Trois disques à emporter sur une île déserte, en haute montagne, ou dans les cavernes que prisent spéléologues et vacanciers, leur fraîcheur étant particulièrement recherchée en cette période de canicule. Sur la route des vacances, n’oubliez pas de bien hydrater le Papy et la Mamy qui voyagent avec vous, de faire boire le petit qui vous casse les pieds. Vous avez bien sûr rechargé la batterie de votre iphone ou celle de votre ordinateur portable dont vous ne pouvez plus vous passer. Vous en aurez besoin pour découvrir ces albums que vous téléchargerez de manière parfaitement légale car vous êtes tous des gentlemen. Ce sont mes dernières chroniques avant la mise en sommeil de ce blog. Il n’y aura pas d’édito en août. Les Michu se reposent. Moi aussi. Bonne écoute estivale !
Chick COREA : “The Vigil”
(Concord Jazz / Universal)
Après plusieurs disques intéressants en 2012, notamment “Further Explorations” hommage à Bill Evans enregistré avec Eddie Gomez et Paul Motian, Chick Corea revient à la fusion avec un nouvel orchestre comprenant Tim Garland (saxophones ténor et soprano), Charles Altura (guitares acoustiques et électriques), Hadrien Feraud (guitare basse), Marcus Gilmore (batterie) et Pernell Saturnino (percussions). Avec eux, Chick fait un malheur cet été dans les festivals.
Bien que n’étant pas aussi prenant que ses concerts, le disque reflète bien la musique que propose le pianiste, du jazz fusion au sein duquel le piano acoustique tient une place importante (écoutez le lumineux chorus qu’il prend dans Portals to Forever). Gayle Moran, son épouse, chante malheureusement dans Outer of Space, seul bémol d’un disque proche des opus de Return to Forever et de l’Elektric Band. On goûtera les espagnolades chères au pianiste qui saupoudrent Planet Chia, pièce influencée par le flamenco. On découvrira aussi une formation différente dans Pledge for Peace, longue plage dédiée à John Coltrane et enregistrée avec Stanley Clarke et Ravi Coltrane.
Joshua REDMAN :
“Walking Shadows”
(Nonesuch / Warner)
Réalisant un vieux rêve, Joshua Redman a enregistré une grande partie de ce disque avec des cordes. S’il a arrangé lui-même plusieurs thèmes, il en a confié d’autres à Dan Coleman (qui dirige aussi l’orchestre), Patrick Zimmerli et Brad Mehldau. “Walking Shadows” possède pourtant une réelle unité. Redman a choisi de s’exprimer sur des ballades, et décline au plus près leurs mélodies.
Son saxophone ténor s’enroule ainsi avec chaleur autour de Lush Life, Easy Living, Stardust, Infant Eyes (qu’il joue au soprano), mais aussi autour de Let It Be dont l’interprétation semble moins réussie. Avec lui, une section rythmique souple, fluide et d’une grande discrétion : Brad Mehldau au piano (et au vibraphone, notamment dans Last Glimpse of Gotham qu’il a composé), Larry Grenadier à la contrebasse et Brian Blade à la batterie. On appréciera bien sûr Dol Is Mine et Stardust, pièces dans lesquelles Brad s’offre des chorus, mais le pianiste accompagne avec une rare musicalité, fait constamment chanter son instrument, le saxophone restant toutefois l’instrument roi de cette séance marquée par le lyrisme.
Michel MARRE :
“I Remember Clifford”
(Hâtive ! / Believe)
En quartette, le trompettiste Michel Marre se penche lui aussi sur des ballades qu’il affectionne. On est vite sous le charme de la musique de cet album, promenade au cœur d’un jazz qui ne manque ni de swing ni de souffle. Round About Midnight, I Remember Clifford, Body and Soul ne vous sont certainement pas inconnus.
Au bugle ou à la trompette, Michel rend légères et aériennes leurs mélodies immortelles, les fait planer dans le bleu du ciel. De courtes improvisations collectives structurées et cohérentes s’intercalent entre les pièces écrites d’un répertoire comprenant aussi quelques compositions originales. Chess and Mal et Espera se fredonnent sans peine. La contrebasse ronde et chantante d’Yves Torchinsky, la batterie attentive et foisonnante de Simon Goubert en caressent les musiques heureuses. Avec eux, jouant un piano d’une élégance rare, Alain Jean-Marie accompagne en poète. Espera profite de la couleur de ses notes ; We Will Be Together Again aussi. Introduit par les harmonies subtiles et délicates du piano, une trompette rêveuse en décline le thème et le rend inoubliable.