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4 février 2013 1 04 /02 /février /2013 12:19

Paris-la-blanche-c-PdC.jpegDurs, durs ces mois d’hiver. Les chaussures fourrées à semelles épaisses sont recommandées pour ne pas patauger dans la neige fondue. Il a neigé sur la capitale dont le blanc manteau s’est dissout en eau verglacée. Il vaut mieux rester chez soi en robe de chambre assis près du radiateur ou devant un bon feu à condition d’avoir une cheminée et du bois à brûler. Les bons livres ne manquent pas à cette époque de l’année. Le dernier faux roman de Patrick Deville sur Alexandre Yersin, “Peste et Choléra”, Prix Femina 2012, est épatant. “La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert”, Prix de l’Académie Française et Goncourt des Lycéens, un vrai roman policier, a séduit Monsieur Michu qui l’a dévoré en trois jours. L’amateur de jazz se plongera avec bonheur dans les pages allègres du “Petit Dictionnaire Incomplet des Incompris” d’Alain Gerber publié aux éditions Alter Ego. A peine ces prix ont-ils été décernés qu’une nouvelle vague de 525 ouvrages atterrit chez les rares libraires qui subsistent face à la concurrence déloyale des ventes en ligne. Je leur souhaite d'être plus intéressant que ce torrent de disques dans lesquels l’immense technique des musiciens compense mal un manque d’idées affligeantes.

 

Frileux et fragile, Monsieur Michu n’est guère sorti en janvier. Les soldes lui ont fait arpenter les parquets des grands magasins un après-midi de chien et la remise des Prix de l’Académie du Jazz l’a attiré au théâtre du Châtelet pour ressentir palpiter périlleusement son palpitant à l’écoute de la free music Emile Parisien, Prix Django Reinhardt 2012 controversé. Moins dangereux que les médicaments et les musiques qui empoisonnent, les programmes des clubs parisiens en février promettent de délicieux frissons. Sur place, nos applaudissements généreux font circuler le sang et aident le corps à se réchauffer. On sort aussi le 14, pour la Saint-Valentin. Certains l'attendent en patinant. Ils dessinent des cœurs sur la glace. D'autres suspendent chez eux des portraits de celles qu'ils aiment.

 

Eliane Elias © E. EliasAmoureux de la belle Eliane Elias qui la veille donne un concert au New Morning, Monsieur Michu a accroché cette photo géante de la pianiste chanteuse sur le mur de son salon. En attendant de la rencontrer, il écoute les radios de jazz. Entièrement consacré au trentième anniversaire de la mort de Dizzy Gillespie, le Club Jazz à Fip du 6 janvier fut particulièrement excitant. Philippe machin chose qui ne travaille que le dimanche le mit en joie en diffusant une version irrésistible de Swing Low Sweet Cadillac enregistré pour Verve en 1959.

 

Pierre Lafargue a sûrement apprécié cette émission s'il l'a écoutée. Né en 1932, très attaché à l’Académie du Jazz dont il était l’un des membres les plus anciens, Pierre s’est éteint le 29 janvier. Cultivé, fin connaisseur du jazz, il aimait beaucoup la musique de chambre et les quatuors à cordes qui lui lavaient les oreilles d'un trop plein d'insipidités abondamment médiatisées. On doit à cet ancien collaborateur de Jazz Hot de nombreux textes de livrets aussi documentés qu’amusants pour RCA et Frémeaux & Associés. Il sera enterré vendredi prochain 8 février à 15h30 au cimetière de Pantin. Cet édito lui est dédié.

 

Guillermo KleinQUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

 

-Guillermo Klein au Duc des Lombards le 4 et le 5. Ancien élève du Berklee College of Music (Boston), ce pianiste et compositeur argentin s’est fait connaître par la qualité de ses arrangements. Après avoir joué au Small de New-York à la tête d’un grand orchestre, il a constitué Los Guachos, un tentet qui comprend les saxophonistes Miguel Zenon et Chris Cheek, musiciens avec lesquels il nous donne rendez-vous au Duc. Cosignataire de “Bienestan”, disque remarqué par la critique, le pianiste Aaron Goldberg complète un quartette pour le moins original.

 

Kenny-Werner-c-PdC.jpeg-Le 6 et le 7 Kenny Werner lui succède au Duc des Lombards pour deux concerts en trio, le pianiste s’y faisant accompagner par Johannes Wendenmueller à la contrebasse et Ari Hoenig à la batterie. Kenny a enregistré avec eux deux disques live (au Sunset) en 2000. Musicien à l’imagination féconde, il excelle aussi bien sûr dans le genre qu’en solo, connaît le vocabulaire du jazz et son histoire, son piano élégant aux chaudes couleurs harmoniques n’oubliant jamais de swinguer. Toutes ses prestations sont des évènements. On n’oubliera pas de réserver sa place.

 

Enrico-Rava.jpg-Également le 6 et le 7, Enrico Rava revient jouer au Sunside à la tête de sa formation italienne. Le tromboniste Gianluca Petrella (uniquement le 7) s’offre avec lui de nombreux et passionnants dialogues qu’arbitre très subtilemùent Giovanni Guidi, pianiste aux chorus tamisés qui possède un sens profond des couleurs et des nuances, Gabriele Evangelista à la contrebasse et Fabrizio Sferra à la batterie complètent une formation avec laquelle le trompettiste a enregistré l’un des disques les plus lyriques de sa discographie : “Tribe”, un de mes 13 Chocs de l‘année 2011. Sa musique solaire, sa chaleur toute méditerranéenne est un vrai remède contre le froid de Cedar Waltonl’hiver.

 

-On ne présente plus Cedar Walton, 79 ans le 17 janvier prochain. Originaire de Dallas, installé à New-York depuis 1955, il a joué avec le gratin du jazz, fait partie du Jazztet d’Art Farmer / Benny Golson et des Jazz Messengers d’Art Blakey dont il fut aussi le directeur musical. Outre d’innombrables enregistrements pour Blue Note dont il fut un temps le pianiste attitré, on lui doit la formation d’Eastern Rebellion, un des meilleurs groupes des années 80. Avec lui au Duc pour 4 concerts exceptionnels le 8 et le 9 (20h et 22h), David Williams à la contrebasse et Willie Jones III à la batterie.

 

Ronin-c-Martin-Moll--Ronin-Rythm-Prod.jpeg-Ronin le groupe de Nik Bärtsch au Centre Culturel Suisse (38 rue des Francs Bourgeois 75003 Paris) le 12 et le 13 à 20h00. Le pianiste suisse compose des modules de différentes durées au sein desquels boucles rythmiques et figures répétitives génèrent une musique hypnotique et architecturée à la tension et au groove constamment entretenus. Après “Stoa” (2005), “Holon” (2008) et “Llyria” (2010), tous ces disques sur ECM, Ronin sort un double CD live très représentatif de ses concerts. Outre Nik Bärtsch aux claviers, la formation comprend aujoud'hui  Sha à la clarinette basse et au saxophone alto, Thomy Jordi à la basse électrique, et Kaspar Rast à la batterie. Transe garantie.

 

M.-Johnson---E.-Elias-c-Priscia-Silvestre---ECM.jpg-Marc Johnson (contrebasse), Eliane Elias (piano) et Joe Labarbera (batterie) au New Morning le 13. Marc et Joe furent tous deux membres du trio du regretté Bill Evans et Eliane lui a rendu hommage en 2008 avec son album “Something for You”. Elle s’est fait connaître comme chanteuse auprès d’un large public, mais c’est surtout la pianiste que plébiscitent les amateurs de jazz. On écoutera ses voicings élégants, les couleurs, les harmonies evansiennes de son piano dans “Swept Away” (ECM), un des meilleurs disques de l’an dernier co-signé avec Marc, son mari. Comme elle, ce dernier est aussi un compositeur habile, comme en témoignent Midnight Blue et Foujita, deux des thèmes de cet opus enthousiasmant.

 

Aldo-Romano-c-Jean-Baptiste-Millot-copie-1.jpeg-Aldo Romano au Sunside les 14, 15 et 16 février. Infatigable malgré le poids des ans, le batteur transalpin se présente à la tête d’une nouvelle formation, le New Blood Quartet avec laquelle il sort un nouvel album chez Dreyfus Jazz consacré aux thèmes que le pianiste Freddie Redd composa naguère pour The Connection, une pièce de Jack Gelber crée en 1959 par le Living Theater qui fit l’objet l’année suivante d’un enregistrement Blue Note avec Jackie McLean au saxophone alto. Avec Aldo pour assurer le sang neuf annoncé : Baptiste Herbin, révélation 2012 du saxophone, et au piano son jeune compatriote Alessandro Lanzoni, meilleur jeune soliste au concours international Martial Solal en 2010. Michel Benita à la contrebasse complète la formation.

Fabien-Mary-c-Marina-Chasse.jpeg-Fabien Mary au Sunset le 15 et le 16. Trompettiste inspiré, attaché à la tradition du jazz et à son vocabulaire, Fabien (quatre nominations pour le Prix Django Reinhardt entre 2008 et 2011) a vécu trois ans sa musique à New-York auprès de musiciens américains de haut vol qui partagent avec lui sa passion pour un jazz mélodique qui n’oublie jamais le swing. Enregistré le 9 avril 2012 au Studio Hirsh de Manhattan, “Conception” son nouvel album pour le label Elabeth le présente entouré d’une section rythmique attentive à sa musique. Pour le jouer Steve Ash (piano) et Pete Van Nostrand (batterie) seront à ce rendez-vous parisien, Fabien Marcoz remplaçant David Wong à la contrebasse.

Ignasi-Terraza-trio-c-SWIT-Records.jpg-Méconnu des amateurs de jazz français, le pianiste catalan non-voyant Ignasi Terraza né en 1962 mérite une écoute attentive. À des compositions personnelles de belle facture s’ajoutent de nombreuses reprises de standards de toutes époques qu’il réinvente tout en respectant leurs mélodies, points de départs de ses cheminements harmoniques. Enregistré à Barcelone, “–Sol-It”, son dernier album, un double CD en solo (Swit Records), retient constamment l’attention. Le pianiste est attendu au Duc des Lombards le 18 et le 19 avec Pierre Boussaguet (contrebasse) et Esteve Pi (batterie), musiciens avec lesquels il s’est offert un enregistrement live au Sheraton de Bangkok en 2010. La plupart de ses disques sont disponibles chez Crocojazz, 64 rue de la Montagne Sainte-Geneviève 75005 Paris.

Scott-Colley.jpeg-Un quatuor de rêve au Sunside le 20 et le 21 : Scott Colley (contrebasse), Kenny Werner (piano), Mark Turner (ténor et soprano) et Bill Stewart (batterie) vont y faire des étincelles. Grand technicien, Colley est un rythmicien capable de répondre aux sollicitations mélodiques de Werner, musicien complet qui fait autant danser son piano que chanter. Stewart assure tous les tempos sans jamais trop charger la musique. Au ténor, Turner défriche de nouveaux espaces de liberté, développe de longues phrases mélancoliques dans l’aigu de l’instrument, un langage plus secret et intérieur qu’exubérant. Deux grandes soirées très attendues.

E.-Gomez-c-Claudio-Casanova.jpg-Eddie Gomez en quintette au Sunside le 22 et le 23. Il joua pendant onze ans de la contrebassiste au sein du trio de Bill Evans puis il cofonda Steps Ahead dont la pianiste fut un temps Eliane Elias. Sa carrière d’enseignant ne l’empêche pas d’enregistrer en trio, à Palerme en Italie en 2006, puis avec un quintette italo-américain dans “Per Sempre” (BFM Jazz). Son quintette parisien présentera la même instrumentation avec Matt Marvuglio à la flûte, Marco Pignataro aux saxophones, Hervé Sellin au piano et Franck Agulhon à la batterie. Gomez est aussi à Paris pour une masterclass de trois jours organisée par le Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris.

 Brad Mehldaukevin Hays-Les pianistes Brad Mehldau et Kevin Hays Salle Pleyel le 23 (20h00). Les deux hommes joueront probablement de larges extraits de “Modern Music (Nonesuch), album qu’ils enregistrèrent en duo en 2010 et consacré à des pièces de Steve Reich, Philip Glass et Ornette Coleman, des œuvres du jeune compositeur et arrangeur Patrick Zimmerli et à des compositions personnelles. Moins connu que Mehldau, Hays a pourtant une longue et brillante carrière derrière lui. Auteur de trois albums remarquables sur le label Blue Note, il affectionne les enregistrements  en solo comme en témoignent “Open Range” (ACT) et plus récemment “Variations” (Pirouet).

Sylvia-Howard-c-PdC.jpegChristian Bonnet © PdC-On éprouve un vrai bonheur à l’écoute de Sylvia Howard, chanteuse américaine installée à Paris et attendue au Sunset le 27 avec le Black Label Swingtet constitué de Georges Dersy (trompette), Jean Sylvain Bourgenot (trombone), Christian Bonnet et Antoine Chaudron (saxophones ténors), Jacques Carquillat (piano), Jean de Parseval (basse électrique) et Alain Chaudron (batterie). Récemment édité chez Black & Blue, “Now or Never”, leur nouvel album, renferme un florilège de standards superbement arrangés par Christian Bonnet. On goûtera les chaudes couleurs d’un orchestre qui swingue, à la voix caressante d’une musicienne talentueuse qui chante le blues, nous enchante et nous émeut profondément.   

 

-Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-Centre Culturel Suisse : www.ccsparis.com

-New Morning : www.newmorning.com

-Salle Pleyel : www.sallepleyel.fr

CRÉDITS PHOTOS : Eliane Elias © E. Elias – Paris la blanche, Kenny Werner, Sylvia Howard, Christian Bonnet © Pierre de Chocqueuse – Ronin © Martin Möll / Ronin Rhythm Productions – Marc Johnson & Eliane Elias © Priscia Silvestre / ECM – Aldo Romano © Jean-Baptiste Millot – Fabien Mary © Marina Chassé – Ignasi Terraza trio © SWIT Records – Eddie Gomez © Claudio Casanova Guillermo Klein, Enrico Rava, Cedar Walton, Scott Colley, Brad Mehldau, Kevin Hays © X/D.R.

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commentaires

B
Quel programme en effet ! Bravo Pierre (et merci) de prodiquer tous ces utiles itinéraires. Quant à la campagne sur Emile Parisien, j'ajoute "ma" Pierre.<br /> Le gusse me paraît juste géant! biZ
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