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21 septembre 2009 1 21 /09 /septembre /2009 09:12
Il manie balais, baguettes, brosses et pinceaux, polit les peaux lisses des fûts qu’il martèle, tire des “cliquetis vif-argent“ de ses cymbales sans se mettre martèle en tête, tambours toujours battants. Depuis 50 ans, Daniel Humair est le pouls du jazz, le peintre de rythmes librement tambourinés et interprétés, le contraire du batteur fournisseur de tempo. Entouré de ses amis, il fêtera ses 50 ans de carrière au Théâtre du Châtelet le 2 octobre prochain. On s’y précipitera.


S’il joue aujourd’hui le tempo de la main gauche et les cymbales de la droite, le jeu de ce gaucher ambidextre n’a jamais été académique : « je suis resté gaucher des pieds alors que pour les mains, l’école et la pratique du tambour de marche m’ont rendu droitier ». (1) Autodidacte, le jeune Daniel emprunte les bribes de solos à des batteurs qui passent à Lausanne ou à Genève sa ville natale. Il découvre ainsi le style de Sid Catlett, de Zutty Singleton, de Roy Haynes, de Peter Littman. Un séjour en Suède lui permet d’écouter Elvin Jones avec J.J. Johnson et Bobby Jaspar. Installé à Paris, Barney Wilen le fait débuter au Club St-Germain et au Chat qui Pêche.

Sa carrière démarre. Il a vingt ans et joue la musique difficile de Martial Solal qui lui montre comment colorier le rythme et devenir un batteur musical. Avec René Urtreger et Pierre Michelot, il crée le trio H.U.M.! dont le dernier album date de 1999. Daniel Humair aime la proximité de la contrebasse, les instruments qui jouent très près de lui. Les trios jalonnent son parcours, lui permettent d’exprimer une musique originale, neuve et inventive, d‘éprouver des sensations nouvelles. HLP avec Eddy Louiss et Jean-Luc Ponty ; le trio Humair, Jeanneau, Texier ;  son groupe avec Joachim Kühn et Jean-François Jenny Clarke et plus récemment son association avec François Couturier et Jean-Paul Celea comptent parmi ses plus belles aventures.

Rares sont les jazzmen avec lesquels il n’a pas joué, mais tenir aujourd’hui une pulsation régulière l’intéresse moins. Le batteur préfère s’entourer de gens qui ne rabâchent pas les mêmes plans, ne jouent pas toujours les mêmes choses, des  musiciens « souples, libérés du répertoire et du phrasé standard…et dont le niveau technique permet de dépasser la banalité jazzistique ». (2) Il recherche les situations inédites, les musiciens complices avec lesquels tout est possible. Il pourrait prendre sa retraite, se consacrer entièrement à la peinture, mais préfère  prendre des risques avec ceux qui en sont capables : Tony Malaby, Dave Liebman, Jean-Charles Richard, Bobo Stenson avec lesquels il se produit en trio ou en quartette. N’oublions pas le Baby Boom, formation naguère constituée par les étudiants de Daniel au Conservatoire National Supérieur de Musique, de jeunes virtuoses aujourd’hui confirmés qui ont pour noms Matthieu Donarier, Christophe Monniot, Manu Codjia et Sébastien Boisseau, ce dernier parrainé par le regretté Jean-François Jenny-Clark.

En Afrique en janvier 2009, Daniel Humair n’a pas pu se voir remettre au Théâtre du Châtelet le Grand Prix de l’Académie du Jazz pour “Full Contact“, un magnifique et difficile album enregistré en trio avec Joachim Kühn et Tony Malaby. François Lacharme l’invite aujourd’hui à fêter ses 50 ans de carrière dans ce même Théâtre du Châtelet le vendredi 2 octobre. Le maître-tambour ne sera pas seul. John Scofield (guitare), Louis Sclavis (clarinettes), François Couturier (piano), Jean-Paul Celea (contrebasse) et les musiciens de son Baby Boom partageront la scène avec lui. Souhaitons-lui un très grand jubilé.

(1) Propos recueillis par Thierry Quénum. – Jazz Magazine n° 596, octobre 2008.

(2) Propos recueillis par Eric Quenot. – Jazz Magazine n°596, octobre 2008.

Théâtre du Châtelet : http://www.chatelet-theatre.com/

Photo et collage © Pierre de Chocqueuse

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