Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
1 septembre 2010 3 01 /09 /septembre /2010 09:19

Bitches Brew, 40th Septembre : on n'a jamais autant parlé des Sixties à la télévision que cet été. Arte a diffusé au mois d'août une série d'émissions sur les Beatles, la naissance de la pop music, la british blues explosion, les mods et les rockers, la yé-yé révolution, les plages des sixties (Saint-Tropez, Malibu, Daytona Beach, Copacabana)... La chaîne a également programmé "Pierrot le Fou" (1965) et "One + One" de Jean-Luc Godard, mais aussi les 17 épisodes de la série culte "Le Prisonnier" qui furent diffusés sur le réseau ITV à partir d'octobre 1967. Il est d'ailleurs plus judicieux de faire démarrer cette décade mythique cette année-là, la parution en novembre 1976 de "Anarchy in the U.K. des Sex Pistols (leur musique barbare et squelettique renvoyant à l'âge de pierre) en sonnant le glas. Mais les Sixties virent aussi un jazz en ébullition se transformer. De cela, Arte a très peu parlé. Entre les mains de quelques apôtres de la déconstruction qui préfèrent la fureur du bruit à la beauté du silence, il perd une partie de son public et son statut de musique populaire.
Bitches Brew, gatefoldLe free jazz (on dit aussi "New Thing" ou Nouvelle Chose), Philippe Koechlin ne l'apprécie pas trop. Rédacteur en chef de Jazz Hot depuis novembre 1962, il passe la main pour fonder Rock & Folk avec quelques amis. Son successeur Michel Le Bris accueille favorablement cette musique libertaire. Marquée par la linguistique et le structuralisme, la revue est alors illisible. Le Bris reviendra à une autre écriture, au sujet et au sens pour nous conter des histoires d'étonnants voyageurs dans des livres autrement passionnants. Boudé par la jeunesse, miné de l'intérieur par ses musiciens contestataires, le jazz trouva le moyen de refleurir en plein Flower Power. Si l'on examine le catalogue Blue Note des années 60, on est surpris d'y trouver les meilleurs enregistrements de son histoire. Don Cherry et Eric Dolphy y gravent leurs chefs-d'oeuvre. Certains des disques que sortent Andrew Hill, Jackie McLean, Tony Williams, Wayne Shorter et Herbie Hancock sont plus modernes et inventifs que la plupart des enregistrements actuels. Et que dire des magnifiques faces que John Coltrane édite sur Impulse!, "A Love Supreme" restant son plus bel opus.
Bitches Brew, bottlesEt comment oublier les disques que fait paraître Miles Davis, le jazz modal de "Sorcerer" et "Nefertiti", le jazz électrique de "In a Silent Way" et de "Bitches Brew" qui vont profondément marquer leur époque. Leurs chroniques dans Rock & Folk incitaient à les écouter et je leur dois ma découverte du jazz. Miles proposait une musique neuve et ouvrait des portes. Ses propres musiciens les franchirent pour fonder Weather Report, Return to Forever, le Mahavishnu Orchestra. Si Arte ne leur a pas consacré de sujet cet été, Jazz Magazine / Jazzman publie un passionnant dossier de seize pages sur "Bitches Brew" dans son numéro de septembre. L'album a quarante ans et Sony Music le ressort en octobre, une édition luxueuse comprenant CD(s), DVD, vinyles, livre, poster, le "must"  du collectionneur. La rentrée, c'est aussi la nouvelle édition du festival Jazz à la Villette qui a débuté le 31 août. Sa programmation me plaît davantage que les autres années. Les concerts que je recommande sont ceux qui me tentent le plus. Il y en a d'autres. Consultez le site du festival, j'en donne le lien. Les maisons de disques font aussi leur rentrée. Certaines galettes remplissent d'ores et déjà les bacs des disquaires. De nombreuses autres sont attendues en septembre. Les nouveautés qui me parlent feront prochainement l'objet d'articles dans ce qui est bien sûr le principal évènement de cette rentrée 2010, la réouverture de ce blogdechoc. Merci de suivre le blogueur de Choc.   
QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT 

Chick Corea©Lynne Goldsmith-Chick Corea et Roy Haynes ont tourné cet été en Europe au sein du Freedom Band. Les deux hommes seront rejoints par Miroslav Vitous pour un concert exceptionnel à la Grande Halle de la Villette le 2 septembre (deux autres concerts sont prévus en Italie, à Ischia et à La Spezia, mais c’est un peu plus loin). On se souvient des albums “Now He Sings, Now He Sobs“, “Trio Music“ et “Trio Music Live in Europe“  enregistrés avec la même équipe, des disques importants d’un trio éphémère que l’amateur de jazz n’a pas oublié. Sans nul doute le concert événement du mois.Chucho Valdes©Luca Podda

 

-Le 7, la Grande Halle de la Villette accueille l’Afro-Cuban Project de Chucho Valdés et Archie Shepp. En grande forme, le pianiste vient de sortir un album tout à fait recommandable.  Shepp, 73 ans, peut encore nous surprendre. On ne boudera pas cette rencontre.

ABCD of Boogie Woogie

-Du 7 au 10 inclus (à 20h et 22h), le Duc des Lombards programme The A, B, C, & D of Boogie Woogie, quartette dont le batteur n’est autre que Charlie Watts, le batteur des Rolling Stones. Avec lui, Axel Zwingenberger et Ben Waters, tous deux au piano, et Dave Green à la contrebasse. Sûr qu’il y aura du monde !  

 

-Toujours dans le cadre du Festival Jazz à la Villette, les amateurs de piano ne manqueront pas le 10 Paul Bley en solo à la Cité de la Musique. Cela fait un moment que l’on a plus entendu à Paris ce piano lyrique et singulier, expression d’un chant intérieur, d’un univers onirique dont la modernité reste d’actualité. En première partie, le pianiste Stéphan Oliva jouera des extraits de ses prochains albums consacrés aux films noirs. Sorties prévues fin novembre sur les labels Sans Bruit (en téléchargement) et Gonzalo Rubalcaba©Clay Patrick McBride Illusions.

Stephan-Oliva.JPG

-On retrouve Stéphan Oliva en duo avec François Raulin dans cette même Cité de la Musique le 11 (à 11h et à 15h), dans un programme for kids et grands enfants consacré à la BD “Little Nemo“ . Pour vous donner une idée de la musique, écoutez la pièce Little Nemo s’éveille sur “Ostinato“, album de Raulin chroniqué dans ce blog en janvier. Le soir, deux autres pianistes occuperont les lieux. Stefano Bollani en solo chauffera la salle (il en est très capable, n’en doutons pas) pour Gonzalo Rubalcaba, l’autre grand pianiste cubain de ce festival.

 

-Du 11 au 13, les amateurs de trio réunissant guitare, orgue et batterie ne manqueront pas au Sunset celui du guitariste Peter Bernstein, guitariste considéré à juste titre comme l’un des plus passionnants du moment. Ses deux complices sont tout aussi connus des aficionados. Larry Goldings a depuis longtemps montré son savoir-faire tant à l’orgue qu’au piano. Quant à Bill Stewart, la musicalité de son drumming en fait un des batteurs de jazz le plus José James & Jef Nevedemandé.

 

-La voix chaude et grave de José James a trouvé avec le piano de Jef Neve, l’écrin qui la met superbement en valeur. Les deux hommes se sont rencontrés en Belgique en 2008 et depuis donnent régulièrement des concerts. En duo, ils reprennent des standards, les rendent les plus beaux possible. Le piano sert le chant par un jeu sobre. Ses solos recèlent des notes délicates. Assurément le charme opère. Ecoutez “For All We Know“ l’album qu’ils ont enregistré, et rendez-vous les 13 et 14 au Duc des Lombards. Ces messieurs vous y attendent.

Pierrick Pedron

-On retourne au Duc les 17 et 18 pour découvrir le nouveau groupe de Pierrick Pedron, l’un des meilleurs saxophonistes alto de l’hexagone. Après l’aventure “Omry“, Pierrick revient au bop avec une formation européenne, son European Meeting comprenant le guitariste hollandais Jesse Van Ruller, le pianiste allemand Florian Ross à l’orgue (ce dernier vient de sortir sur le label Pirrouet “Mechanism“ un disque de piano solo très attachant), Thomas Bramerie à la contrebasse et le batteur canadien installé en France Karl Jannuska.

Enrico Pieranunzi

-Après avoir participé cet été au Festival Pianissimo du Sunside (en trio avec Diego Imbert et André Ceccarelli, un concert époustouflant !), le maestro Enrico Pieranunzi retrouve le club les 22 et 23 pour une série de duos avec son compatriote Rosario Giuliani, saxophoniste très talentueux, l’un des meilleurs spécialistes italiens de l’alto.

 

-A l’occasion du 30ème anniversaire de la disparition de Bill Evans, le pianiste Giovanni Mirabassi lui rend hommage en trio au Duc des Lombards les 23 et 24 (avec Gianluca Renzi à la contrebasse et Eliot Zigmund qui fut l’un des batteurs d’Evans). Cette célébration se poursuit le 25 avec un duo Mirabassi – David Linx. Les deux hommes reprendront le répertoire qu’Evans avait enregistré avec Tony Bennett pour Fantasy (10 et 13 juin 1975) et Improv (27 et 30 septembre 1976).              

Nelson-Veras.JPG

-Le contrebassiste Stéphane Kerecki abandonne provisoirement son trio pour de nouvelles aventures musicales. John Taylor est probablement le pianiste britannique le plus subtil tant sur le plan des harmonies que de la finesse de son toucher. Nelson Veras est un jeune prodige de la guitare. Son plus récent album en solo sur Bee Jazz le démontre. Stéphane les accompagne au Sunside les 24 et 25, deux concerts qui officialisera la naissance d’un nouveau trio sûrement très riche en harmonies fines, en subtilités mélodiques. Un enregistrement est prévu pour le label Zig Zag Territoires.

F. Couturier

-Couturier, Méchali, Laizeau se prénomment tous les trois François, comme pour ne faire qu’un avec la musique qu’ils célèbrent sur “Musica Callada“, album consacré aux merveilleuses musiques de Federico Mompou qui vient de paraître. Pour fêter sa sortie, ils se produisent au New Morning le 27 avec bien sûr leurs instruments respectifs : piano, contrebasse, batterie. On attend ce concert avec impatience.

 

-Le 30, le Sunside accueille le contrebassiste Christian Brazier avec le groupe qui l’accompagne dans “Circumnavigation“ son dernier disque, à mon avis son meilleur. Son quartette comprend Christophe Leloil à la trompette et au bugle, Pierre ChristophePerrine Mansuy au piano et au Fender Rhodes et Jean-Luc Di Fraya à la batterie. Ensemble, ils colorent des paysages, de vastes mers sur lesquelles navigue notre imagination. Son Grand Bleu est celui du jazz ; il fait bon y plonger. -Ecouter Pierre Christophe dans un club parisien ne constitue pas un événement dans la mesure où il se produit souvent. Avec son groupe, un quartette depuis qu’Olivier Zanot l’a rejoint au saxophone alto, le pianiste joue beaucoup et c’est tant mieux. Le concert qu’il donnera au Duc des Lombards également le 30 est toutefois un peu spécial, Pierre fêtant la sortie d’un nouvel album, “Frozen Tears“ que vous pouvez dès à présent acquérir.

 

Jazz à la Villette, bandeau

Festival Jazz à la Villette : http://www.jazzalavillette.com

Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

Sunset - Sunside :   http://www.sunset-sunside.com

New Morning : http://www.newmorning.com

 

PHOTOS :  Stéphan Oliva, Pierrick Pedron, Enrico Pieranunzi, Nelson Veras, François Couturier, Pierre Christophe / Olivier Zanot © Pierre de Chocqueuse - Chick Corea © Lynne Goldsmith - Chucho Valdés © Luca Podda   - Gonzalo Rubalcaba © Clay Patrick McBride - José James & Jef Neve © Nathan Gallagher / Universal Music. 

Partager cet article
Repost0

commentaires

B
<br /> Pierre Christophe est quelqu'un de rare. Depuis 2003, avec trois albums consacrés à son professeur Jaki Byard, il a démontré un style personnel et un goût sure dans le choix des répertoires. Mourad<br /> Benhammou le soutient avec finesse à la façon d'un Frank Butler aux côtés d'Elmo Hope. Frozen tears mérite le détour pour ses compositions et le soin porté aux arrangements. Bref, un français qui<br /> remonte le niveau et promet bien des surprises.<br /> <br /> <br />
Répondre
P
<br /> Le secret de ce blog, c'est d'amener à des sons par des images. Un tour de main qui porte une patte...<br /> <br /> <br />
Répondre