Pour jouer ses compositions, Tineke Postma possède son propre quartette depuis 2006. Marc van Roon en est le pianiste. Frans van der Hoeven (contrebasse) et Martijn Vink (batterie) complètent le groupe. Avant de les réunir, la jeune hollandaise avait joué séparément avec eux. Ensemble, ils constituent la formation idéale pour porter la musique, la rendre plus ouverte. Ce cinquième album est le plus enthousiasmant de la saxophoniste (alto et soprano) qui laisse désormais la musique respirer, économise son souffle pour poser les notes essentielles des mélodies qui l’habitent. Contrebasse et batterie tissent autour des musiques une toile rythmique d’une grande souplesse qui enveloppe délicatement le chant de son saxophone. Souvent modales, les compositions très ouvertes permettent de nombreux changements de tempo. The Observer en bénéficie. Marc van Roon qui joue un piano sensible aux harmonies délicates lui rajoute de discrètes couleurs de synthétiseur. A l’écoute les uns des autres, les musiciens pratiquent un jeu interactif et font circuler leurs idées mélodiques et rythmiques. Tineke fait chanter son saxophone dans Before the Snow, une composition élégante aux contours brumeux et oniriques. Son adaptation de Canção de Amor, un extrait d’un poème symphonique de Heitor Villa-Lobos met en lumière son thème inoubliable. Elle prend le temps de le décliner et espace beaucoup ses notes dans le mélancolique Newland, une des deux compositions de son contrebassiste. Le funk baigne et épaissit les rythmes de la seconde, Beyond Category, mais le groupe évite toute lourdeur et privilégie la fluidité du discours collectif. The Man who Stared at Coats, génère un swing léger et aérien. Me a Place Underground, un poème de Pablo Neruda mis en musique, tranche avec les autres morceaux de l’album. Tineke l’a confié à Esperanza Spalding. Je n’aime pas trop ses disques, mais elle possède une jolie voix et nous offre quelques mesures de scat qui ne sont point ridicules. Off Minor de Thelonious Monk un duo fiévreux pour saxophone et piano, permet de se rendre compte de la grande maîtrise technique de la saxophoniste. Une conversation brillante et bavarde entre deux pièces lyriques. Car Tineke Postma souffle surtout des notes paisibles qui font autant de bruit qu’une pluie de feuilles un jour de grand vent. Leur bleu éclatant se confond avec celui du ciel.
Tineke Postma se produira avec son quartette les 16 et 17 mai au Duc des Lombards