6 octobre 2008
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Ce
batteur-là ne joue pas comme les autres. Son drive, sa ponctuation n’appartiennent qu’à lui. Le temps nous a révélé un compositeur habile qui place la respiration au cœur de sa musique.
Car Paul Motian suggère souvent les rythmes au lieu de les marquer, pratique l’ellipse, la musique circulant alors plus librement, non balisée, comme libérée de ses barres de
mesure. En 2007, le label Winter & Winter nous régala d’un “Live at the Village Vanguard, Vol.I“, enregistrement réunissant son trio 2000 (Chris Potter au saxophone ténor,
Larry Grenadier à la contrebasse) augmenté de deux musiciens pas manchots, Greg Osby à l’alto et Masabumi Kikuchi au piano. Impressionnant dans
If You Could See Me Now, un standard de Tadd Dameron introduit longuement en solo, monkien en diable dans Last Call, ce dernier occupe une place centrale dans
le dispositif orchestral. Récemment paru, “Live at the Village Vanguard Vol. II“ nous offre sept autres morceaux, davantage que dans le premier volume, et permet de suivre le groupe sur scène,
pendant ces trois mêmes soirées de décembre 2006. Des compositions de Motian, une
courte reprise de If You Could See Me Now et Till We Meet Again, une chanson sentimentale de 1918 en constituent le programme. Le pianiste étonne encore par la variété de ses
clusters, ses notes et accords dissonants. Quant aux deux souffleurs, s’ils se retrouvent pour exposer à l’unisson les thèmes anguleux du batteur, ils croisent le cuivre, questionnent,
se soufflent mutuellement des réponses. La section rythmique, distendue et souple, accorde beaucoup d’espace à leurs longues improvisations qui racontent toujours quelque chose. Sur deux titres,
le violoniste Mat Manieri rejoint les cinq musiciens. Partant des thèmes, d'un vocabulaire harmonique très structuré, tous creusent la matière sonore et prennent des risques
particulièrement inventifs.
Meilleurs morceaux: Till we Meet Again, Sunflower, The
Divider.
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Chroniques de disques
3 octobre 2008
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D'emblée, Matt Turner utilise son violoncelle comme une
contrebasse. Ses doigts en pincent les cordes, les tirent, les font vibrer. La caisse de l’instrument amplifie des accords de blues. Peg Carrothers en dévoile la mélodie dans la
pièce suivante, My Old Kentucky Home, une reprise du premier morceau, un thème qui occupe cinq plages de l’album, toutes différentes. Un piano (Bill Carrothers), une
voix et un violoncelle nous donnent du vague à l’âme, la nostalgie de vieilles chansons associées à l’histoire de la grande Amérique, des mélodies qui, aujourd’hui encore, parviennent jusqu’à
nous. Coproducteur de cet album, à commander de toute urgence sur http://www.illusionsmusic.fr/ , Philippe
Ghielmetti a découvert My Old Kentucky Home dans un film de John Ford, “The Sun Shines Bright“ (“Le Soleil brille pour tout le monde“). Son auteur,
Stephen Foster (1826-1864) est un des pères de la musique américaine. Ses compositions se retrouvent dans tous les genres musicaux dont ce pays donna naissance, le folk, la
country music, le rock, le jazz et même chez Charles Ives, dont l’œuvre, parsemée de singularités harmoniques et rythmiques, résonne d’échos de musiques populaires. Comme
Matt Turner l’explique dans ses notes de pochette, les « amples sauts harmoniques » de Foster favorisent l’improvisation. Si la voix respecte fidèlement l’aspect mélodique des
partitions, ces dernières inspirent au violoncelle et au piano des accords, des harmonies très personnelles. Matt et Bill jouent parfois les thèmes avec dévotion (My Old Kentucky Home,
plage 10), mais offrent aussi de nouveaux habits à ces morceaux. Relectures rythmiques (Oh ! Susanna, Hard Times Come Again No More) et dissonances orchestrées (l’introduction de Beautiful Dreamer, Camptown
Races) font ici bon ménage, la voix et les deux instruments parvenant à créer un climat, une féerie sonore grandiose et inquiétante - Jeanie with the Light Brown Hair. S’il vivait
encore, Stephen Foster serait probablement surpris par certaines versions très libres que le trio donne de ses œuvres. Il reconnaîtrait ses chansons, mais comme nous serait bien
en peine d’en définir les magnifiques musiques.
Meilleurs morceaux : Ils le sont
tous.
Photo: ©Emmanuelle Prétot
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Chroniques de disques
2 octobre 2008
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Par le seul canal du téléchargement - http://www.sansbruit.fr - le jeune label Sans Bruit nous offre de magnifiques rencontres. Quatre albums sont actuellement disponibles. “Bleu sur
Scène, july 2006“ réunissant Marc Ducret et Benoît Delbecq et “Pandore“ de Stéphan Oliva / Jean-Marc Foltz, méritent une
attention particulière. Alex Dutilh a dit tout le bien qu’il pensait du premier dans le numéro de juillet/août de Jazzman : « Bribes de propositions thématiques, climats
mouvants, clins d’œil rythmiques…on les sent complices, ayant sérieusement “pensé“ le déroulement de leur affaire, et totalement investi dans l’écoute réciproque. » écrit-il. Musique savamment
construite tout en étant largement improvisée, celle qu’invente Oliva et Foltz déborde largement le cadre du jazz. Ceux qui le souhaitent pourront lire une chronique de ce disque dans le Jazzman
de novembre et patienteront en téléchargeant l’album, en format MP3 pour 6 euros, ou pour 2 euros de plus en FLAC et disposer d’une meilleure qualité sonore. Un nouveau disque de Bruno
Angelini en trio (avec Joe Fonda et Ramon Lopez), “New York City Sessions“, sera téléchargeable courant
novembre.
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Jazz News
1 octobre 2008
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Octobre: l’automne fait pleuvoir les feuilles de ses arbres, mais aussi de tardives manifestations jazzistiques : Jazz en Tête à Clermont-Ferrand, le Savoie D’jazz
Festival à Chambéry, l’incontournable Jazz Pulsations à Nancy. A Paris, le JVC Jazz Festival propose une affiche alléchante avec Herbie Hancock, les trio de Jean-Philippe
Viret, d’Enrico Pieranunzi (en photo), de Marc Copland et de Bill Carrothers, les quartettes d’Olivier Hutman et de
Miguel Zenon (en photo), Patricia
Barber, le quintette d’Eric Harland... Programme complet et détaillé sur http://www.looproductions.com/jvc/2008/
Bee Jazz fête ses cinq ans d’existence aux Sunset/Sunside avec une pluie de concerts, de groupes à
découvrir. Le Baby Boom Quintet de Daniel Humair (en photo), les formations de Christophe Wallemme, Jérôme Sabbagh et
Guillaume de Chassy méritent une écoute attentive. Hors festivals et célébrations, on ne manquera pas le pianiste Ronnie Lynn Petterson au New Morning le 21
octobre, le surdoué Jamie Cullum au Théâtre du Châtelet le 27, et l’immense Roy Haynes (82 ans) au Duc des Lombards les 25 et 26. Puissent ses tambours écarter
les frimas de l’hiver.
Photos © Pierre de Chocqueuse
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Edito tout beau
29 septembre 2008
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De beaux accords exposés par un piano électrique inventif, des harmoniques superbes jouées par une contrebasse qui ébauche les pas
d’une danse légère et gracieuse : les premières mesures de ce disque diffusent d’emblée une lumière estivale. Découvert auprès du batteur Dré Pallemaerts – il joue dans le “Pan
Harmonie“ de ce dernier – Jozef Dumoulin lui offre une large palette de couleurs, tant au piano acoustique (Portrait of Cendrine, les trois derniers morceaux le mettant
particulièrement en valeur) qu’électrique, son Fender Rhodes sonnant comme nul autre pareil. Les musiciens invités, Julien Lourau et Manu Codjia, apportent
également à la musique un éclairage spécifique. Le premier possède un son de ténor qui lui est propre ; le second trempe To Bee or not to Bee dans le grand fleuve du rock, mais donne une
autre sonorité à sa guitare dans Where is my Way, ballade aux longues notes oniriques. Emmanuel Codjia jouait déjà dans “Namaste“, le précédant album du contrebassiste,
un enregistrement de 2006 longtemps mûri, souvenirs d’une jeunesse passée en Inde et jamais oubliée. L’Orient et ses couleurs n’inspirent ici que Pharaon’s Dance, mais c’est toujours
Christophe Wallemme que l’on retrouve dans ces musiques fraîches comme de la rosée de petit matin. Le mélodiste sait agencer leurs rythmes, leur donne surtout un cœur pour battre
et faire rêver.
Meilleurs morceaux : Quartz, Portrait of Cendrine,
Where is my Way, Certainly Tomorrow.
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Chroniques de disques
27 septembre 2008
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Réédité peu avant l’été en catimini sur un label confidentiel, Universal son propriétaire légitime n’ayant pas jugé bon de le
faire, cet enregistrement de George Russell pour la première fois en CD, reste une des pièces discographiques majeures de son auteur. Il fait partie des quatre albums que le
compositeur grava pour Decca entre le 12 septembre 1958 et le 23 février 1961, date d’enregistrement de ce disque. Moins connu que "New York, N.Y." et "Jazz in the Spage Age", deux opus avec des
grands orchestres dans lesquels brille l’élite du jazz de l’époque, "In K.C." enregistré en studio à New York et non à Kansas City, se rapproche beaucoup du précédant, "At the Five Spots",
également un disque en studio comme son nom ne l’indique pas. La formation, un sextette, est sensiblement la même. Don Ellis remplace Al Kiger à la trompette,
mais on retrouve Dave Baker au trombone, Dave Young au saxophone ténor, Chuck Israels à la contrebasse et Joe Hunt à la
batterie, Russell jouant lui-même du piano. Maîtrisant parfaitement son langage, l’auteur de “The Lydian Chromatic Concept of Tonal Organisation for Improvisation“, source des recherches modales
de Bill Evans, Miles Davis et John Coltrane traverse alors sa plus riche période créative. Il fait partie de cette avant-garde qui, loin du
free-jazz et son refus de tout ordre esthétique, cherche à explorer l’harmonie vers plus de liberté. Organisateur de sons, (« Une liberté sans logique amène le chaos » déclare-t-il à cette
époque), s’appuyant sur le vocabulaire du bop dont il connaît toutes les arcanes, il propose un langage dans lesquelles les ambiguïtés harmoniques deviennent claires et fluides au sein même
d’improvisations foisonnantes. Savants désordres aux audaces étonnamment modernes, le programme de ce disque repose sur des thèmes aux constructions rigoureuses. Russell en emprunte un, le plus
beau de l’album, à Carla Bley. Les deux ingénieuses compositions de Dave Baker, Sandu de Clifford Brown et Tune Up
d’Eddie « Cleanhead » Vinson ne relèvent pas de la même écriture, mais Russell les transforme, leur donne des couleurs nouvelles et éclatantes.
Meilleurs morceaux : War Gewessen, Rhymes,
Theme.
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La Réédition du mois
26 septembre 2008
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Certains d’entre-vous ont lu ce texte, abrité 24 heures sur le blog de Jazzman. Deux papiers sur le même
concert furent jugé excessifs. Celui de mon confrère et ami Lionel Eskenazi est donc toujours lisible sur http://www.Jazzman.fr/ Le mien trouve refuge ici, une place toute naturelle. Rendez-vous au Sunside le 9 décembre pour découvrir Mélanie
De Biasio, la chanteuse qui étonne.
Rêver, partir doucement avec des morceaux lents… Les concerts de
Melanie De Biasio nous plongent dans un autre espace temps, dans le swinging London des années 60, lorsque la musique s’inventait soir après soir à la Roundhouse, à
l’UFO, hauts lieux enfumés d’un underground branché. On y goûte les arabesques sonores d’une flûte aux notes colorées qui résonnent à perdre haleine, les malices d’un clavinet, livrant
avec gourmandise des sonorités électriques et planantes. Cette musique c’est aussi du jazz avec un pianiste aux accords evansiens, une belle et grosse contrebasse qui chante, avec surtout une
voix, grave, charismatique qui trouble et emporte. Le second set fut plus rythmé que le premier, un peu avare de morceaux rapides, mais lunaire et onirique. Avec Pascal Mohy au
piano, Pascal Paulus au clavinet, Axel Gilain à la contrebasse et Lieven Venken étonnant de douceur à la batterie, Mélanie fêtait mardi dernier
au Sunside la sortie française de son album « A Stomach is Burning » (Igloo/Abeille Musique). C’était la toute première fois qu’elle se produisait à Paris. On l’applaudit des deux
mains.
(Photo ©Pierre de
Chocqueuse)
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Vu et Entendu
25 septembre 2008
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Fumeur de cigares et musicien heureux,
Glenn Ferris présentait samedi dernier au Sunset de la rue des Lombards son Ferris Wheel (une Grande Roue en anglais), un nouveau trio à l’instrumentation originale : trombone
(le sien), voix, percussions (Ernie Odoom) et contrebasse (Bruno Rousselet).
Producteur de disques (un nouvel album du pianiste Donald Brown, « Fast Forward to the Past », sort à la mi-novembre sur Space Time
Records, son label), noctambule invétéré et également amateur de cigares, Xavier Felgeyrolles programme et anime à Clermont-Ferrand Jazz en Tête, manifestation clermontoise depuis longtemps incontournable. Ravi Coltrane,
Richard Galliano, Gonzalo Rubalcaba, Charlie Haden, Nicholas Payton, Miguel Zenon, Aldo
Romano, Monty Alexander sont quelques-uns des musiciens de la 21ème édition de ce festival qui se déroulera cette année du 21 au 25 octobre. Pour tous renseignements
: http://www.jazzentete.com/
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Vu et Entendu
24 septembre 2008
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Féru de musique contemporaine, parisien depuis bientôt vingt ans, le
pianiste américain Ronnie Lynn Patterson est un homme d’une rare discrétion. Auteur de « Mississipi », album paru en 2003 sur le label Night Bird Music, mais aussi d’un disque
consacré au compositeur Morton Feldman dont il admire les œuvres, Ronnie Lynn n’oublie qu’une chose, c’est de faire parler de lui. La parution récente d’un nouvel album aussi bon
qu’inattendu, et un concert au New Morning le 21 octobre prochain font ainsi figure d’évènements. « Freedom Fighters » confirme l’excellence d’un pianiste réservé qui loin de faire étalage d’un
trop plein de savoir-faire, de notes savantes pleines de poudre aux yeux, construit un discours poétique et exigeant qui lui est infiniment personnel. Il contient deux pièces de ou arrangées par
Keith Jarrett (l’un de ses principaux modèles), et la variation d’un thème de Rachmaninov, mais surtout des compositions originales rigoureuses et
diversifiées. Le pianiste possède un jeu aussi subtil que délicat et d’une grande richesse harmonique. Le suivre demande une écoute attentive et constante. La main gauche assure un parfait
contrepoint à la droite, souvent proche des lignes du blues, et donne à la musique un très grand équilibre rythmique. Ronnie Lynn Patterson n’est pas le seul à fasciner : Stéphane
Kerecki et Louis Moutin interpellent par leur pertinence. La contrebasse du premier trouv les notes justes pour répondre à celles, parfois abstraites, d’un piano fragile
qui prend son temps pour révéler sa profondeur, un piano qui suggère, entrouvre pudiquement la porte de ses rêves.
Meilleurs morceaux : Freedom Fighters Adagio, Camariñas, Santa Fe.
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Chroniques de disques
24 septembre 2008
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Que font donc Zool Fleischer et Pierre de Bethmann ? Leurs doigts se communiquent-ils "de mano a
mano" des secrets jazzistiques ? Tous deux en ont cinq à chaque main ce qui leur est fort utile pour jouer du piano. Zool enregistre rarement et fait peu parler de lui. Dommage. On aimerait l’écouter plus souvent.
Pierre joue davantage. Publié chez Nocturne en 2007, « Oui » a récemment été récompensé par une Victoire du Jazz. On ne peut qu’approuver.
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Vu et Entendu