Il y a presque un an, le 18 novembre 2008, Christophe Marguet, Joachim Kühn, Christophe Monniot et Sébastien Boisseau (placé dans cet ordre, la première lettre de leur nom de famille forme l’acronyme MKMB), donnaient un concert mémorable à Nantes, au Grand T, dont j’ai parlé dans les pages de ce blog. Je découvris une musique ouverte, changeante, énergique, d’une grande finesse harmonique, très solide et imaginative sur le plan du rythme. Le quartette s’était produit quatre ans plus tôt en septembre 2004 à l’initiative de Christophe Marguet et n’avait plus guère trouvé le temps de se réunir. Les quatre hommes se retrouvèrent en mai au Studio La Buissonne pour enregistrer ce disque, leur premier, recueil de huit compositions (bénéficiant d’une longue introduction de piano, White Widow occupe deux plages) parfois anciennes, toutes retravaillées, approchées sous l’angle de l’instrumentation que propose leur quartette. Joachim Kühn reste le compositeur le plus prolixe de cette formation sans leader. Méhariste sensible aux musiques africaines et du Maghreb, il nous entraîne dans le désert saharien avec Dahin (écrit pour le trio Kalimba) et Sata, titre inédit débouchant sur une longue improvisation modale scandée par les tambours de Marguet, mélopée développée par l’alto de Christophe Monniot dont les chorus souvent brûlants donnent du piment à la musique. Le saxophoniste confie au groupe son Have You Met Mystic, écrit pour un album que la Campagnie des Musiques à Ouïr réalisa avec le guitariste Gábor Gadó. Musicien raffiné, Kühn y excelle au piano. Il personnalise chaque accord par un toucher ferme et sensuel, joue de longs voicings plein de notes bleues qu’accompagne une section rythmique toujours en éveil. Sébastien Boisseau pose son imposante contrebasse sur la musique, fait entendre une voix mélodique souple et vive. Ecrit pour le Baby Boom de Daniel Humair dont il est le bassiste, Wanbli la met en valeur, mais aussi Ballet, un des deux titres de Christophe Marguet (le second est Song for Bacon), compositions ouvertes inspirées par la peinture et destinées spécialement à cet album. Le batteur commente, suggère, ponctue, dessine des rythmes qui s’ouvrent et se referment pour mieux accueillir une vraie musique de groupe dont on goûte immodérément les audaces.