone ténor), Godwin Louis (saxophone alto), Taber Gable (piano) et Josh Ginsburg (contrebasse) – Donald Brown (piano) avec Steve Nelson (vibraphone), Ed Cherry (guitare), Robert Hurst (contrebasse), Eric Harland (batterie) + invités. Samedi 28 : Massif Collectif avec Davy Sladek (saxophones soprano et alto), Franck Alcaraz (saxophone ténor), Yannick Chambre (Fender Rhodes), Dominique Mollet (contrebasse) et Marc Verne (batterie) – Roy Hargrove (trompette) en quintette avec Justin Robinson (saxophone & flûte), Tadataka Unno (piano), Ameen Saleem (contrebasse) et Quincy Phillip (batterie).

 

-À l’occasion de Jazz en Tête, le photographe Michel Vasset à qui l’on doit de très belles photos en noir et blanc (voir l’affiche ci-contre) expose Salle Gaillard, 2 rue Saint Pierre, du 6 octobre au 11 novembre, plus de 200 photographies retraçant l’histoire du festival.    

-Directeur artistique du nouveau disque de Pierrick Pédron, le pianiste Laurent De Wilde sort aussi un album en octobre. Comme son nom l’indique, “New Monk Trio” (Gazebo / L’Autre Distribution) est entièrement consacré à Thelonious Monk. Laurent en a joué le répertoire au Sunside en février dernier avec les musiciens qui l’ont enregistré avec lui, Jérôme Regard à la contrebasse et Donald Kontomanou à la batterie. Ils sont programmés au Bal Blomet le 26, pour y désosser les compositions de Monk, en modifier les tempos, en altérer les formes. On peut faire confiance à Laurent De Wilde qui, l'ayant longuement étudié, disséqué et digéré, connaît sa musique mieux que personne. Loin de la paraphraser, il l'a arrangée à sa manière, donnant d’autres couleurs, d’autres rythmes aux thèmes familiers d'un compositeur abondamment fêté ces jours-ci.

-Réunissant Pierre Perchaud (guitare), Nicolas Moreaux (contrebasse) et Jorge Rossy (batterie) le trio Fox s’est associé avec le saxophoniste Chris Cheek pour enregistrer un second album, “Pelican Blues”, pour le label jazz&people. Un opus en vente depuis le 6 octobre. Ils en joueront les morceaux au Studio de l’Ermitage le 26 (21h00) avec un autre invité, Vincent Peirani à l’accordéon, également présent dans le disque. L’instrument s’y prête car sa musique est une sorte de rêverie sur les musiques entremêlées de la Louisiane  blues, cajun, zydeco , terre longtemps nourrie de culture française.

-Marc Copland au Sunside le 28. Le pianiste n’a pas joué à Paris depuis août 2016, un concert au New Morning au sein du groupe du regretté John Abercrombie. C’est en solo qu’il est attendu dans un club qu’il connaît bien et qui l’accueille régulièrement. Membre du trio du bassiste Gary Peacock qui vient de sortir un des meilleurs disques de sa longue carrière, Marc possède désormais son propre label, InnerVoiceJazz et édite ses propres disques qui ne sont pas distribués en France. Deux albums sont parus cette année : “Better By Far” en quartette avec Ralph Alessi (trompette), Drew Gress (contrebasse) et Joey Baron (batterie) et “Nightfall” en solo. C’est probablement le répertoire de ce dernier qu’il interprétera. Outre de nouvelles compositions très réussies, ce nouvel opus contient deux thèmes d’Abercrombie, un de Ralph Towner et une belle reprise de Jade Visions de Scott LaFaro.

-Guilhem Flouzat au Sunside le 30 octobre et le 1er novembre. Compositeur, arrangeur et batteur, il a enregistré en 2016 pour Sunnyside 9 portraits de musiciens amis. L’un d’entre eux est Desmond White, son bassiste,. C’est avec lui et le pianiste Sullivan Fortner qu’il est attendu dans un Sunside rénové pour fêter la sortie de leur disque en trio. Entièrement consacré à des standards, “A Thing Called Joe” (Sunnyside / Socadisc) rassemble des mélodies naguère popularisées par Frank Sinatra (There’s No You), Doris Day (When I Fall In Love), Peggy Lee et Ella Fitzgerald (Hapiness is a Thing Called Joe, un extrait de la comédie musicale “Cabin in the Sky” qui vit le jour en 1943). A ce répertoire s’ajoutent des compositions de Thelonious Monk, Jaki Byard et Joe Zawinul, Midnight Mood figurant dans “Money in the Pocket”, un de ses disques des années 60. Sur un tel répertoire, Sullivan Fortner fait des merveilles et se montre bien plus convaincant que dans son propre disque publié l’an dernier sur le label Impulse. Jouant de délicates notes perlées dans There’s No You, une ballade au tempo très lent, il colore subtilement la musique, adopte un jeu varié et inattendu et, dans Walking My Baby Back Home que chanta si bien Nat King Cole, introduit une dose d’humour appréciable. Une rythmique en apesanteur, aussi souple qu’inventive, chemine avec lui. Quarante précieuses minutes de bonne musique. 

-New Morning : www.newmorning.com

-Le Flow Paris : www.flow-paris.com

-Radio France - Jazz sur le Vif : www.maisondelaradio.fr/concerts-jazz

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Jazz en Tête : www.jazzentete.com

-Le Bal Blomet : www.balblomet.fr

-Studio de l’Ermitage : www.studio-ermitage.com

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

 

Crédits Photos : Sylvain Rifflet © Sylvain Gripoix – Thelonious Monk © Getty Images – Pierrick Pédron, Trio Fox + Chris Cheek & Vincent Peirani © Philippe Marchin – Marc Copland © Guido Werner – Dizzy Gillespie, Wallace Roney, Danilo Pérez / John Patitucci / Brian Blade, Laurent De Wilde © Photos X/D.R.

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