Féru de musique contemporaine, parisien depuis bientôt vingt ans, le
pianiste américain Ronnie Lynn Patterson est un homme d’une rare discrétion. Auteur de « Mississipi », album paru en 2003 sur le label Night Bird Music, mais aussi d’un disque
consacré au compositeur Morton Feldman dont il admire les œuvres, Ronnie Lynn n’oublie qu’une chose, c’est de faire parler de lui. La parution récente d’un nouvel album aussi bon
qu’inattendu, et un concert au New Morning le 21 octobre prochain font ainsi figure d’évènements. « Freedom Fighters » confirme l’excellence d’un pianiste réservé qui loin de faire étalage d’un
trop plein de savoir-faire, de notes savantes pleines de poudre aux yeux, construit un discours poétique et exigeant qui lui est infiniment personnel. Il contient deux pièces de ou arrangées par
Keith Jarrett (l’un de ses principaux modèles), et la variation d’un thème de Rachmaninov, mais surtout des compositions originales rigoureuses et
diversifiées. Le pianiste possède un jeu aussi subtil que délicat et d’une grande richesse harmonique. Le suivre demande une écoute attentive et constante. La main gauche assure un parfait
contrepoint à la droite, souvent proche des lignes du blues, et donne à la musique un très grand équilibre rythmique. Ronnie Lynn Patterson n’est pas le seul à fasciner : Stéphane
Kerecki et Louis Moutin interpellent par leur pertinence. La contrebasse du premier trouv les notes justes pour répondre à celles, parfois abstraites, d’un piano fragile
qui prend son temps pour révéler sa profondeur, un piano qui suggère, entrouvre pudiquement la porte de ses rêves.
Meilleurs morceaux : Freedom Fighters Adagio, Camariñas, Santa Fe.