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25 février 2015 3 25 /02 /février /2015 09:00
Vijay IYER Trio : “Break Stuff” (ECM / Universal)

Après un album déconcertant avec des cordes entremêlées d’électronique, Vijay Iyer retrouve le trio qui l’accompagne depuis plus de onze ans. Stephen Crump (contrebasse) et Marcus Gilmore (batterie) lui ont déjà permis d’explorer de nombreux territoires sonores, de défricher d’autres métriques. Les réussites n’ont pas manqué, le novateur “Historicity” (2009) gardant ma préférence. Plus accessible, “Break Stuff” reste tout aussi surprenant. On est d’emblée déconcerté par la simplicité de Starlings qui ouvre le disque, mais aussi par Wrens qui renferme l’album. De même que Geese, ces pièces proviennent d’“Open City”, une collaboration entre Iyer et le romancier nigérien Teju Cole, une suite musicale consacrée aux oiseaux de New York. Réduction d’un travail conçu pour grand ensemble, ces morceaux très aérés laissent beaucoup d’espace au soliste. La section rythmique n’en reste pas moins active. On perçoit mieux son travail dans ces pièces lentes que teintent de belles couleurs harmoniques. Sur tempo rapide, le piano enregistré (ou mixé) trop en avant masque un peu la contrebasse et le jeu du batteur. Ce dernier parvient à rythmer les morceaux les plus complexes. Hommage au producteur et DJ Robert Hood figure culte de la scène techno de Detroit, Hood décoiffe par ses métriques impossibles et qui pourtant fonctionnent. J’ose dire que Marcus Gilmore est un as, sans doute le plus grand batteur de sa génération. Il semble ignorer les difficultés que pose Mystery Woman et son rythme de mridangam (tambour à deux faces de forme oblongue), une pièce s’inscrivant dans la tradition de la musique carnatique de l’Inde du Sud et qui fait partie d’une autre suite que le trio créa au Museum of Modern Art de New York. S’il introduit un rythme de reggae inattendu dans Taking Flight, la grande influence de Gilmore reste toutefois Brice Wassy, un batteur camerounais qui joua beaucoup avec Manu Dibango et fut le directeur musical de l’orchestre de Salif Keita. Des rythmes de l’Afrique de l’Ouest enrichissent une relecture fiévreuse de Countdown, un classique de John Coltrane. Le pianiste s’offre de longs voicings aux notes dissonantes, organise et transforme le morceau en lui donnant un autre groove. Il respecte bien davantage la musique de Thelonious Monk dans sa reprise étonnamment fidèle de Work, un des thèmes le plus étrange du pianiste. Dans ses disques, Vijay Iyer convoque ses modèles, et renouvèle son attachement à la tradition du jazz en réinventant Bud Powell, Cecil Taylor, Andrew Hill, Herbie Nichols et Duke Ellington. Outre des compositions de Monk et de Coltrane, “Break Stuff” contient Blood Count de Billy Strayhorn qu’il interprète en solo. Le musicien rigoureux se laisse aller à l’émotion, aère son jeu, semble écouter ses notes, comme s’il cherchait son inspiration au cœur même du piano.

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20 février 2015 5 20 /02 /février /2015 11:00

“Le Peuple des Silencieux” (DE WERF / dewerf.be)

Nathalie LORIERS / Tineke POSTMA / Philippe AERTS :

Dès qu’elle pose ses doigts sur le clavier, la magie opère. Question de toucher, de phrasé, d’imagination harmonique. De talent surtout, car faire naître une mélodie du silence n’est pas donné à tout le monde. Pianiste attitrée du Brussels Jazz Orchestra, l’un des meilleurs big band européen, Nathalie Loriers n’est pas seulement une pianiste expérimentée, la meilleure de Belgique, elle compose aussi des thèmes qui chantent, parlent au cœur et favorisent le swing. Son disque “Silent Spring” la fit découvrir au public français en 1999. Lauréate du Prix du Musicien Européen de l’Académie du Jazz l’année suivante, cette styliste élégante qui fait sonner puissamment des notes aux couleurs chatoyantes, ne donne que de rares concerts dans l’hexagone. Il ne faudrait pas pour autant ignorer cette artiste qui consacre beaucoup de temps à ses élèves et dont les albums peu nombreux nous sont infiniment précieux. Après “Les 3 petits singes” (2011), Nathalie cosigne avec ses musiciens son nouveau disque, l’enregistrement d’un concert de 2013 donné dans le cadre du Gaume Jazz Festival. Elle y rencontre la saxophoniste hollandaise Tineke Postma. Un rendez-vous heureux que Philippe Aerts, son fidèle bassiste, fait bien davantage qu’arbitrer. Il est la troisième voix mélodique d’un trio qui prend le temps d’improviser, exprime sa joie de jouer, d’inventer. Dédié à Charlie Haden, Le Peuple des silencieux contient un émouvant solo de contrebasse. Introduite par Tineke à l’alto, la pièce reste une des plus attachantes d’un disque au sein duquel les échanges, nombreux, débordent de naturel. Sa première plage, Canzoncina est ainsi bien différente de la version qu’en donne Nathalie dans son album précédent. Les mélodies portent des musiques nouvelles. Une imagination vive et fertile leur donne vie. Musicienne accomplie, Tineke fait chanter ses saxophones (alto et soprano), souffle de belles notes aériennes dialogue avec une pianiste qui écoute et fait respirer sa musique. Piano et saxophone entrecroisent leurs lignes mélodiques dans Lennie Knows, un hommage à Lennie Tristano. Nathalie l’a beaucoup écouté. En 1993, elle a enregistré avec Lee Konitz, son élève. L’album s’intitule “Discoveries”. Philippe y tient la contrebasse. Vingt ans plus tard, la sonorité ronde et boisée de son instrument accompagne deux musiciennes qui ont beaucoup à se dire et nous séduisent par leurs histoires.

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7 février 2015 6 07 /02 /février /2015 14:55
Éloge de la vieillesse

Février : Un an seulement après Jim Hall (décédé le 13 décembre 2013), Buddy DeFranco nous a quittés le 24 décembre à l’âge de 90 ans. Des musiciens de cette génération, des témoins qui donnèrent au jazz ses lettres de noblesse et connurent son âge d’or, il n’en reste plus beaucoup. Les survivants n’ont pas tous la santé de Sonny Rollins ou d’Ahmad Jamal qui maîtrisent leurs instruments comme au mitan de leur carrière, comme si le temps les avait oubliés. Difficile pour certains d’entre eux d’éviter tremblements, fausses notes et approximations. Le feeling compense toutefois ces défaillances dues à l’âge. L’expérience aussi. On s’économise, on joue moins vite. Une respiration plus lente embellit la musique. Le poids des ans peut inclure la sagesse. Comment ne pas être ému devant le chant du cygne d’un Lee Konitz. Le son si mince de son alto peine à porter ses notes. La musique pourtant surgit encore, avec ses fêlures, ses fièvres, lumière pâle mais assurément visible et vivante. Entendre Hal Singer souffler ses 95 bougies dans son ténor en octobre fut aussi un grand moment d’émotion.

 

Si certains préfèrent arrêter, passer à autre chose c’est le cas de Robert Wyatt qui a récemment annoncé qu’il ne souhaitait plus faire de disques – d’autres n’ont plus grand-chose à dire et vivent sur leur réputation. Dans son nouveau disque, Bob Dylan, 75 ans l’an prochain, reprend des chansons enregistrées par Frank Sinatra. Sa voix défaillante ne leur rend pas justice. Entouré par un petit ensemble de vents, une pedal steel envahissante, le génial créateur de “Blonde on Blonde” n’est que l’ombre de lui même. En petite forme depuis plusieurs mois, Keith Jarrett donne le change en publiant de vieilles bandes. Enregistré avec Paul Motian et Charlie Haden qui nous ont récemment quittés, “Hamburg ’72”, opus peu inspiré du pianiste est pourtant fort applaudi. Un concert dans lequel les cris d’orfraie qu’il tire de son saxophone soprano insupportent. Au piano son immense technique ne compense pas toujours son manque d’idées, mais il nous a donné de si grands disques que l’on peut se montrer indulgent.

 

Jazz Magazine l’est tellement qu’il accorde un Choc à l’album. Le numéro de février inaugure une nouvelle formule, une mise en page plus aérée à laquelle il faudra s’habituer. Le nom de Jazzman a pourtant disparu de la couverture. Dommage pour cette revue qui eut son importance et que beaucoup regrettent. On se consolera en se rendant dans les rares clubs de jazz qui parsèment encore la capitale, ou encore dans le Val-de-Marne, à Créteil ou Villejuif pour “Sons d’hiver” et son plein de frissons. L’événement du mois reste toutefois le concert que donnera le Vintage Orchestra au Sunside le 9. Après Laurent Cugny qui a remonté un big band autour de Gil Evans, Dominique Mandin ressuscite le sien pour célébrer le répertoire du Thad Jones / Mel Lewis Orchestra. Le jazz vieillit bien. Mais qui a dit qu’il était mort ?

 

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

Éloge de la vieillesse

-Depuis le 5 février, René Urtreger fait entendre son beau piano au Duc des Lombards. Le 7, le saxophoniste Pierrick Pedron rejoindra Yves Torchinsky à la contrebasse et Eric Dervieu à la batterie, ses musiciens habituels, pour apporter d’autres couleurs à sa musique.

Éloge de la vieillesse

-Laurent de Wilde au piano, Bruno Rousselet à la contrebasse et Donald Kontomanou à la batterie, c’est toujours le 7 mais au Sunside. En trio, Laurent cisèle un jazz acoustique qui lui tient beaucoup à cœur. Constamment renouvelée, sa musique devient échange, dialogue, et ne manque jamais de se faire belle.

Éloge de la vieillesse

-Cela faisait un moment que l’on entendait plus parler du Vintage Orchestra, formation de seize musiciens que dirige Dominique Mandin. On y découvrit la jeune Sophie Alour au saxophone ténor. Après plusieurs années de silence (“Thad” leur disque précédent remonte à 2004) l’orchestre qui se consacre toujours au répertoire du Thad Jones/Mel Lewis Big Band, donnera un concert exceptionnel au Sunside le 9 février. Outre Dominique Mandin et Sophie Alour aux saxophones, il aligne dans ses rangs des musiciens qui nous sont familiers tels Olivier Zanot (saxophone), Thomas Savy (clarinettes), Fabien Mary et Yoann Loustalot (trompettes), Daniel Zimmermann et Jerry Edwards dans la section de trombones, Florent Gac, Yoni Zelnik et Andrea Michelutti assurant la rythmique.

Éloge de la vieillesse

-Un all-star réuni et dirigé par le trompettiste Jeremy Pelt occupera le Sunside le 10. Steve Nelson au vibraphone, Dany Grissett au piano Peter Washington à la contrebasse et Bill Stewart à la batterie, l’affiche est pour le moins alléchante. Ils joueront probablement un bop tonique et rafraichissant. Véloce, Pelt étonne par sa maîtrise technique et sa vélocité. Ses notes jaillissent impeccablement sculptées, portées par un souffle puissant. Nelson séduit par son jeu tant rythmique que mélodique et la section rythmique ne peut qu’impressionner.

Éloge de la vieillesse

-Le label Parallel Records fête les deux premières sorties de son catalogue le 11 au Sunside. Intitulé “Very Blue”, l’un des deux disques réunit le pianiste Emil Spanyi et le contrebassiste Jean Bardy. C’est la première fois qu’Emil Spanyi co-signe un disque sous son nom. On l’a entendu jouer un magnifique piano auprès de Nicolas Folmer et de Daniel Humair. Le duo interprète des standards – Come Sunday, I Love You Porgy, Along Came Betty et propose quelques compositions originales.

Éloge de la vieillesse

-Hank Mobley et Grant Green à l’honneur le 11 et le 12 au Duc des Lombards, le saxophoniste Eric Alexander consacrant plusieurs concerts à leurs musiques. Des rendez-vous en quintette avec une section rythmique confiée à Viktor Nyberg (contrebasse) et à Bernd Reiter (batterie). Le guitariste allemand Helmut Kagerer aura mission d’évoquer Green. Quant au piano, Eric Alexander fait le bon choix en s'entourant d'Olivier Hutman. Rompu au vocabulaire du bop, le blues dans les doigts, Olivier saura saupoudrer la musique d’harmonies fines et faire battre son cœur.

Éloge de la vieillesse

-Dans le cadre du festival Sons d’Hiver, le théâtre Romain Rolland de Villejuif accueille Theo Bleckmann en solo le 11 et le 12. Chanteur inclassable à la voix de haute-contre, on lui doit quelques perles sur le label Winter & Winter : un disque du Refuge Trio (Gary Versace et John Hollenbeck sont de l'aventure), “Twelve Songs” de Charles Ives avec Kneebody et “Hello Hearth !”, un hommage à Kate Bush dont il reprend les musiques.

Éloge de la vieillesse

-Le 13, Patrice Caratini présente au Sunset son Voyage Sextet. La formation comprend aussi Denis Leloup (trombone), François Bonhomme (cor), Clément Caratini (clarinette), Maryll Abbas (accordéon) et Leonardo Sanchez (guitare). Au programme : du jazz, des pièces brèves, mais aussi de la musique française de la première moitié du XXe siècle qui laisse de la place aux solistes.

Éloge de la vieillesse

-Le même soir à 20h30, toujours dans le cadre du Festival Sons d’Hiver, la Maison des Arts de Créteil propose un concert du trompettiste Ambrose Akinmusire. Son dernier disque, “The Imagined Savior Is Far Easier To Paint”, vient de recevoir le Grand Prix 2014 de l’Académie du Jazz, mais sur scène, Ambrose propose une musique différente et largement improvisée. Entouré de ses musiciens habituels – Walter Smith III au saxophone ténor, Sam Harris au piano, Harish Raghavan à la contrebasse et Justin Brown à la batterie – il retrouvera à Créteil le guitariste Charles Altura et le chanteur Theo Bleckmann qui ont participé à l’album.

Éloge de la vieillesse

-Au Duc des Lombards, le 18, le pianiste Pierre Christophe proposera un nouveau répertoire, celui de Dave Brubeck, mais aussi quelques compositions personnelles dont il a le secret. Olivier Zanot au saxophone alto tiendra le rôle de Paul Desmond. Enfin, on ne change pas une rythmique qui gagne. Raphaël Dever à la contrebasse et Mourad Benhammou à la batterie seront donc bien au rendez-vous.

Éloge de la vieillesse

-Aaron Goldberg au New Morning le 24, en trio avec Reuben Rogers à la contrebasse et Gregory Hutcherson, batteur avec lequel il aime jouer lorsqu’Eric Harland est indisponible. “The Now”, son nouvel album, contient des compositions personnelles, quelques standards du bop, des pièces empruntées au répertoire sud-américain et même un morceau traditionnel haïtien. On n’est jamais déçu par les concerts de ce pianiste qui propose des relectures raffinées de morceaux peu joués, leur donne rythme, couleurs et un supplément d'âme.

Éloge de la vieillesse

-Chris Potter retrouve le New Morning le 25 avec Adam Rogers (guitare), Fima Ephron (basse) et Nate Smith (batterie). Saxophoniste musclé, technicien doué et demandé, il apparaît dans de nombreux albums de Paul Motian (il intégra très jeune son Electric Bebop Band) et signe régulièrement des disques sous son nom. Les meilleurs sont ceux dans lesquels, à la tête de formations de taille moyenne, il donne libre cours à son talent d’arrangeur. “Song for Anyone” en 2007 ou “Imaginary Cities”, son plus récent disque pour ECM, sont ainsi des réussites.

Éloge de la vieillesse

-Antonio Faraò au Duc des Lombards en trio le 27 avec Sylvain Romano (contrebasse) et Jean-Pierre Arnaud (batterie) et en quartette le 28, Pierrick Pedron (saxophone alto) rejoignant la formation. Coloriste raffiné aimant les logues phrases fluides et chantantes mais capable de jouer un piano énergique, Faraò a signé plusieurs albums remarquables ces dernières années. Les plus recommandables : “Domi” en trio avec Darryl Hall et André Ceccarelli, et “Evan” disque dans lequel il a la bonne idée de réunir Joe Lovano, Ira Coleman et Jack DeJohnette.

Éloge de la vieillesse

-Larry Willis en duo avec Buster Williams le 27 et le 28 au Sunside. Plus âgé de deux ans que Williams qui est né en 1942, Willis appris le piano en autodidacte. Jackie McLean lui fournit un de ses premiers engagements. Il tient le piano dans “Right Now !” (1965), sa première apparition sur un disque. Plus de 300 suivront avant qu'il ne devienne, dans la seconde moitié des années quatre-vingt, le pianiste du sextette de Carla Bley dont le succès le fit connaître à un large public. La carrière de Buster Williams est tout aussi exceptionnelle. Membre des Jazz Crusaders et de la formation électrique d’Herbie Hancock (celle qui enregistre les sommets du genre que sont “Mwandishi”, “Crossings” et “Sextant”), il a également travaillé avec Woody Shaw, Ron Carter, Billy Hart et côtoyé les grands du jazz. Il se distingue à la contrebasse par sa maîtrise sonore, l’assise rythmique exceptionnelle qu’il apporte à la musique.

-Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Sunset-Sunside : www.sunset-sunside.com

-Festival Sons d’Hiver : www.sonsdhiver.org

-New Morning : www.newmorning.com

 

Crédit Photos : René Urtreger © Philippe Marchin –  Laurent de Wilde © Sylvain Gripoix – Jeremy Pelt © Sally Pritchard – Emil Spanyi & Jean Bardy © Marc Ulrich – Eric Alexander © Gene Martin – Theo Bleckmann © Jörg Grosse Geldermann – Patrice Caratini © Nathalie Mazeas – Ambrose Akinmusire © R.R. Jones – Pierre Christophe © Sébastien Caverne – Chris Potter © Bart Babinsky / ECM – Antonio Faraò © Roberto Cifarelli – Vintage Orchestra, Aaron Goldberg, Larry Willis & Buster Williams © Photos X/D.R.

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29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 09:45
Vendanges académiques : le cru 2014

Rendez-vous médiatique autant que jazzistique, l’Académie du Jazz attire et rassemble. Comprenant des musiciens, des journalistes, des représentants du métier du disque et des sociétés civiles, la foule qui se pressait le lundi 19 janvier au théâtre du Châtelet à sa traditionnelle remise des prix ne me contredira pas. Chaque année, l’Académie décerne dix prix. Ils témoignent de la pluralité « d’une musique tolérante qui a prospéré dans des lieux de tolérance » précisa le Président François Lacharme dans son discours introductif, ajoutant que les tragiques évènements survenus au siège de Charlie Hebdo privaient l’Académie de la présence de Cabu.  « Il était assis avec nous et nous manque beaucoup ». Musique que personne ne s’accorde à définir de manière satisfaisante, le jazz parvient, année après année, à fédérer un aréopage de journalistes aux goûts variés, un corps électoral qui, en toute indépendance, établit un palmarès reflétant sa richesse.

Vendanges académiques : le cru 2014

Le Prix du livre de Jazz échut à Lau- rent Cugny pour le premier tome d’“Une histoire du jazz en France” aux Editions Outre-Mesure, passionnant ouvrage universitaire de plus de six cents pages (quatre tomes sont prévus), et à Jean-Luc Katchoura pour une non moins volumineuse biographie de Tal Farlow réalisée avec la collaboration de Michele Hyk-Farlow. Veuve du guitariste, elle confia ses archives à l’auteur, l’ouvrage, édité par les Editions Paris Jazz Corner (Arnaud Boubet) et mis en page par Philippe Ghielmetti, se voyant ainsi illustré par une très riche iconographie. Nos deux ex æquo furent quelque peu surpris lorsque François Lacharme tendit à chacun la moitié d’un trophée, une blague académique bien sûr, saluée par des rires et des applaudissements.

Vendanges académiques : le cru 2014

Ne pouvant participer à cette cérémonie, Robert Cray, Prix Blues pour “In My Soul”, son neuvième album, avait fait parvenir un petit film dans lequel il remercie du fond du cœur l’Académie et sa commission blues. Rédacteur en chef de la revue Soul Bag et membre de cette commission, Nicolas Teurnier décachetant les enveloppes révéla les finalistes, Robert Cray, mais aussi Mali Music (de son vrai nom Kortney Jamaal Pollard) pour le Prix Soul. Son disque, “Mali Is”, mêle naturellement de nombreuses influences, folk, blues, jazz, soul, gospel faisant bon ménage dans un opus très réussi.

Vendanges académiques : le cru 2014

Deux ex æquo également pour le Prix du Meilleur Inédit ou de la Meilleure Réédition privilégiant un travail éditorial. Attaché à la sauvegarde de notre patrimoine sonore, Patrick Frémeaux fut récompensé pour l’ensemble de ses rééditions jazz consacrées à la discographie des géants qui en ont bâti l’histoire ou à des anthologies, des coffrets aux livrets particulièrement soignés, les textes bilingues d’Alain Gerber, Daniel Nevers, Gilles Pétard, Alain Tercinet, ou du regretté Pierre Lafargue aidant à comprendre cette musique, à la rendre perméable aux non-initiés.

Vendanges académiques : le cru 2014

Également primé, Sidney Bechet “In Switzerland / En Suisse”. Tirée à 2000 exemplaires, cette édition (un coffret) comprend 4 CD audio et un livre bilingue (français / anglais) de 216 pages qui réunit 250 photos et 140 documents rares ou inédits. Les textes sont de Fabrice Zammarchi et de Roland Hippenmeyer, les biographes du saxophoniste; les préfaces de Daniel Sidney Bechet son fils, de Bob Wilber son élève et de Claude Wolff son manager. La musique réunit plus de 4h15 de concerts, de spectacles radiophoniques, d’interviews rares ou inédits provenant des archives de Radio-Genève, de Radio-Lausanne et de fonds privés. Le trophée fut remis à Fabrice Zammarchi (photo), David Hadzis portant le projet au nom de la United Music Foundation. Installée à Genève, créée depuis moins de deux ans, cette fondation a pour objectif la préservation du patrimoine musical enregistré et sa mise en valeur. Daniel Sidney Bechet (caisse claire et charleston), Olivier Franc (sur le soprano de Bechet) et Jean-Baptiste Franc (piano) assurèrent un intermède musical en interprétant Sweet Louisiana et I’ll Be Proud of You.

Vendanges académiques : le cru 2014

L’Académie rendit aussi hommage à Billie Holiday. Née en 1915, elle aurait eu cent ans en avril prochain ce qui explique que le carton d’invitation à la présente cérémonie, une photo de Jean-Pierre Leloir, porte son effigie. Pour en parler, François Lacharme convia au téléphone Michel Gaudry, l’un des derniers musiciens qui joua avec elle. Il tient la contrebasse dans le document prêté par l’INA (“Music Hall Parade, 1958”) qui fut projeté dans le foyer.

Vendanges académiques : le cru 2014

Auteur d’un roman (“My Name is Billie Holiday” chez Albin Michel) et d’un spectacle sur la chanteuse, Viktor Lazlo monta sur scène pour lui témoigner son admiration : « Sa voix véhiculait tant de sensations ! En vieillissant, mon parcours m’a progressivement rapproché d’elle. J’ai plongé dans un répertoire que, sans elle, je n’aurais probablement jamais connu, essayant dans mon spectacle de restituer le bonheur qu’elle m’avait apporté. »

Vendanges académiques : le cru 2014

Victor Lazlo remit à la chanteuse danoise Sinne Eeg le Prix du Jazz Vocal pour son album “Face the Music”, son septième, un disque enregistré sur trois jours à Copenhague, l’un des seuls à avoir été correctement distribué en France où elle reste par trop méconnue. Sinne avait fait le voyage de Los Angeles pour recevoir son prix. Elle chante des standards, ses propres morceaux, maîtrise parfaitement le scat et affectionne les morceaux de bravoure. Accompagné par Jacob Christoffersen, son pianiste, et par Stéphane Kerecki à la contrebasse, elle reprit un morceau du répertoire de Billie Holiday, You’ve Changed, et l’une de ses compositions, Crowded Heart, deuxième plage de l’album récompensé.

Vendanges académiques : le cru 2014

Le très convoité Prix Django Reinhardt fut attribué à Airelle Besson devant la chanteuse Cécile McLorin Salvant et le pianiste Paul Lay. Retenue en Algérie par un problème de visa, Airelle ne put venir chercher son prix, mais envoya une vidéo réalisée à New York quelques jours plus tôt dans laquelle, très émue, elle remercie vivement les membres de l’Académie du Jazz « J'aurais tant aimé être des vôtres pour partager ce moment unique. J'ai pensé à vous très fort et suis extrêmement triste et désappointée de n’avoir pas été présente » écrit-elle dans une lettre qui l’accompagne. En son absence, Patrick Schuster des disques Naïve et Petra Gehrmann de Métisse Music, son éditeur, saluèrent la trompettiste, « une artiste très fine, ouverte à de nombreux genres de musique, toujours d’accord pour travailler sur d’autres projets que les siens », mais aussi son partenaire, le guitariste Nelson Veras.

Vendanges académiques : le cru 2014

Pressé de remettre le Prix du disque Français à Stéphane Kerecki pour son album “Nouvelle Vague”, taquiné pour les chaussettes notoirement dépareillées qu’il portait lors de sa dernière visite à l’Académie (une photo faisant foi), Jean-Pierre Mocky, répondit avec humour aux questions de François Lacharme. Après un film avec Gérard Depardieu et Pierre Richard récemment terminé, le cinéaste doit en tourner un autre, toujours avec Depardieu, en Russie, du Tchekhov, « un type formidable qui a écrit 700 nouvelles que personne ne connaît », Mocky nous confiant aussi ses impressions sur les réalisateurs de la Nouvelle Vague.

Vendanges académiques : le cru 2014
Vendanges académiques : le cru 2014

Accompagné par John Taylor au piano, Stephane Kerecki interpréta Gary, un des morceaux de “Patience”, un disque de 2010, le premier que Stéphane et John enregistrèrent ensemble, et, composé par Paul Misraki, le thème principal d’“Alphaville” de Jean-Luc Godard, un extrait du disque primé que Stéphane décrit comme « une aventure, la rencontre de cinq personnes. John Taylor, Emile Parisien, Fabrice Moreau et Jeanne Added ont eu une énorme responsabilité dans l’élaboration de cette musique. Sans eux, ce disque n’aurait vraiment pas été le même ».

Vendanges académiques : le cru 2014

Le Grand Prix de l’Académie du Jazz fut attribué à Ambrose Akinmusire pour “The Imagined Savior Is Far Easier To Paint” devant un album Impulse ! de Ran Blake. Le précédent disque du trompettiste avait déjà été récompensé “When the Heart Emerges Glistening” obtenant le prix en 2011. Ne pouvant être présent, Ambrose fit parvenir à l’Académie un petit film dans lequel il improvise sur un piano droit. Des post-it sont fixés au cadre. Il s’en saisit pour caresser les touches de son clavier et les présenter à la caméra. On découvre alors, non sans surprise, que tous contiennent un nom, celui d’une victime des responsables de la tuerie de Charlie Hebdo. En son absence, Nicolas Pflug (Blue Note) et Mariah Wilkins (son manager, ici en photo), récupérèrent le trophée.

Vendanges académiques : le cru 2014

Cabu possédait de nombreux amis parmi les académiciens (Christian Bonnet, Claude Carrière) et aimait participer à cette remise de prix. « Il était là et il croquait tout le monde, de dos, de face, de profil, son crayon recréant le mouvement, le swing qu’il aimait tant. Cabu était un amoureux du jazz et des jazzmen ». Ce portrait du dessinateur est de Jean-François Pitet, un de ses proches. Pour lui rendre hommage, il nous offrit un montage de ses dessins, un petit film dont la projection fut saluée par une émouvante standing ovation. On y voit Cabu dessiner et danser sur « un morceau qu’il appréciait, un morceau de son idole Cab Calloway, Jumpin’ Jive dans une version de 1943, celle de “Stormy Weather”. Lorsque Cabu l’écoutait, il ne tenait pas en place ».

Après avoir remercié les sponsors de l’académie et leurs représentants, Jean-Luc Choplin directeur du Châtelet, Jean-Jacques Goron et Ann d’Aboville de la Fondation BNP Paribas, François Besson et Lilian Goldstein de la SACEM, Jean-Paul Bazin de la SPEDIDAM, le Goethe Institut dont les locaux de l’avenue d’Iena abrite depuis plusieurs années l’Assemblée Générale de l’Académie, et Franck Binard, Président du Conseil des vins de Saint-Émilion, François Lacharme appela sur scène Dominique Renard, le directeur du Festival de Jazz de Saint-Émilion (« un assemblage de vin et de musique ») afin de remettre le Prix du Jazz Européen.

Vendanges académiques : le cru 2014

Les pianistes Michael Wollny et John Taylor se le partagèrent. Interrogé sur sa carrière, Taylor, né en 1942, cita les noms de Ronnie Scott, Johnny Griffin, Joe Henderson, Lee Konitz et Kenny Wheeler, musiciens qu’il accompagna. On lui doit la création du groupe Azimuth (avec la chanteuse Norma Winstone qui fut son épouse) et il enregistra quatre albums en trio pour ECM sous le leadership du batteur Peter Erskine. Le label italien Cam Jazz abrite ses disques les plus récents. Taylor confia être particulièrement touché par ce prix, le premier qu’on lui remettait. Il salua également son collègue Michael Wollny qui fut un de ses élèves lorsqu’il enseignait en Allemagne. Le manager de ce dernier, Philippe Ochem, prit ensuite la parole : « Michael donne ce soir un concert à l’auditorium de la radio de Brême, au nord de l’Allemagne. Il m’a chargé de vous dire qu’il était très honoré de partager ce trophée avec John Taylor qui a été son professeur et mentor ».

Vendanges académiques : le cru 2014

Après un intermède pianistique confié à Taylor qui interpréta en solo une version mémorable d'Ambleside, composition qu’il a enregistrée plusieurs fois, François Lacharme appela sur scène Petula Clark, Sapho, Christian Morin et Fabienne Thibeault pour remettre le Prix du Jazz Classique. Un choix de dernière minute, des évènements imprévus rendant impossible la présence d'Abd Al Malik et de Juliette Greco, les remettants prévus. Cette dernière exprima ses regrets dans un texto qu’elle fit parvenir à l’Académie : « Je suis tellement triste de ne pas pouvoir partager avec vous le pain, le vin et les bonheurs fous que provoque la musique. Me reste votre invitation et vos mots, et cela est aussi du bonheur. » Le prix fut attribué à Tchavolo Schmitt pour son album “Mélancolies d’un soir”.

Vendanges académiques : le cru 2014

Lauréats et remettants furent appelés à se rassembler pour une photo et le public convié au traditionnel cocktail tant prisé pour ses grands crus de Saint-Émilion – Château Jucalis, Clos des Menuts et autres dives bouteilles débouchées par l’infatigable commissaire Mégret –, François Lacharme concluant cette remise de prix par la formule désormais célèbre « Après le bla-bla, le glou-glou », invitation oh combien irrésistible à déguster des vins divins. La remise des prix 2014 : un grand cru assurément !

Le site officiel de l’Académie du Jazz pour la connaître davantage : www.academiedujazz.com

Vendanges académiques : le cru 2014

LE PALMARÈS 2014

Prix Django Reinhardt :

Airelle Besson

Grand Prix de l’Académie du Jazz :

Ambrose Akinmusire « The Imagined Savior Is Far Easier To Paint » (Blue Note/Universal)

Prix du Disque Français :

Stéphane Kerecki « Nouvelle Vague » (Out Note/Harmonia Mundi)

Prix du Musicien Européen :

Ex-aequo : John Taylor, Michael Wollny

Prix de la Meilleure Réédition ou du Meilleur Inédit :

Ex-aequo :

Patrick Frémeaux pour l’ensemble de ses rééditions jazz

Sidney Bechet « In Switzerland / En Suisse »  (Coffret de 4CDs United Music Foundation)

Prix du Jazz Classique :

Tchavolo Schmitt « Mélancolies d’un soir » (Label Ouest)

Prix du Jazz Vocal :

Sinne Eeg « Face The Music » (Stunt/UnaVoltaMusic)

Prix Soul :

Mali Music « Mali Is… » (ByStorm-RCA/Sony),

Prix Blues :

The Robert Cray Band « In My Soul » (Provogue/Wagram)

Prix du livre de Jazz :

Ex-aequo :

Laurent Cugny « Une Histoire Du Jazz En France Tome 1 : Du Milieu Du XIXe Siècle à 1929 » (Outre Mesure)

Jean-Luc Katchoura With Michele Hyk-Farlow « Tal Farlow : Un Accord Parfait / A Life In Jazz Guitar » (Paris Jazz Corner)

Vendanges académiques : le cru 2014

CREDITS PHOTOS :

François Lacharme, Jean-Luc Katchoura & Laurent Cugny, Patrick Frémeaux, Fabrice Zammarchi, Viktor Lazlo, Sinne Eeg, Petra Gehrmann & Patrick Schuster, Jean-Pierre Mocky & François Lacharme, Stéphane Kerecki, Mariah Wilkins, Cabu, John Taylor, Petula Clark avec Sapho, Christian Morin, Tchavolo Schmitt et Fabienne Thibeault, Le commissaire Mégret, Lauréats 2014 et remettants  © Philippe Marchin

 

Billie Holiday sur écrans, Stéphane Kerecki & John Taylor © Pierre de Chocqueuse

 

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16 janvier 2015 5 16 /01 /janvier /2015 09:37
Rire pour résister

Janvier : pas facile de reprendre la plume après que trois fanatiques prétendument religieux aient tué au nom d’Allah dix-sept personnes et blessé grièvement plusieurs autres. On croit rêver. En s’y prenant à Charlie Hebdo, deux de ces ayatollahs par la kalachnikov ont cru pouvoir bâillonner la liberté d’expression, le non-conformisme et le rire, baume et remède insupportable à des assassins qui veulent nous faire vivre dans la peur. Me viennent à l’esprit les propos que tient le vénérable Jorge dans “Le nom de la rose”, un roman qu’Umberto Ecco, son auteur, situe en 1327 : « La loi s’impose à travers la peur dont le vrai nom est crainte de Dieu. Or le rire peut anéantir la peur ». Les fanatiques ont changé de camp, mais le rire continue bel et bien à faire peur.

 

Je n’étais point un lecteur de Charlie Hebdo, journal qui se gaussait des religions non sans blesser certains croyants respectables, mais j’ai souvent ri des femmes à poil de Wolinski, des aventures du Grand Duduche de Cabu, tous deux tombés sous des balles assassines. Comme bien d’autres de ma génération, j’ai découvert les dessins de Cabu dans Pilote. Grand amateur de jazz, il aimait Count Basie, Duke Ellington, Cab Calloway, la fille du proviseur qu’il rêvait en Julie London et les croqua souvent. Cabu appréciait les remises de prix de l’Académie du Jazz. Sa présence manquera à cette incontournable institution qui lui rendra bien sûr hommage. Deux de ses amis, Christian Bonnet, le trésorier de l’Académie, et Claude Carrière qui en fut le président, l’entourent sur cette photo. Travaillant avec eux, il prêta ses crayons à de nombreuses pochettes de disques, à celles de la collection Cabu Jazz Masters, mais aussi à une “Petite histoire du swing de Louis Armstrong à Miles Davis” et un “Cab Calloway d’anthologie aux éditions BDJAZZ.

 

Le rire n’a pourtant jamais fait florès dans les revues de jazz. Son “Débloc-Notes” censuré par la rédaction de Jazz Hot en septembre 1966, Siné tint, non sans critiques et pendant trois ans, le courrier des lecteurs de Jazz Magazine. À la tête de Jazz Hot, Philippe Adler fut éreinté pour ses Hot News, son « engin d’Hermeto » dérangeant les jazzeux puristes et pudibonds. Le rire, principale arme contre la peur, la tristesse, l’ego qui dupe et illusionne. Puisse-t-il panser nos plaies, se faire davantage entendre en ces jours pleins de larmes.

 

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

Ce blog ayant sommeillé jusqu’au 15 janvier, seule la seconde quinzaine de janvier est ici prise en compte. Depuis cinq ans, le Duc des Lombards présente la fine fleur du jazz made in France. Portant le nom de French Quarter, ce festival se déroule sur tout le mois. Vous n’avez pas eu besoin de moi pour applaudir Dominique Fillon, Pierre de Bethmann, Xavier Desandre Navarre, Laurent Coulondre et bien d’autres encore.

Rire pour résister

-Le 16, ne manquez pas le piano constamment inventif de Jean Michel Pilc au Duc des Lombards dans des concerts en solo (20h et 22h), concerts donnés à l’occasion de la sortie prochaine d’un nouvel album en solo sur Sunnyside Records. Son titre : “What is this Thing Called ?”. Toujours au Duc, Jérôme Regard (contrebasse) et Daniel Humair (batterie) seront ses complices au sein d’un trio interactif et excitant le 17.

-Les mêmes soirs (16 et 17 janvier), Eric Le Lann se produit au Sunside avec un quartette qui interpelle : Paul Lay (piano), Sylvain Romano (contrebasse) et Donald Kontomanou (batterie) pour accompagner une trompette sensible et chantante.

Rire pour résister

-Vrai talent à découvrir au Duc des Lombards le 21, le pianiste Florian Pellissier aime le bop et la scène qu’il partage avec les musiciens de son quintette, les laissant abondamment s’exprimer. Avec lui, Yoann Loustalot à la trompette, Christophe Panzani au saxophone et, pour assurer la rythmique, Yoni Zelnik à la contrebasse et David Georgelet à la batterie.

Rire pour résister

-Chanteuse à la technique vocale éprouvée – il faut l’entendre faire danser les onomatopées qu’elle invente –, Anne Ducros s’installe au Sunside le 23 et le 24 pour improviser sur des standards, reprendre un vaste répertoire, de celui de Marilyn Monroe à celui d’Ella Fitzgerald, “From Marilyn to Ella”, titre de son dernier album qui date déjà de 2013 et dans lequel on retrouve Benoit De Mesmay au piano, Gilles Nicolas à la contrebasse et Bruno Castellucci à la batterie. Christophe Laborde complétera la formation au saxophone.

Rire pour résister

-Installé à Paris depuis 2005, révélation 2011 du festival Jazz à Juan, Alex Stuart invite le trompettiste Nicolas Folmer au Sunset le 24. Avec eux pour jouer un jazz perméable à de nombreuses influences, Irving Acao au saxophone ténor, Chris Jennings à la contrebasse et Antoine Banville à la batterie. Dans “Place to Be”, l’album le plus récent du guitariste australien, jazz moderne, rythmes africains et latins, influences indiennes et balkaniques se mélangent sans frontières.

Rire pour résister

-Après un grand concert à l’Européen en mai, Do Montebello s’invite au Sunside le 25 pour chanter une musique très brésilienne qui empreinte aussi au jazz et aux musiques du monde. Grande voyageuse – Albi, l'Algérie, puis la France, les Caraïbes, les Etats-Unis, le Brésil –, Do passe facilement d’une langue à une autre, tient sous le charme de sa voix un public que séduit le message écologique de ses chansons. Dans “Adamah”, son premier disque publié l’an dernier, elle chante les arbres, le vent, la pluie, les océans, les déracinés d’une terre malmenée. Thierry Moncheny (guitare), Ricardo Feijão (baixolão), Christophe de Oliveira (batterie) et un poète du piano, Patrick Favre, l’entourent idéalement.

Rire pour résister

-Laurent de Wilde au Sunside le 31 avec Jérôme Regard à la contrebasse et Donald Kontomanou à la batterie, un concert à ne pas manquer. Le pianiste aime dialoguer avec des machines couvertes de boutons et de potentiomètres, une navette spatiale dont il sonorise la cabine avec des notes étranges venus d’ailleurs. Je le préfère toutefois dans un contexte acoustique, car au piano Laurent connaît les bons remèdes contre le stress, l’adversité, la déprime. Il peut vous conseiller le bon médicament. On attend impatiemment une suite à “Over the Clouds” enregistré en 2012. Mais il prend son temps, écrit un livre sur les inventeurs de claviers au XXème siècle (parution attendue chez Fayard en 2015) préfère peaufiner ses disques pour les rendre plus beaux.

-Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Sunset-Sunside : www.sunset-sunside.com

Crédits photos : Cabu, Christian Bonnet et Claude Carrière © Philippe Marchin – Jean-Michel Pilc © Mathieu Zazzo – Anne Ducros © Sylvain Thirion – Do Montebello © Catherine Cabrol – Florian Pellissier Quintet, Alex Stuart, Laurent De Wilde © Photos X/D.R.

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1 janvier 2015 4 01 /01 /janvier /2015 00:11
Meilleurs vœux

Bonne et heureuse année 2015

Felice anno nuovo

Happy New Year

Feliz año nuevo

Frohes neues Jahr

Feliz ano novo

 

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24 décembre 2014 3 24 /12 /décembre /2014 10:45
Must Be Santa

Les fêtes, un temps de repos après une année bien remplie. Le blog de Choc va bientôt sommeiller jusqu'à la mi-janvier. Rendez-vous en 2015 avec l’édito du mois, les concerts qui interpellent, et le très attendu compte rendu de la traditionnelle remise des prix de l’Académie du Jazz. Le palmarès en sera dévoilé le 19 au Théâtre du Châtelet.

                          

                        Merry Christmas

             Joyeux Noël à tous et à toutes

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19 décembre 2014 5 19 /12 /décembre /2014 11:57
Disques : 13 Chocs pour les fêtes

2014 a-t-elle été une bonne année pour le jazz ? L’avenir le dira. Au sein d’une pléthore de nouveautés, de rééditions, quelques enregistrements sortent du lot. Mes goûts ne sont pas toujours ceux de mes collègues journalistes. Normal. Chacun réagit selon sa sensibilité, son expérience, sa culture. Depuis qu’existe ce blog, j’ai toujours privilégié les chroniques positives, évité de m’étendre sur des enregistrements que je ne n’apprécie pas. Si je préfère applaudir qu’éreinter, il m’est toutefois difficile de parler de tous les bons disques que je reçois. Il me vient quelques regrets au moment de décerner ces Chocs. Le manque de temps ne m’a pas encore permis de vous livrer certaines chroniques. Je pense à l’album “Autour de Nina” (Nina Simone), une réussite qui réunit dix chanteurs et chanteuses, à “Tiddy Boom” du saxophoniste Michael Blake. Il m’a fallu choisir et comme les années précédentes, quelques musiciens célèbres côtoient des inconnus qui sont tout aussi bons. Peu médiatisés, vous ne les verrez pas dans les grands festivals. Le blog de Choc se doit de les faire connaître à un public trop peu formé à la musique. Puissiez-vous avoir la curiosité de les écouter. Bonnes fêtes à tous et à toutes.

 

Onze nouveautés…

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Ambrose AKINMUSIRE : “The Imagined Savior Is Far Easier to Paint” (Blue Note / Universal).

Chronique dans le blog de Choc le 28 avril.

Plus abouti que les deux disques précédents du trompettiste, “The Imagined Savior Is Far Easier to Paint” (78 minutes de musique) témoigne du renouveau du jazz afro-américain. Dans The Beauty of Dissolving Portraits qui fait appel à un quatuor à cordes, Ambrose Akinmusire souffle de longues notes tenues. Ces mêmes cordes habillent Our Basement, morceau que chante magnifiquement Becca Stevens sur un accompagnement de pizzicatos discrets. Dans Ceaseless Inexhaustible Child, la trompette offre un écrin velouté à la voix de Cold Speaks. Arrangé et chanté par Theo Bleckmann, Asiam (Joan) est aussi une réussite. Sans posséder le même pouvoir de séduction, les autres pièces, instrumentales, fascinent par leur complexité rythmique. Musicien exigeant, Akinmusire confirme ici de multiples talents.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Franck AMSALLEM : “Sings Vol.II” (Fram Music Productions).

Chronique dans le blog de Choc le 19 septembre.

Enregistré en trio avec Sylvain Romano à la contrebasse et Karl Jannuska à la batterie, “Sings Vol. II” est plus réussi que “Amsallem Sings”, disque dans lequel Franck Amsallem chante et s’accompagne au piano. Franck connaît bien ces mélodies, les admire, en conserve la mémoire. Il les porte en lui depuis longtemps et en donne des versions sincères dans lesquelles il met beaucoup de lui-même. Phrasant comme un instrumentiste, le chanteur - pianiste interprète avec naturel et émotion des standards célèbres et des mélodies un peu oubliées ajoutant Paris Remains in my Heart, une de ses compositions, à cet opus. Il s’ouvre sur une magnifique version de Never Will I Marry, une chanson de Frank Loesser, se referme sur Two For the Road, un thème d’Henry Mancini, et nous offre cinquante-sept minutes de bonheur.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Ran BLAKE : “Cocktails at Dusk” (Impulse ! / Universal).

Chronique dans le blog de Choc le 18 novembre.

Sous titré “A Noir Tribute to Chris Connor” et produit par Jean-Philippe Allard (Universal), “Cocktails at Dusk” rassemble quelques thèmes du répertoire de la chanteuse. Des morceaux de Cole Porter (I Get a Kick of You), Rodgers & Hart (Why Can’t I), Lerner & Loewe (Almost Like Being in Love) que Ran Blake harmonise avec des notes aussi parcimonieuses qu’inattendues, des dissonances, de sombres accords, le pianiste affectionnant les graves du clavier. Publié sur le prestigieux label Impulse! aujourd’hui réactivé, ce disque n’est qu’en partie enregistré en solo. Ricky Ford qui fut son élève dialogue avec lui à deux reprises au saxophone ténor. Présente dans quatre morceaux, Laika Fatien rend leurs mélodies surnaturelles. Elle n’a peut-être jamais été si convaincante. Blake qui excelle à accompagner des chanteuses la met en confiance, son noir piano accentuant la sensualité de sa voix.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Stefano BOLLANI : “Joy In Spite of Everything” (ECM / Universal).

Chronique dans le blog de Choc le 13 octobre.

Le titre qui donne son titre à l’album et Alobar e Kudra, pièce dans laquelle Stefano Bollani, plein de ressources, révèle une technique et une sensibilité impressionnante, sont enregistrés en trio avec Jesper Bodilsen (contrebasse) et Morten Lund (batterie), la meilleure rythmique danoise. L’instrumentation diffère dans les autres morceaux. Teddy est un duo piano / guitare. Confié à Bill Frisell, l’instrument est également présent dans Ismene, une plage en quartette. Las Hortensias, une ballade mélancolique, profite au saxophone de Mark Turner. Frisell et lui tiennent une place importante dans les trois longues plages en quintette de cette séance new-yorkaise : Easy Healing, un calypso d’une grande finesse mélodique ; Vale qui séduit par ses notes inquiétantes, sa lente progression harmonique, et No Pope No Party, un thème relevant du bop dans lequel, au ténor, Turner se montre très inspiré.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Kris BOWERS : “Heroes + Misfits” (Concord / Universal).

Chronique dans le blog de Choc le 17 mars.

Arrangé avec soin, cet album, le premier que Kris Bowers enregistre sous son nom, fourmille de bonnes idées, de mélodies attachantes. Avec une équipe réduite, le re-recording permettant de doubler les voix de Chris Turner, José James et Julia Easterlin, les saxophones de Casey Benjamin et Kenneth Whalum, le pianiste trempe sa musique dans la soul et le hip hop et parvient à créer une bande-son aux climats variés et inattendus. Portées par une section rythmique qu’assurent Burniss Earl Travis II à la basse électrique et Jamire Williams à la batterie, ses compositions à tiroirs superposent les mélodies, changent fréquemment de rythmes et d’orchestrations et provoquent la surprise. Piano acoustique, Fender Rhodes, synthétiseurs, la guitare électrique d’Adam Agati branchée sur des pédales d’effets offrent une large palette de couleurs à un disque que Bowers recommande d’écouter fort. Le choc en est d’autant plus grand.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-André CECCARELLI / Jean-Michel PILC / Thomas BRAMERIE : “Twenty” (Bonsaï Music / Harmonia Mundi).

Chronique dans Jazz Magazine / Jazzman n°659 - mars (Choc)

“Twenty” scelle les 20 ans d’amitié de trois musiciens complices qui prennent un malin plaisir à désosser des standards pour les remettre à neuf. Jouant un piano ouvert au sein duquel clusters et dissonances tendent la main à des notes, à des accords qui font rêver, Jean-Michel Pilc assure le leadership d’un trio interactif. André Ceccarelli et Thomas Bramerie bousculent et façonnent avec lui un flux sonore mobile et changeant, apportent une tension bienvenue à la musique qui repose sur de vraies mélodies. Bénéficiant de leur exubérance rythmique, Pilc s’amuse, plaque des accords, porte la musique à ébullition. Il peut aussi se montrer lyrique et tendre. En témoignent sa version très lente de Ne me quitte pas, sa belle reprise de L’Auvergnat et ses propres compositions, des ballades sensibles jouées avec émotion.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Sinne EEG : “Face the Music” (Stunt / UnaVoltaMusic).

Chronique dans le blog de Choc le 19 septembre.

Célèbre au Danemark, Sinne Eeg maîtrise le scat, possède une voix très juste et compose d’excellentes chansons. Enregistré sur trois jours à Copenhague, “Face the Music”, son septième album, est aussi réussi que “Don’t Be So Blue” chroniqué dans ce blog. Accompagnée par Jacob Christoffersen (piano), Morten Ramsbøl (contrebasse) et Moorten Lund (batterie), musiciens que rejoignent quelques invités, elle chante des standards et ses propres morceaux. Son rythme est parfait dans I Draw a Circle qui réserve un chorus de bugle. Crowded Heart, une ballade, bénéficie de son scat, de même que What a Little Moonlight Can Do qui ouvre l’album, la batterie seule rythmant sa voix. La contrebasse de Thomas Fonnesback est parfois seule à accompagner la chanteuse qui affectionne les morceaux de bravoure et ne craint pas prendre des risques.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Rodney KENDRICK : “The Colors of Rhythm” (Impulse ! / Universal).

Chronique dans le blog de Choc le 13 décembre.

Après un long silence discographique – quatre albums pour Verve entre 1994 et 1997 et quelques rares opus sous son nom –, Rodney Kendrick se rappelle à nous avec ce nouvel enregistrement en trio pour Impulse! Constitué pour moitié de standards, il fait entendre un piano orchestral aux couleurs riches et séduisantes, aux lignes de basse puissantes, Randy Weston et Thelonious Monk étant les principales influences d’un pianiste affectionnant ruptures et dissonances. La pièce maitresse du recueil est une version de Round Midnight qui ne ressemble à aucune autre. Celles d’Honeysuckle Rose, Body & Soul et Caravan sont tout aussi neuves et enthousiasmantes. Marquées par le blues, portées par une section rythmique superlative – Curtis Lundy à la contrebasse et Cindy Blackman à la batterie –, les compositions aux mélodies évidentes du pianiste sont tout aussi passionnantes. Un grand disque inattendu !

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Gilles NATUREL : “Contrapuntic Jazz Band “Act 2” (Space Time / Socadisc).

Chronique dans Jazz Magazine / Jazzman n°666 - octobre (Choc)

Second disque du Contrapuntic Jazz Band qu’anime Gilles Naturel, cet “Act 2” apparaît beaucoup plus fluide, varié et réussi que le premier, davantage inspiré par le jazz West Coast des années 50. Les morceaux qu’il contient offrent une plus large place aux solistes et aux improvisations collectives, le nouveau batteur, Donald Kontomanou, apportant une plus grande liberté rythmique à la musique. Hormis ce remplacement, la formation reste la même avec toutefois la présence du saxophoniste Lenny Popkins dans I Surender Dear. Excellent bassiste, Naturel séduit par l’intelligence de ses compositions et la finesse de ses arrangements. Entre le jazz et la musique contemporaine, Carême à Belleville enthousiasme par sa modernité. Quant aux standards, ils subissent un sérieux lifting, tant The Duke que The Very Thought of You, sans oublier une reprise de Jitterbug Waltz qui n’oublie pas de swinguer.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Greg REITAN : “Post no Bills” (Sunnyside / Naïve).

Chronique dans le blog de Choc le 21 novembre.

Quatrième album de Greg Reitan pour Sunnyside, “Post no Bills” est probablement son meilleur. Ne nous ayant encore jamais rendu visite, Reitan reste toutefois largement méconnu en France. Travaillant à Los Angeles pour le cinéma et la télévision, influencé par Bill Evans et Keith Jarrett (sa reprise de The Mourning of a Star), il est aussi un pianiste de jazz au toucher fin et délicat, un virtuose qui peut jouer beaucoup de notes, mais préfère les laisser respirer. Le même trio l’accompagne dans tous ses disques. Jack Daro à la contrebasse et Dean Koba à la batterie assurent la section rythmique qui convient à sa musique, du jazz moderne aux belles couleurs harmoniques qui témoigne d’une réelle esthétique. Quelques morceaux sont ici de sa plume mais il préfère reprendre des standards, en proposer des versions nouvelles et raffinées. Mélodiste, il aime faire chanter des notes exquises à son piano. Bien construites, ses improvisations sont des histoires que l’on suit avec beaucoup d’intérêt.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Marcin WASILEWSKI Trio w/Joakim MILDER : “Spark of Life” (ECM / Universal). Chronique dans Jazz Magazine / Jazzman n°668 – décembre / janvier (Choc)

Quatrième album ECM de Marcin Wasilewski qui invite Joakim Milder à rejoindre Slawomir Kurkiewicz à la contrebasse et Michal Miskiewicz à la batterie, musiciens qui l’entourent depuis 1993. Le nouveau venu, le pianiste l’a découvert sur “Litania”, un disque de Tomasz Stanko consacré à la musique de Krzysztof Komeda. Saxophoniste au son plein et large attaché à la ligne mélodique qu’il nuance, passant de la puissance à une sonorité douce et feutrée, il fait entendre son ténor dans cinq des onze plages de cet album, l’une d’entre-elles étant une nouvelle version de Sleep Safe and Warm, le thème du film “Rosemary’s Baby” composé par Komeda. Outre des originaux de Wasilewski, des mélodies très simples au service d’un jazz souvent modal et impressionniste, ce disque contient des reprises enivrantes de Message in the Bottle, le grand tube du groupe Police, et d’Actual Proof, composition d’Herbie Hancock que jouent les Head Hunters dans leur deuxième album.

… et deux inédits :

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Paul BLEY : “Play Blue” (ECM / Universal).

Chronique dans le blog de Choc le 22 avril.

Paul Bley, 82 ans cette année, se rappelle à nous dans un piano solo enregistré en 2008 à Oslo. Jouer en solo stimule son imagination. Ses doigts parfois le trahissent mais les imperfections de sa musique en font ressortir la poésie. Il aime inventer, improviser, frappe ses notes comme des tambours, les bouscule et les rythme. Le morceau s’intitule Far North et de cette répétition martelée surgit une délicieuse mélodie. Il abandonne le thème, y revient, pose des notes rêveuses et tendres, d’autres plus noires et agressives. L’orage ne dure jamais longtemps. Way Down South Suite en témoigne. Après cinq minutes et vingt secondes de dissonances et d’accords tumultueux le piano chante le blues avec force lyrisme. Pent-Up House de Sonny Rollins conclut le concert : Paul Bley le déconstruit, le réinvente. On se laisse emporter dans un tourbillon de notes qui font perdre la tête.

Disques : 13 Chocs pour les fêtes

-Denny ZEITLIN : “Stairway to the Stars” (Sunnyside / Naïve).

Chronique dans le blog de Choc le 20 octobre.

La longue carrière de Denny Zeitlin est jalonnée de disques que tout amateur de jazz se doit de posséder. Enregistré en 2001 au Jazz Bakery, un club de Culver City, “Stairway to the Stars” s’ajoute à cette liste. Cette année-là, le pianiste, 63 ans, effectua une tournée sur la Côte Ouest des Etats-Unis avec Buster Williams à la contrebasse et Matt Wilson à la batterie. C’est donc en trio, que ce concert a été enregistré. Si Out of a Stroll, un blues en mineur, sa seule contribution au répertoire, balance diablement bien, Zeitlin préfère reprendre des standards, harmoniser à sa façon des vieux thèmes des années 30 (I’ll Take Romance, Spring Is Here) et 40 (You Don’t Know What Love Is, There Will Never Be Another You), se promener avec ses musiciens dans des thèmes qui les inspirent pour nous en livrer des versions élégantes et neuves qu’il sait rendre intemporelles.

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13 décembre 2014 6 13 /12 /décembre /2014 10:20
Rodney KENDRICK : “The Colors of Rhythm” (Impulse !/Universal)

Longtemps directeur musical et pianiste de la regrettée Abbey Lincoln, Rodney Kendrick enregistra quatre albums sous son nom entre 1994 et 1997, les saxophonistes Houston Person, Arthur Blythe et Dewey Redman lui donnant la réplique. Mais c’est surtout avec “We Don’t Die We Multiply”, enregistré en trio, que l’élève de Barry Harris dévoila pleinement la singularité de son piano influencé par Randy Weston et Thelonious Monk. Jean-Philippe Allard qui produisit le disque en 1997 pour Universal, fait aujourd’hui paraître “The Colors of Rhythm” sur le label Impulse! Également en trio, constitué pour moitié de standards, il fait entendre un piano orchestral aux couleurs riches et séduisantes, aux lignes de basse puissantes. La pièce maitresse de ce recueil est une version onirique et élégante de Round Midnight. Héritant d’un tempo lent, Caravan apparaît tout aussi neuf. Cultivant les dissonances, les décalages, Rodney Kendrick en masque longuement le thème. Ses reprises d’un Honeysuckle Rose joué à la Monk, d’un Body & Soul très blues et très bleu, fourmillent aussi de dissonances. Les lignes mélodiques et rythmiques que joue Curtis Lundy à la contrebasse conviennent idéalement au piano. A la batterie, Cindy Blackman rythme les morceaux avec souplesse et dynamique, grosse caisse, toms et cymbales leur donnant une réelle épaisseur, surtout dans Aminata écrit par Kendrick. Ancrées dans le blues – Remembering en est profondément marqué –, ses compositions enthousiasment par leurs mélodies évidentes, leurs métriques ternaires et régulières apportant une cohérence aux nombreuses ruptures qu’affectionne le pianiste.

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9 décembre 2014 2 09 /12 /décembre /2014 10:31
Téléthon Jazz

Créé par BNP Paribas, partenaire historique du Téléthon qui chaque année s’investit, mobilise ses salariés et ses compétences (plus de 3000 collaborateurs bénévoles), le 3ème Téléthon du Jazz vous convie à une grande soirée swing au cœur du quartier latin. Quatre heures de musique et de danse au profit de l'AFM-Téléthon qui bénéficiera de l'intégralité de la recette.

Téléthon Jazz

En première partie de soirée, un grand bal swing fera chavirer le cœur des parisiens. L'Esprit Jazz Big Band - treize musiciens, un chanteur (Marc Thomas) et un saxophoniste invité (Stéphane Guillaume) -, vous plongera au cœur des années swing, celles de l’âge d’or des plus fameux orchestres de jazz, ceux de Count Basie, Duke Ellington, Fletcher Henderson, Jimmie Lunceford et Glenn Miller.

Avec Jean-Pierre Solvès (direction, saxophone), Marc Thomas (chant) Joël Chausse, Yves Le Carboulec, Alexis Bourguignon (trompettes), Jean-Christophe Vilain, Jean-Louis Damant, Denis Leloup (trombones), Alain Hatot, François Chambert, Xavier Quérou (saxophones), Claude Terranova (piano), Marc-Michel Le Bévillon (contrebasse), Julie Saury (batterie) + Stéphane Guillaume (saxophones).

Cette grande formation accompagnera les danseurs dans un cadre exceptionnel : la salle des fêtes de la Mairie du 5ème, place du Panthéon.

Spécialiste du vinyle et créateur du collectif Jazz Attitudes, acteur incontournable des scènes jazz dancefloor, DJ Psycut prolongera aux platines la soirée avec son fameux mix "Jazz Dance".

De 20 heures à minuit et demi, Mairie du 5ème, 21 place du Panthéon Paris 5ème - RER B Luxembourg.

Tarifs : Prévente 8€ - Le soir même 10€.

Réservations : www.telethondujazz.com

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