21 juillet 2009
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LUNDI 13 juillet
Kenny Werner se fait rare à Paris. Il y a deux ans, le 6 avril 2007, le pianiste était au New Morning avec un autre trio. Il venait de publier “Lawn Chair Society“, album aux couleurs et aux musiques surprenantes dans lequel les arrangements tiennent une place importante. Il contient une nouvelle version de Uncovered Heart précédemment sur l’album du même nom et une belle adaptation de Kothbiro, thème du film “The Constant Gardener“. Kenny Werner offrit l’autre soir au public du Sunside un programme essentiellement constitué de standards. Il fonctionna si bien que l’on pouvait croire Mauro Gargano et Rémi Vignolo avec lui depuis de longues années. Ils n’avaient pourtant répété que l’après-midi même. Le jazz permet à des musiciens qui n’ont jamais travaillé ensemble de générer des improvisations neuves et excitantes, de donner des concerts inoubliables. Celui du Sunside fut l’un d’eux. La contrebasse chantante et joliment mélodique de Mauro, le jeu de balais raffiné de Rémi inspirèrent au pianiste des pages délicates, un jeu souvent lyrique, des improvisations inattendues. Kenny aime les notes perlées et en place beaucoup à la fin de With A Song in my Heart, un thème qu’il affectionne. S’il égraine parfois des chapelets de notes, il choisit les plus tendres, se plaît à assembler de riches harmonies, à faire sonner son piano avec élégance, sa grande technique lui permettant de varier son jeu pour mieux nous éblouir. L’étendu de son vocabulaire harmonique trahit sa culture classique. Il mêle des harmonies européennes à des lignes de blues, le pianiste romantique tendant la main au bopper fiévreux. If I Should Loose You fut une pluie de notes bleues. All The Things Are You, une pièce « à la Monk » et clin d’œil au célèbre All The Things You Are, lui permit d’accorder de longs chorus à ses musiciens. Une magnifique version de Soul Eyes dédiée à John Betch présent dans la salle fut longuement applaudie. Célébrant John Coltrane, Kenny reprit avec brio 26-2, une des compositions Atlantic du saxophoniste et dans Ballad for Trane, un de ses morceaux, adopta un jeu sensuel en totale osmose avec ses musiciens. C’est d’ailleurs en trio (contrebasse et batterie) qu’il a enregistré ses plus beaux albums : “Introducing the Trio“ et “Press Enter“ avec Ratzo Harris et Tom Rainey pour Sunnyside ; “A Delicate Balance“ avec Dave Holland et Jack DeJohnette pour BMG ; “Beat Degeneration“ avec Johannes Weidenmueller et Ari Hoenig pour Night Bird Music, un disque enregistré en novembre 2000 dans ce même Sunside. Producteur des deux derniers disques que je viens de citer, Jean-Jacques Pussiau était là lui aussi avec Claude Carrière, admirateur et ami de longue date de Kenny qui leur dédia un Blue in Green d’une délicatesse exquise. Il fallut attendre la fin de sa longue introduction en solo pour reconnaître le thème, la musique étant alors plus proche de la musique impressionniste que du jazz.
P.-S./ Je n’ai cité que des disques en trio. Il faut ajouter à cette discographie deux albums dans lequel le talent d’arrangeur du pianiste se manifeste, le superbe “Uncovered Heart“ publié par Sunnyside en 1990, et l’inoubliable “Beauty Secrets“ (BMG) produit neuf ans plus tard par l’irremplaçable Jean-Jacques Pussiau.
Photos © Pierre de Chocqueuse
Kenny Werner se fait rare à Paris. Il y a deux ans, le 6 avril 2007, le pianiste était au New Morning avec un autre trio. Il venait de publier “Lawn Chair Society“, album aux couleurs et aux musiques surprenantes dans lequel les arrangements tiennent une place importante. Il contient une nouvelle version de Uncovered Heart précédemment sur l’album du même nom et une belle adaptation de Kothbiro, thème du film “The Constant Gardener“. Kenny Werner offrit l’autre soir au public du Sunside un programme essentiellement constitué de standards. Il fonctionna si bien que l’on pouvait croire Mauro Gargano et Rémi Vignolo avec lui depuis de longues années. Ils n’avaient pourtant répété que l’après-midi même. Le jazz permet à des musiciens qui n’ont jamais travaillé ensemble de générer des improvisations neuves et excitantes, de donner des concerts inoubliables. Celui du Sunside fut l’un d’eux. La contrebasse chantante et joliment mélodique de Mauro, le jeu de balais raffiné de Rémi inspirèrent au pianiste des pages délicates, un jeu souvent lyrique, des improvisations inattendues. Kenny aime les notes perlées et en place beaucoup à la fin de With A Song in my Heart, un thème qu’il affectionne. S’il égraine parfois des chapelets de notes, il choisit les plus tendres, se plaît à assembler de riches harmonies, à faire sonner son piano avec élégance, sa grande technique lui permettant de varier son jeu pour mieux nous éblouir. L’étendu de son vocabulaire harmonique trahit sa culture classique. Il mêle des harmonies européennes à des lignes de blues, le pianiste romantique tendant la main au bopper fiévreux. If I Should Loose You fut une pluie de notes bleues. All The Things Are You, une pièce « à la Monk » et clin d’œil au célèbre All The Things You Are, lui permit d’accorder de longs chorus à ses musiciens. Une magnifique version de Soul Eyes dédiée à John Betch présent dans la salle fut longuement applaudie. Célébrant John Coltrane, Kenny reprit avec brio 26-2, une des compositions Atlantic du saxophoniste et dans Ballad for Trane, un de ses morceaux, adopta un jeu sensuel en totale osmose avec ses musiciens. C’est d’ailleurs en trio (contrebasse et batterie) qu’il a enregistré ses plus beaux albums : “Introducing the Trio“ et “Press Enter“ avec Ratzo Harris et Tom Rainey pour Sunnyside ; “A Delicate Balance“ avec Dave Holland et Jack DeJohnette pour BMG ; “Beat Degeneration“ avec Johannes Weidenmueller et Ari Hoenig pour Night Bird Music, un disque enregistré en novembre 2000 dans ce même Sunside. Producteur des deux derniers disques que je viens de citer, Jean-Jacques Pussiau était là lui aussi avec Claude Carrière, admirateur et ami de longue date de Kenny qui leur dédia un Blue in Green d’une délicatesse exquise. Il fallut attendre la fin de sa longue introduction en solo pour reconnaître le thème, la musique étant alors plus proche de la musique impressionniste que du jazz.
P.-S./ Je n’ai cité que des disques en trio. Il faut ajouter à cette discographie deux albums dans lequel le talent d’arrangeur du pianiste se manifeste, le superbe “Uncovered Heart“ publié par Sunnyside en 1990, et l’inoubliable “Beauty Secrets“ (BMG) produit neuf ans plus tard par l’irremplaçable Jean-Jacques Pussiau.
Photos © Pierre de Chocqueuse