Avril: Content Jean-Paul !
Frédéric Goaty le cite dans son dernier édito de Jazz Magazine / Jazzman. Trouver le “Tokyo Live“ de Tony Williams
dans une boîte à chaussure à Albertville n’est pas donné à tout le monde. Content, mais son regard traduit une certaine inquiétude. Un rien rend Jean-Paul
paranoïaque. Le blogdechoc est lu par de très nombreux amateurs de jazz et il craint d’être repéré par ces mystérieux « marchands japonais » qui, prétend-il, « surveillent ses
déplacements ». Il m’apprend qu’il n’a pas encore mis la main sur cette fameuse Queen Suite ellingtonienne tant recherchée. Pour ajouter de l’angoisse à sa peur, j’exhibe une
photo du disque en question, photo prise à Londres en 2008 par Claude Carrière lors d’une conférence de la Duke Ellington Music Society. Les
deux demoiselles le tiennent comme le Saint Graal. Il appartiendrait à un certain Steve Lasker, célèbre collectionneur de disques
d’Ellington. Se pourrait-il que cette même personne mette en vente son exemplaire ? Sans rien me dire, Jean-Paul m’a quitté précipitamment. Je l’ai revu huit jours plus tard. Dans un
café du Quartier Latin dont il m’avait indiqué l’adresse en compagnie de Bernard plus caustique que jamais. Mes questions sur la Queen Suite restant sans réponses, la conversation
porta sur Fip. Amateur de swing, de bop et de hard bop, Jean-Paul a beaucoup apprécié le Jazz à Fip du 20 mars dernier présenté par un certain Philippe Machin Chose, « du jazz, mais du vrai
avec des morceaux de Phineas Newborn, Bill Evans, Horace Silver, un
duo superbe entre Sarah Vaughan et Joe Williams et même un titre de
Jack Sheldon publié en 1980 sur le label californien Beez Records et jamais réédité en
CD ». « Mais leur disque de la semaine, du reggae, une merde inaudible » ajouta-il furibard. Jean-Paul fait partie des nombreux amateurs de jazz qui n’écoutent plus TSF
« déçus par une programmation au sein de laquelle toute une partie de l’histoire du jazz et la plus créative est scandaleusement délaissée ». Je vous confie que du haut de ses presque
deux mètres, Jean-Paul méprise beaucoup le jazz moderne. Je l’ai connu, il y a quelques années. Au New Morning. Il est venu à mon secours lorsqu’un saxophoniste mécontent de mes remarques sur ses
hurlements incongrus s’apprêtait à me fracasser le crâne de son instrument. Parler aux musiciens de leur musique n’est pas sans risques, leur ego surdimensionné leur faisant parfois perdre la
tête. « Bientôt (ajoute Bernard), ils seront tous au chômage. Les nouveaux robots sur lesquels je travaille poursuivront l’œuvre de Charlie Parker, Dizzy Gillespie, Charles Mingus, les plus grands noms du
jazz. Correctement programmé, l’ordinateur pourra non seulement composer de nouveaux morceaux, mais les jouer exactement comme si ces jazzmen étaient bien vivants et qu’ils interprétaient
eux-mêmes ces nouvelles partitions qu’ils auraient pu inventer. Plus besoin de musiciens, mais des machines, des machines intelligentes ». Trop fou pour moi, Bernard m’est peu sympathique.
Quant à Jean-Paul, il écoute Jazz à Fip tous les soirs, à la recherche de Philippe Machin Chose, le programmateur présentement sans visage qui ose ressusciter un jazz authentique le touchant
jusqu’à la moelle.
QUELQUES CONCERTS EN AVRIL
-On a récemment entendu le
saxophoniste Miguel Zenon en grande forme au New Morning au sein du SF Jazz Collective qu’il anime excellemment. Il sera au Sunside le 2
et le 3 avec un nouveau quartette à l’instrumentation originale, Laurent Coq au piano, Dana Leong au violoncelle et Dan Weiss aux percussions se joignant à l’alto de Zenon. Co-écrit par ce dernier et
Laurent Coq, leur répertoire également inédit s’inspire de “Marelle“ (Rayuella) le célèbre roman à tiroirs de Julio
Cortazar. J’en profite pour vous annoncer la réédition prochaine chez Frémeaux & Associés d’“Octaèdre“, premier disque du label AxOlotl enregistré
en solo par le pianiste François Tusques en 1994. Cet autre hommage rendu à l’écrivain argentin était depuis longtemps
introuvable.
-Jeremy Pelt retrouve le Duc des Lombards le 6 et le 7. On peut écouter sa généreuse
trompette dans le nouveau disque live de Baptiste Trotignon. Musicien émérite, Pelt s’est produit l’an dernier au Duc au sein
de Violet Hours, le sextette du batteur Gerald Cleaver. Ce dernier est aussi
le batteur du trompettiste qui publie sur HighNote un enregistrement en quintette “Men of Honor“, avec J.D. Allen au ténor,
Danny Grissett au piano, Dwayne Burno à la contrebasse et Cleaver à la batterie. Le
pianiste Xavier Davis remplace Grissett pour ces concerts que l’on aurait tort de bouder.
-L’incroyable succès que rencontre
son dernier disque conduit Melody Gardot à refaire trois Olympia les 7, 8 et 9 avril prochains. Produit par le contrebassiste
Larry Klein (ex-mari de Joni Mitchell) et superbement arrangé par
Vince Mendoza, “My One and Only Thrill“ est une réussite, mais la chanteuse séduit également sur scène par
sa présence et son naturel. Elle possède une voix et écrit de bonnes chansons. Que demander de plus ?
-Carte blanche à Patrice Caratini au Sunside. Le 9, le contrebassiste invite un
complice, le guitariste Marc Fosset, et le pianiste Manuel Rocheman, mais
associe aussi les saxophones de Rémi Sciuto et la voix d’Hildegarde Wanzlawe à ses “Shorts Songs“, répertoire diversifié de chansons, comptines, airs de comédies musicales qui font toujours rêver. Le 10, il nous propose une version en quintette de
son “Latinidad“ , album consacré aux musiques des Caraïbes et qui s’achève sur des versions colorées de Manteca et Petite Fleur. Les
percussions de Sebastian Quezada et d’Inor Sotolongo rejoignent ainsi saxophone, piano et contrebasse pour apporter
l’élan rythmique que nécessite une telle musique.
- Le 9 également,
Claude Carrière, grand spécialiste de la musique du Duke mais aussi pianiste distingué, nous attend à 20h00 au cœur du Marais au Framboisy, 16
rue Charlemagne 75004 Paris. Avec l’excellent Frédéric Loiseau à la guitare et Marie Christine Dacqui
à la contrebasse, Claude y accompagne la chanteuse Rebecca Cavanaugh dans un répertoire de chansons
d’Ellington, Tom Jobim, Bob Dorough. Cuisine authentique et vins de
producteurs indépendants à des prix raisonnables pour combler les papilles gustatives des auditeurs qui le souhaitent. Réservation recommandée au 01 42 72 14 16.
-Excellent pianiste,
Aaron Parks multiplie depuis quelques mois les concerts à Paris. La formule du trio convient bien à ce musicien prometteur qui possède déjà une
grande maîtrise de son instrument. Le 11 au Sunside, Matt Brewer à la contrebasse et Ted Poor
à la batterie lui donneront des ailes pour un vol jazzistique que l’on souhaite vertigineux.
-Un Roger Guérin Benefit
Concert le 12 au New Morning. Martial Solal, Eric Le Lann,
Jean-Louis Chautemps, Alain Jean-Marie, Patrick
Artero, Philippe Soirat, Médéric Collignon, Jean-Loup Longnon, Nelson Veras,
Laurent de Wilde, Guillaume Naturel, Luigi Trussardi
et Alex Tassel et beaucoup d’autres ont répondu présents pour assurer la
musique.
-Plein de concerts intéressants le 13
avril. Le gros morceau c’est l’Olympia d’Ahmad Jamal produit par le Duc des Lombards. Le pianiste s’y produit avec son quartette
habituel - James Cammack à la contrebasse, Kenny Washington à la batterie
et Manolo Badrena percussions - , la pianiste japonaise Hiromi assurant la
première partie du concert en solo.
- Le même soir, les très nombreux
admirateurs d’Elise Caron viendront l’entendre chanter le poète Dylan Thomas au Studio de l’Ermitage (8, rue de l’Ermitage 75020
Paris). Avec elle aux claviers Lucas Gillet, l’auteur des musiques de l’album, “A Thin Sea of Flesh“ (Le Chant du Monde), mais aussi
d’autres instruments guitare, basse, batterie et percussions, pour colorer et rythmer les compositions, et porter haut la voix d’Elise qui enchante.
- Toujours le 13, mais également le 14, à l’occasion de la sortie de “Air Hadouk“
(Naïve), le Hadouk Trio se produit au Cabaret Sauvage, du parc de la Villette, un lieu un peu magique convenant parfaitement à la
musique du groupe. Mélange de jazz et de musiques du monde, l’Afrique et l’Orient y font entendre leurs rythmes, des sons aux couleurs de bois et de métal, une musique enivrante pleine d’épices
et d’arômes. Loy Ehrlich, Didier Malherbe et Steve
Shehan jouent de très nombreux instruments, mais surtout Malherbe souffle des notes exquises dans son doudouk,
hautbois arménien en bois d’abricotier, et nous fait voir le ciel.
-Du 14 au 17 avril, Le
Moutin Reunion Quartet fête au Sunside la sortie de “Soul Dancers“, son cinquième album. Avec leurs propres notes, les frères Moutin - François
à la contrebasse et Louis à la batterie - y inventent une musique proche de celle que jouait Weather Report, groupe-phare des années 70
et référence absolue en matière de fusion. Pierre de Bethmann aux claviers et Rick Margitza au ténor ajoutent des couleurs très riches à des compositions ludiques et intelligemment orchestrées.
-Le 15,
Rendez-vous à la Maison du Duke, 7/9 rue Francis de Pressensé 75014 Paris pour suivre de nouvelles aventures ellingtoniennes en compagnie de Laurent Mignard et du Duke Orchestra. La femme, essentielle dans l’imaginaire de Duke
Ellington, est à l’honneur d’un programme qui lui est consacré. Sophisticated Lady, Blue Rose, The Star-Crossed Lovers (aka Pretty Girl),
Tigress, Girl Suite, les occasions ne manquent pas de la décrire et de la célébrer dans le corpus
ellingtonien. Invitées par Mignard, quatre d’entre-elles, China Moses, Laurence Allison, Sylvia
Howard et Stephy Haik, se joindront donc à son
orchestre pour la chanter. Répétition publique à 20h30 et concert commenté par Claude Carrière à 22h00.
-Au Sunset le 16 et le 17, carte
blanche à Stéphane Guillaume. Prix Django Reinhardt 2009 de l’Académie du Jazz 2009, le saxophoniste convie son onztet à le rejoindre
sur scène le premier soir. “Windmills Chronicles“, le disque qu’ils ont fait ensemble, est si bon que l’Académie du Jazz lui a également décerné son prix du Disque Français. Mais c’est avec les
musiciens de son quartette – Frédéric Favarel à la guitare, Marc Buronfosse à
la contrebasse, Antoine Banville à la batterie - que Guillaume nous donne rendez-vous le 17 pour
écouter une musique dans laquelle l’improvisation occupe la première place.
-Christine Flowers
en trio au 9 Jazz-Club le 18 (à 18h00) avec Jobic Le Masson au piano et Peter
Giron à la contrebasse. On ne connaît pas encore cette chanteuse franco-américaine qui vit en France depuis longtemps et se produit souvent en club.
Avec eux et d’autres amis musiciens (Rick Margitza au saxophone, Jeff Boudreaux et John Betsch à la batterie), Christine vient d’enregistrer un superbe album consacré à Oscar
Brown, Jr., son idole, un chanteur cher à son cœur. Elle cherche un label et un distributeur. N’hésitez pas à vous mettre sur les rangs, son disque en
vaut la peine. Au besoin, contactez-moi, je transmettrai. Un second concert en quintette est prévu le 16 mai au Sunside. Notez la date dans vos agendas, on n’est jamais assez prudent.
- Le 18 encore, deux guitaristes très dissemblables se partagent la Salle Pleyel. Le plus jeune, Marc Ribot, tire
de son instrument des sons inimitables. Associé à de nombreux projets qui dépassent largement le cadre du jazz, mais surtout à Tom Waits auquel il apporte sa science du bruitage, il nous visite en trio avec Henry Grimes, l’un des grands noms de la
contrebasse, et Chad Taylor à la batterie. Agé de 79 ans, Jim Hall est quant
à lui, une légende du jazz. Son jeu de guitare reste minimaliste, mais la moindre de ses notes rêveuses et cristallines pèse tout son poids de justesse et de beauté. Scott Colley à la contrebasse et Joey Barron à la batterie ont mission d’accompagner son jeu fluide et énorme qui réserve
toujours des surprises.
- Toujours le même soir, et pour
fêter la sortie de “VOCAbuLarieS“, son nouveau disque, Bobby McFerrin retrouve le Théâtre du Châtelet pour un concert a cappella. Il
possède une voix unique dont la tessiture lui permet d’incroyables acrobaties vocales et utilise son corps comme tambour pour rythmer un scat qui ne doit rien à personne mais se fait l’écho de
traditions africaines ancestrales.
-Ceux qui ont manqué les concerts
que Jacky Terrasson et son nouveau trio (Ben Williams à la contrebasse
et Jamire Williams à la batterie) donnèrent en mars au Sunside peuvent encore découvrir le pianiste en showcase le 22 au
Studio SFR, 9 rue Tronchet 75008 Paris. 200 places seront distribuées sur place la veille, 21 avril, à partir de 11 heures.
-John Scofield au New Morning le 23. Le guitariste s’y produit en quartette avec le
pianiste Michael Eckroth et Ben Street à la contrebasse. A la batterie, il retrouve Bill Stewart qui joue dans plusieurs de ses disques (“En Route“, “Hand Jive“, “This Meets That“). C’est
toujours une joie que d’écouter ce grand styliste de la guitare tremper le jazz qu’il pratique dans les accords du blues au vocabulaire du jazz, célébrer la soul music et le
gospel.
-Jeune pianiste prometteur, Thomas Enhco occupe le Sunside avec son trio le 26 et le
27. “Someday My Prince Will Come“ (label AMES) sort en France après une première publication au Japon et mérite attention. Très marqué par l’héritage classique, son piano est encore académique et
appliqué, mais ses choix esthétiques sont proches des miens, ses reprises de standards bien construites témoignent d’une vraie sensibilité et d’un profond attachement aux belles mélodies. Avec
lui, Joachin Govin à la contrebasse et Nicolas Charlier à la batterie pour achever de vous convaincre.
-Baptiste Trotignon se produit lui
aussi au Sunside les 28 et 29 avril, mais aussi le 1 mai. Stéphane Belmondo à la trompette, David El Malek
aux saxophones, Thomas Bramerie à la contrebasse et Franck Agulhon
à la batterie donnent vie aux compositions du pianiste, dont plusieurs thèmes arrangés sous forme de suite constituent le plat de résistance de son nouveau
disque intitulé “Suite…“ comme il se doit. Ces concerts de Baptiste s’inscrivent dans le cadre des « Nuits naïve Jazz » auxquels participent Mina
Agossi, le Hadouk Trio, Julien Lourau et Alex Tassel.
-Ce même Alex Tassel
occupe le Sunset le 30 avril et le 1 mai. Il sort chez Naïve “Heads or Tails“, un double CD, le premier acoustique, le second électrique, certaines compositions étant reprises, recrées
différemment dans les deux disques. Le quintette acoustique joue le 30. Avec le trompettiste, Sylvain Beuf aux saxophones,
Laurent de Wilde au piano, Diego Imbert à la contrebasse et Julien
Charlet à la batterie. La même musique change d’aspect et plonge dans un univers électrique le 1. Laurent de Wilde se met au Fender Rhodes et la basse devient électrique avec Daniel Romeo. Le saxophoniste
Guillaume Naturel remplace Beuf, Julien Charlet officiant les deux soirs.
-Jean Michel Pilc en trio au Duc des Lombards le 30 avril et le 1 mai avec le contrebassiste Boris Kozlov à la contrebasse
et Billy Hart à
la batterie qui l’accompagnent dans “True Story“ (Dreyfus Jazz), son dernier disque déconcertant. Car le pianiste reste nettement meilleur et surprenant en concert, la scène restant pour lui
espace d’invention, d’imagination, de spontanéité, ce que permettent moins les contraintes de studio.
Sunset - Sunside : http://www.sunset-sunside.com
Duc des Lombards :
http://www.ducdeslombards.com
Olympia : http://www.olympiahall.com
New Morning : http://www.newmorning.com
Studio de l’Ermitage :
http://www.studio-ermitage.com
Cabaret Sauvage : http://www.cabaretsauvage.com/
La Maison
du Duke : http://www.maisonduduke.com
Le 9 Jazz Club : http://www.le9jazz.com
Salle Pleyel : http://www.sallepleyel.fr/
Théâtre du
Châtelet : http://www.chatelet-theatre.com
Studio SFR : http://www.lestudiosfr.fr
CREDITS PHOTOS: Robot parkérien, Miguel Zenon, Jeremy Pelt, Martial Solal, Elise
Caron, Hadouk Trio, François & Louis Moutin, Laurent Mignard, Stéphane Guillaume, Jacky
Terrasson, John Scofield, Alex Tassel / Laurent de Wilde / Diego Imbert © Pierre de Chocqueuse - The
Queen Suite Girls © Claude Carrière - Patrice Caratini © Didier Gaillard - Marc Ribot © Marco Zanoni - Bobby McFerrin © Carol Friedman -
Thomas Enhco Trio © Philippe Levy-Stab.