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7 juillet 2010 3 07 /07 /juillet /2010 11:56

Herbie Hancock©D. Kirkland aTrois ans après “River, The Joni Letters“, disque consacré à Joni Mitchell pour lequel il obtint le Grammy Award du meilleur album de l’année 2007, Herbie Hancock, 70 ans, est de retour avec un projet très tendance dont je doute qu’il fera l’unanimité de la critique. Produit par Larry Klein qui joue de la basse ou des claviers dans de nombreux morceaux, “The Imagine Project“ a été enregistré aux quatre coins de la planète, et ce pendant plus d’un an avec des musiciens de H. Hancock, covercultures très différentes. Les improvisations d’Herbie au piano acoustique assurent le lien, mais n’ancrent pas pour autant dans le jazz les musiques des pays visités. Comme “Possibilities“ en 2005 (dix chansons et autant de vocalistes), l’album accorde beaucoup de place aux voix et rassemble des vedettes qui ne sont pas des chanteurs et des chanteuses de jazz. Herbie ne signe aucune composition nouvelle, mais reprend des chansons engagées ou parlantes de John Lennon (le fameux Imagine qui donne son nom à l’album), Peter Gabriel, Bob Dylan,Bob Marley, Sam Cooke et les confie à des stars du rock et de la soul pour la plupart impliquées dans des œuvres humanitaires. A travers elles, le pianiste a un message de paix à faire passer et tend la main à l’autre.

 

Imagine ouvre l’album et débute par une très belle introduction en solo, mais très vite, la mélodie hérite de rythmes chaloupés et perd de sa fraîcheur initiale. Konono N°1, un célèbre orchestre de Kinshasa, l’africanise. La malienne Oumou Sangaré et la chanteuse américaine de néo-soul India.Arie assurent les voix. Lionel Loueke et Jeff Beck se partagent les guitares. On peut ne pas adhérer à ce grand déballage de rythmes et de couleurs que l’on trouve aussi dans Tamatant Tilay/Exodus, un medley au beat très solide qui réunit le chanteur canadien d’origine malienne K’naan, le groupe Tex-Mex américain Los Lobos et les musiciens touaregs de Tinariwen pour un résultat quelque peu mitigé. C’est d’ailleurs un des rares morceaux dans lequel Herbie Hancock délaisse son piano acoustique. L’autre est Tomorrow Never Knows, un des titres de “Revolver“, célébrissime album des Beatles. La magie de l’original y a complètement disparu.

 

H. Hancock, inside cover

 

Joliment chanté par Céu, Tempo de Amor fonctionne mieux, de même que La Tierra enregistré avec le chanteur colombien Juanes très populaire en Amérique Latine. Don’t Give Up est également de bonne facture. Alecia Beth Moore alias Pink, chanteuse de pop rock qui a vendu 35 millions d’albums, et John Legend dont la musique mêle habituellement gospel, hip-hop et rhythm’n’blues se chargent des parties vocales. Leur version ne nous fait toutefois pas oublier celle que Kate Bush et Peter Gabriel enregistrèrent en 1986. Dans un tout autre genre, Space Captain vaut surtout pour le duo piano guitare (celle de Derek Trucks) qu’il contient. Enregistré en Inde, tentative de fusion entre la musique indienne et le jazz, The Song Goes On accorde trop de place aux voix (K.S. Chithra et Chaka Khan) au détriment des improvisations qu’on aurait souhaitées plus longues. Menées tablas et tambours battant, ces dernières réservent des dialogues étonnants entre Wayne Shorter au soprano et Anoushka Shankar (une des filles de Ravi) au sitar, Herbie sublime, arbitrant au piano.

 

Herbie Hancock© D. Kirkland bEnregistré à Dublin, The Times, They Are A Changin’ est une des grandes réussites de cet album. On y découvre une chanteuse émouvante Lisa Hannigan. L’instrumentation fournit par les Chieftains donne à cette ballade un aspect irlandais, mais la kora de Toumani Diabete introduit d’autres sonorités, ouvre les portes d’un monde sonore dans lequel se glisse la guitare si personnelle de Lionel Loueke pour répondre au piano et provoquer l’échange. Autre relecture à marquer d’une pierre blanche, celle de A Change Is Gonna Come de Sam Cooke confiée au chanteur britannique James Morrison. Sa voix grave et puissante ne laisse pas insensible - celles que l’on entend brièvement à la reprise sont également les siennes. Autour de lui un orchestre réduit : Dean Parks à la guitare, Tal Wilkenfeld à la basse, Vinnie Colaiuta à la batterie (il joue dans la plupart des morceaux)... Herbie Hancock réserve à ce grand moment de soul ses plus belles harmonies dans une improvisation de plus de cinq minutes. Du jazz enfin me direz-vous. Certes, mais comment ne pas se laisser séduire par les nombreux bons moments que réserve cet album, la haute tenue de ses parties instrumentales ? A défaut de mettre tout le monde d’accord, un merveilleux piano chante constamment et fait entendre une petite voix intérieure qui le rend plus beau et plus précieux que beaucoup d’autres.

Accompagné par Lionel Loueke (guitare), Greg Phillinganes (claviers), Tal Wilkenfeld (basse) et Vinnie Colaiuta (batterie), Herbie Hancock sera au Festival de Jazz à Sète le 12 juillet, à Montreux (Suisse) le 16 juillet, et au Nice Jazz Festival le 21 juillet.

Photos © Douglas Kirkland / Sony Music

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commentaires

B
<br /> Herbie Hancock est un compagnon de vie pour l'amoureux du jazz que je suis. J'ai encore dans le creux de l'oreille la musique de Blow up ou le merveilleux Maiden Voyage qui m'aida à passer mon<br /> temps d'adolescent. Véritable novateur, sublime compositeur, j'ai tout accepté de ce grand pianiste mais je fatigue à l'écoute de ce dermier opus qui m'ennuie pas sa banalité soignée. Une cuisine<br /> anglaise : on prend de bons ingrédients et on sert un plat bien fait mais sans saveur. A trop vouloir séduire le grand public, on peut perdre son âme. Et ce n'est le discours éculé sur la paix et<br /> le métissage dess styles qui fera de cette musique un aussi grand évènement que le quintet de Miles et ses filles du Kilimanjaro.<br /> <br /> <br />
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L
<br /> On attend avec impatience un album de jazz instrumental d'un de nos pianistes et compositeurs préférés. On espère que ce projet de disque en piano solo verra le jour...<br /> <br /> Amitiés<br /> <br /> Lionel<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Cher Pierre, et Cher Lionel, puisque la discussion est ouverte... je ne trouve pas du tout qu'il s'agisse d'une "daube" comme le dit Lionel... j'ai écouté ce disque avec beaucoup d'intérêt, car<br /> Herbie est un ami de longue date, et un musicien que je respecte et admire profondément et j'achète tous ses disques, toujours, tout le temps... et j'aime beaucoup... particulièrement le premier<br /> titre, réunir Seal, Pink, Rokya Traoré, Jeff Beck... c'est pas banal certes, mais le résultat est franchement très réussi... oui, ce n'est pas jazz, oui on perd peut-être le concept des sixties...<br /> mais on est en 2010... et connaissant Herbie, il a dépassé depuis longtemps les soucis de faire des opérations de Marketing... Merci Herbie, le seul artiste à avoir reçu un Grammy Award pour le<br /> meilleur disque de l'Année avec River Joni's Letter (et à son humilité de remercier Miles pour ce Grammy)... à l'immense bonhomme, à la prise de risque réelle dans ce disque, à faire des beaux<br /> disques, et à être dans une recherche permanente... le dernier titre avec Chaka Khan, Wayne, Anoushka est une vraie merveille.<br /> <br /> Herbie, c'est comme Wayne, John, Chick, l'école Miles... et les reproches de Lionel (qui fait partie des très bons journalistes qui ont des oreilles !) me rappellent ce que l'on disait de Miles<br /> dans son virage électrique et fusion...<br /> <br /> Cela étant dit, que l'on aime (ce qui est mon cas), ou que l'on aime pas, Herbie reste un maître, et j'aime sa prise de risque... d'autres font depuis 30 ans le même disque (parfois très bien,<br /> parfois moins bien)... et de toutes les façons, des goûts et des couleurs, on pourrait discuter des heures...<br /> <br /> Et pour réconcilier tout le monde, j'attends, un jour, peut-être un disque en solo d'Herbie... j'ai des extraits en solo de certains concerts, des vrais chefs d'Oeuvres (Embreacable You à Zurich<br /> notamment)... et cela me rappelle des tours avec Herbie, pendant des balances, il jouait en solo, j'étais accoudé sur le piano (que je lui fournissais à l'époque), cela reste des moments immenses<br /> d'émotion, toute l'histoire de la musique coulait sous ses doigts... Herbie est très en avance...c'est un extraterrestre du piano... et même si un jour il faisait un mauvais disque (ce qui n'est<br /> pas arrivé à mes yeux), je lui pardonnerais bien volontiers, tant le bonhomme est immense de générosité, d'humanisme et de musique !<br /> <br /> Christophe,<br /> <br /> <br />
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L
<br /> Une chronique beaucoup trop gentille pour ce disque affligeant, une énorme opération de marketing avec aucun projet musical digne de ce nom. C'est une honte de reprendre ces chansons utopistes et<br /> contestataires des sixties pour en faire un produit aussi formaté, un consensus mou sans aucune vision musicale et aucun discours. C'est incontestablement la grosse daube de l'année.....<br /> <br /> <br />
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