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5 février 2018 1 05 /02 /février /2018 09:51
De l'importance des standards

Février. La réception tardive d’un disque du label BMC réunissant Christophe Monniot au saxophone alto et des musiciens hongrois – Béla Szakcsi Lakatos au piano, József Barcza Horváth à la contrebasse et Elemér Balázs à la batterie – me fait revenir sur un sujet qui me tient à cœur et que j’ai superficiellement abordé dans mon compte-rendu des derniers Trophées du Sunside : la place importante à réserver aux standards dans le jazz d’aujourd’hui.

 

Neuf d’entre eux constituent le programme de “Density of Standards” (UVM Distribution). Someday My Prince Will Come, Body and Soul, Over the Rainbow – je ne vais pas les citer tous – comptent parmi les plus célèbres morceaux de l’histoire du jazz. Et pourtant leurs mélodies, si souvent reprises, parviennent encore à générer des improvisations surprenantes, à poser les fondations de pièces réellement neuves. Béla Szakcsi Lakatos est certes l’un des plus grands pianistes hongrois, mais Christophe Monniot, tout feu tout flammes et inspiré par Eric Dolphy, n’a peut-être jamais mieux joué que dans cet enregistrement. La musique en est même étonnement moderne. Bien plus que celle de nombreux disques remplis de compositions originales à oublier qui me parviennent. Car un jazzman admiré pour sa technique n’est pas nécessairement un bon compositeur. Trouver une mélodie qui fonctionne, un don, cadeau tombé du ciel, ne relève pas de séjours prolongés dans des conservatoires de musique. Si on y apprend à la jouer, à l’arranger, à lui donner des couleurs, la technique ne compensera jamais le manque d’inspiration.

 

D’où la nécessité de jouer des standards, pas nécessairement des thèmes d’une autre époque, comme ceux que Cécile McLorin Salvant réactualise, cette dernière chantant aussi les Beatles. Elle n'est pas la seule, les chansons de John Lennon et Paul McCartney inspirant aussi Brad Mehldau et Fred Hersch, pourtant capables de composer leurs propres morceaux. Ouverts à d’autres styles musicaux, les jeunes musiciens n’écoutent plus ce que les amateurs de jazz des générations précédentes écoutaient. Normal. Libre à eux de s’approprier des mélodies qui leur sont familières, de les réinventer. Les comédies musicales de Broadway furent un important réservoir de thèmes inoubliables dont s’emparèrent les jazzmen. Des thèmes qui ont démontré leur grandeur en parvenant jusqu’à nous. Certains musiciens n’ont laissé à la postérité qu’un seul morceau ; d’autres, comme Duke Ellington ou Thelonious Monk, un important corpus d’œuvres mémorables qui sont toujours d’actualité. Cet héritage, tous les musiciens peuvent le partager. Il leur suffit d’explorer ce fond inépuisable de mélodies, de les ré-harmoniser pour créer les leurs. Puissent-ils enraciner et renouveler leur musique dans ce vaste répertoire.

 

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

De l'importance des standards

-Le nouvel orchestre de Franck Tortiller donnera ses premiers concerts officiels aux Gémeaux, Scène Nationale de Sceaux, 49 rue Georges Clémenceau, le jeudi 8, vendredi 9 et samedi 10 février. Le vibraphoniste a réuni autour de lui Joël Chausse, Rémy Béesau (trompettes & bugles), Tom Caudelle (saxhorne & flugabone), Léo Pellet, Pierre Bernier, Maxime Berton, Abel Jednak (saxophones), Yovan Girard (violon, voix), Pierre-Antoine Chaffangeon (piano & Fender Rhodes), Pierre Elgrishi (contrebasse) et Vincent Tortiller (batterie). De jeunes musiciens partageant avec lui l’idée de ce que doit être un grand ensemble de jazz aujourd’hui. Le vibraphone, mais aussi la contrebasse et la batterie y tiennent un rôle important. “Collectiv”, le premier album de la formation, sera en vente le 22 avril prochain. Auteur des arrangements, Franck Tortiller en a signé toutes les compositions, sauf Hobo Ho de Charles Mingus.   

-Yoann Loustalot (trompette & bugle), François Chesnel (piano), Frédéric Chiffoleau (contrebasse) et Christophe Marguet (batterie), sont attendus le 8 février au Sunside pour fêter la sortie de “Old And New Songs” (Bruit Chic / L’Autre Distribution). Les quatre hommes dépoussièrent de vieilles mélodies, les réharmonisent, les font revivre autrement. Ils sont allés les chercher aux quatre coins du monde, au Japon, au Brésil, en Italie, en Suède (Kristallen Den Fina repris dans “To Sweden With Love” du Art Farmer Quartet), en Russie (Mellan Branta Stränder et Plaine, ma plaine), mais aussi en France. Qui se souvient de Robert Marcy, l’auteur de File la laine (1948) que popularisa Jacques Douai ? Une jeune fillette de Jehan Chardavoine (1538 – vers 1580) qui mit en musique Mignonne allons voir si la rose, célèbre poème de Pierre de Ronsard, date de la Renaissance. C’est dire que la formation n’a pas hésité à interroger un passé lointain, jazzifiant avec bonheur des chansons anciennes qui font parties de notre patrimoine culturel. Yoann Loustalot et François Chesnel qui ont précédemment enregistré “Pièces en forme de flocons” pour Bruit Chic (avec le batteur Antoine Paganotti) renouent ici avec une poétique musicale raffinée, un jazz souvent modal qui interpelle délicatement.

-David Patrois (vibraphone et marimba) et Remi Masunaga (piano) au Triton le 9 dans un programme consacré aux célèbres “Variations Goldberg” de Jean-Sébastien Bach. Une idée de la pianiste japonaise originaire de Tokyo. Installée en France, elle rencontra le vibraphoniste par l’intermédiaire d’un ami professeur au Conservatoire de Paris – elle en est titulaire de six prix et a précédemment enregistré les Variations en 2011 pour Bayard Musique. Après un premier concert satisfaisant, ils viennent de faire paraître sur le label Arts & Spectacles “Around Goldberg Variations”, véritable passerelle entre le jazz et le classique, douze plages dont neuf d’entre-elles sont arrangées par Patrois.

-Toujours le 9, Sinne Eeg, récipiendaire du Prix du Jazz Vocal 2014 de l’Académie du Jazz pour son album “Face the Music”, se produira au Sunside avec Jacob Christoffersen, son pianiste attitré. Sur scène, les morceaux de bravoure ne manquent pas. Aussi à l’aise dans les ballades que sur tempo rapide, la chanteuse danoise maîtrise parfaitement le scat et enthousiasme a cappella. Elle a enregistré un album entier avec le bassiste Thomas Fonnesbæk et pose sa voix très juste de mezzo-soprano sur de nombreux standards. Conservant son pianiste mais faisant appel à des musiciens américains – Larry Koonse (guitare), Scott Colley (contrebasse) et Joey Baron (batterie) –, “Dreams”, son nouveau disque sur Stunt Records , mêle avec bonheur standards et compositions originales. Sa relecture de What Is This Thing Called Love (Cole Porter) est un des grands moments de ce nouvel album.

-Sons d’Hiver : Le festival a ouvert ses nombreuses portes le 26 janvier dernier et se poursuit jusqu’au 17 février. Largement consacré aux musiques improvisées, ses concerts m’interpellent peu. Je vous recommande toutefois celui du 10 février au théâtre Jean Vilar de Vitry-sur-Seine (20h00, 1 place Jean Vilar). Un trio réunissant Louis Sclavis (clarinette et clarinette basse), Dominique Pifarély (violon) et Vincent Courtois (violoncelle). “Asian Fields Variations” (ECM) qu’ils ont sorti l’an dernier est un disque de musique de chambre assez éloignée du jazz, une musique généreuse et libre qui prend le temps de nous faire rêver. Vous en trouverez la chronique dans ce blog via son moteur de recherche à la date du 13 mars 2017.

-On retrouvera avec plaisir au Sunside le 10 (21h30) Géraldine Laurent et les musiciens de son quartette – Paul Lay (piano), Yoni Zelnik (contrebasse) et Donald Kontomanou (batterie). Très à l’aise sur scène, elle a enregistré avec eux en 2015 un disque que l’on est pas près d’oublier. Produit par le pianiste Laurent de Wilde, “At Work” (Gazebo) réunit six compositions originales et trois standards. Parmi eux, de remarquables versions d’Epistrophy de Thelonious Monk et de Goodbye Porkpie Hat de Charles Mingus, des classiques du bop, musique que Géraldine affectionne et qu’elle garde en mémoire, comme en témoigne les lignes mélodiques de ses propres compositions, Charlie Parker, Johnny Hodges et Paul Desmond se faisant entendre dans son saxophone alto.

-Toujours dans le cadre de Sons d’Hiver, et à l’occasion de la sortie le même jour de “Cinéma Invisible” (Illusions), son nouveau disque co-signé avec Stéphane Oskéritzian qui en a assuré le montage, Stéphan Oliva donnera le 15 février un concert en solo à Vincennes (20h30, auditorium Jean-Pierre Miquel, 98 rue de Fontenay). Passionné de cinéma, le pianiste éblouit par sa capacité à improviser à partir d’un matériel thématique très varié. Outre des disques de jazz moderne en trio (certains avec le regretté Paul Motian), Stéphan a enregistré ces dernières années plusieurs albums autour des films de Jean-Luc Godard, traduit les sombres nuances de quelques films noirs, convoqué les fantômes de Bernard Herrmann et imaginé une nouvelle bande-son à “Loulou”, célèbre film muet de Georg Wilhelm Pabst. Sons d’Hiver lui laissant carte blanche pour ce concert, Oliva reprendra quelques-unes de ses anciennes compositions, esquissera un portrait d ‘Herrmann et se livrera à une improvisation totale autour de films imaginaires.

 

Au même programme, le clarinettiste David Krakauer en duo avec la grande pianiste classique sud-africaine Kathleen Tagg, on peut se laisser tenter.

-Mourad Benhammou et ses Jazzworkers le 16 au Jazz Café Montparnasse. Outre Mourad à la batterie, le quintette comprend Fabien Mary à la trompette, David Sauzay au saxophone, Pierre Christophe au piano, Fabien Marcoz à la contrebasse. On pense bien sûr aux Jazz Messengers d’Art Blakey lorsqu’on écoute cette formation faisant revivre le hard bop des années 50, les grandes heures des labels Blue Note et Riverside, lorsque le jazz vivait encore de grandes heures en Amérique.

-Wynton Marsalis, Kenny Rampton, Marcus Printup & Ryan Kisor (trompette), Chris Crenshaw, Vincent Gardner & Elliot Mason (trombones), Daniel Block, Ted Nash, Walter Blanding, Sherman Irby & Paul Nedzela (saxophones & clarinettes), Dan Nimmer (piano), Carlos Henriquez (contrebasse) & Marion Felder (batterie & percussions) soit le Lincoln Center Jazz Orchestra sous la direction de Marsalis dont il est le directeur musical, le 16 à la Philharmonie (Grande Salle Pierre Boulez 20h30).

-Le concert de février à ne pas manquer est celui que donnera Michel Bisceglia au Sunside le 22. Le pianiste belge nous rend très rarement visite et ses disques qui ne bénéficient d’aucune promotion sérieuse et sont difficiles à trouver, restent inconnus de l’amateur de jazz français. Il en a enregistré six avec le même trio, Werner Lauscher à la contrebasse et Marc Léhan à la batterie qui seront avec lui pour ce concert parisien. “20 Years Recordings”, une compilation de leurs morceaux sort chez Prova Records, mais je vous conseille de rechercher les albums originaux du trio, “Singularity” et “My Ideal” notamment, tous deux enregistrés en 2013. Subtilement accompagné, Michel Bisceglia y joue un merveilleux piano, plein de couleurs et d’harmonies délicates. Compositeur de musiques de film, il a également enregistré un très beau disque en duo avec le trompettiste Carlo Nardozza et avec le D.J. Buscemi, signé en 2009 une étonnante bande-son autour du cinéaste Dziga Vertov. Une très rare occasion de découvrir un très bon pianiste.    

DERNIÈRE MINUTE : en raison d'une forte grippe, René Urtreger se voit contraint d'annuler ses deux concerts. Il est remplacé par le trio du pianiste Laurent Courthaliac (avec Gilles Naturel à la contrebasse et Romain Sarron à la batterie).

René Urtreger au Sunside deux soirs de suite, les 23 et 24. En trio avec ses accompagnateurs habituels Yves Torchinsky et Eric Dervieu (mais sans Agnès Desarthe pour rassurer ceux qui ne l’apprécient pas comme chanteuse). Malgré ses 83 ans (il en aura 84 le 6 juillet prochain), René joue toujours son magnifique piano intelligemment trempé dans le bop. Il swingue, mais enchante aussi par ses accords, la tendresse enveloppante de ses compositions. Fidèle à la tradition du jazz, mais jeune dans sa tête comme en témoigne la modernité inaltérable de sa musique, René Urtreger, roi sans royaume, est l’un des rois du piano jazz.

-Le Pierre Guicquéro /Aurélie Tropez Quintet au Jazz Café Montparnasse le 23. Excellent tromboniste, Pierre Guicquéro s’est fait connaître au sein de son PG Project, formation de sept musiciens comprenant quatre souffleurs au service de compositions festives et joyeuses enracinées dans l’histoire du jazz. Le blues et le jazz néo-orléanais tendent la main à un hard bop funky et convivial. Membre du Duke Orchestra de Laurent Mignard, la clarinettiste Aurélie Tropez connaît elle aussi l’histoire du jazz. Les grands maîtres de l’instrument se font entendre dans sa clarinette, et dans une musique qui n’oublie jamais de swinguer. Félix Hunot (guitare), Bruno Rousselet (contrebasse) et Déborah Tropez (batterie) complètent la formation.

-Les Gémeaux : www.lesgemeaux.com

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-Le Triton : www.letriton.com

-Théâtre Jean Vilar de Vitry-sur-Seine : www.theatrejeanvilar.com

-Auditorium Jean-Pierre Miquel de Vincennes : www.vincennes.fr

-Jazz Café Montparnasse : www.jazzcafe-montparnasse.com

-Philharmonie de Paris : www.philharmoniedeparis.fr

 

Crédits Photos : Franck Tortiller Collectiv © Laure Villain – Remi Masunaga & David Patrois © Jean-Paul Bazin – Sinne Eeg © Stephen Freiheit – Dominique Pifarély / Louis Sclavis / Vincent Courtois © ECM Records – Géraldine Laurent © Steve Welles – Stéphan Oliva © Philippe Marchin – Michel Bisceglia Trio © Bart Claes – René Urtreger © Jean-François Andreu – Partition de Misty, Mourad Benhammou & His JazzWorkers, Lincoln Jazz Center Orchestra, Aurélie Tropez / Pierre Guicquéro © Photos X/D.R.

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15 janvier 2018 1 15 /01 /janvier /2018 09:54
La tentation panassiéenne

Janvier. Un mois plein de vent et de pluie mais plus calme quant aux sorties de disques. On en profite pour écouter des albums déjà anciens, voir et revoir des vieux films, lire quelques livres. Une récente et remarquable étude exhaustive de Laurent Cugny sur Hugues Panassié* m’inspire

cet éditorial, écrit un peu plus de 43 ans après son décès survenu en

décembre 1974. Directeur de conscience du « jazz authentique », Panassié

est mort trop tôt pour assister à l’épanouissement du jazz européen. Joué par des musiciens blancs, il en aurait sûrement contesté l’authenticité, tout comme il avait refusé le be-bop, la modernité et l’inévitable transformation de cette musique. Car, selon lui, il fallait être afro-américain pour jouer le jazz qu’il entendait ou, à défaut, le jouer comme un musicien noir et peu de Blancs en étaient capables. Intolérant, il fantasmait un jazz idéal qui ne pouvait que progressivement s’éloigner de l’idée qu’il s’en faisait, des jugements de valeur qu’il avait érigés en dogme et au sein desquels il s’était enfermé.

Si l’on parle moins d’Hugues Panassié aujourd’hui, son influence reste vive dans le petit monde du jazz qui s’agite aujourd’hui. Une emprise d’autant plus pernicieuse qu’elle empoisonne les esprits et conditionne des attitudes. Mes propos ne visent pas certains nostalgiques du Hot Club de France qui défendent toujours bec et ongles l’orthodoxie panassiéenne. Ils s’adressent à ceux qui, pour de mauvaises raisons, refusent que le jazz se transforme, s’ouvre à d’autres musiques, la notion de vraie et de fausse musique de jazz que Panassié introduisit dès son premier livre, “Le Jazz Hot” (1934), restant hélas d’actualité. Installé en Europe, revitalisé par des musiciens inventifs et talentueux, le jazz s’est trouvé un public fidèle et réceptif. Empruntant à d’autres cultures, il s’approprie et s’invente d’autres rythmes, se pare d’autres couleurs, son champ harmonique se confondant souvent avec celui de la musique savante européenne.

 

Non sans provoquer les réactions négatives des puristes pour lesquels il se doit d’obéir à des règles immuables. Cette musique qui s’enracine loin de l’Amérique et du blues des origines, n’est pour eux plus du jazz. Hugues Panassié qui écrivit que les Blancs ne peuvent au mieux qu’imiter le jazz aurait pu être un des leurs. La couleur de la peau et l’éloignement géographique avec la mère patrie du jazz n’ont pourtant rien à voir avec l’aspect qualificatif de cette musique, avec le talent des musiciens qui n’a pas de frontières. Le temps s’était arrêté pour Panassié qui, énonçant des croyances et non des arguments, imposa ses goûts comme s’ils étaient des dogmes. Inclinaison étroitement liée à la culture, le goût se forme, se construit, se modifie au sein d’un monde qui bouge et change à très grande vitesse. Comme toutes les musiques savantes, le jazz demande un effort. Il s’agit de connaître son histoire, ses traditions et loin de la rejeter, d’accueillir favorablement son évolution, même s'il abrite aujourd'hui des musiques étrangères à son glorieux passé. Ce blog qui lui est consacré reflète fidèlement mes goûts. Je respecte ceux des autres, fussent-ils différents. Je vous espère nombreux à partager les miens.

 

* “Hugues Panassié, L’œuvre panassiéenne et sa réception”, Éditions Outre Mesure, Collection Jazz en France.

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT (seconde quinzaine de janvier)

 

-Le Gil Evans Paris Workshop retrouve le Sunside le 16 janvier après un concert en juillet toujours présent dans nos mémoires. Dirigée par Laurent Cugny qui apporte compositions et arrangements, cette formation de jeunes musiciens fait également revivre la musique de Gil Evans. Si l’instrumentation proposée est celle que ce dernier affectionnait, l’orchestre expérimente, joue autrement une musique qui, loin d’être figée, se transforme, plonge dans un bain de jouvence. La formation a publié son premier disque l’an dernier, deux CD(s) mêlant avec bonheur, compositions originales et reprises de morceaux, Spoonful un thème du bluesman Willie Dixon donnant son nom à un double album inoubliable.

-Enrico Rava et Aldo Romano au Sunside du 18 au 20 janvier (21h00). Ils se connaissent bien et se retrouvent une fois l'an dans un club parisien. Dans les années 60, les deux hommes jouaient ensemble dans le quartette de Steve Lacy et Aldo tient la batterie dans plusieurs disques que Rava réalisa dans les années 70. En 2011, ils enregistraient “Inner Smile” à Udine, un disque en quartette publié sous le nom du batteur. Baptiste Trotignon, le pianiste de l’album, et Darryl Hall à la contrebasse, seront avec eux au Sunside pour faire vibrer leurs mélodies solaires et raffinées, accompagner les notes délicates d’une trompette qui chante, rêve, et dessine de tendres paysages.

-Fred Nardin au Duc des Lombards le 19 avec Ore Bareket (contrebasse) et Leon Parker (batterie), musiciens avec lesquels il a enregistré l’an dernier “Opening” (Jazz Family), son premier opus. Co-fondateur de l’Amazing Keystone Big Band et Prix Django Reinhardt de l’Académie du Jazz en 2016, le pianiste en jouera probablement le répertoire. Fougueux sur tempo rapide, il se fait miel dans les ballades de son disque, Lost in Your Eyes et Hope, mais aussi dans une relecture très réussie de You’d Be So Nice to Come Home to un morceau de Cole Porter. Deux reprises inventives et joyeuses de Thelonious Monk complètent un album tout à fait recommandable.

-Pour prolonger les fêtes en musique, rien de tel que l’Orchestre de la Lune attendu le 24 au Studio de l’Ermitage. Grande formation dirigée par le saxophoniste et compositeur Jon Handelsman, elle réunit chanteurs, chanteuses et instrumentistes de talent. Le tuba de Didier Havet assure les basses de cet orchestre funky qui mêle jazz et reggae, et interprète des compositions festives et joyeuses aux arrangements très soignés. Daniel Zimmermann (trombone), Bobby Rangell (saxophone alto et flûte) et Michael Felberbaum (guitare) ne vous sont probablement pas inconnus. Disponible depuis mai 2017, leur disque “Dancing Bob” (Cristal Records) mérite une écoute attentive.

-Toujours le 24, les frères Moutin (François à la contrebasse et Louis à la batterie) invitent le pianiste Jean-Michel Pilc et le trompettiste  Randy Brecker au New Morning (concert à 21h00). Les frères Moutin, Pilc les connaît depuis 1982. Devenu musicien professionnel en 1989, il forma son premier trio avec François qui l’accompagne dans “Together : Live at Sweet Basil” (en deux volumes), son premier disque, et que l’on retrouve dans d’autres albums du pianiste. Jean-Michel Pilc a également rejoint en 2015 le Moutin Factory Quintet, formation créée deux ans plus tôt par les deux frères et qui comprend aussi le guitariste Manu Codjia et le saxophoniste Christophe Monniot. Publié en 2016, “Deep” (Jazz Family) est leur disque le plus récent.

-Dernière minute : en quartette avec Raphaël Dever (contrebasse), Stan Laferriere (batterie) et Laurent Bataille (congas), le pianiste Pierre Christophe, Prix Django Reinhardt 2007 de l’Académie du Jazz, sera le 25 au Jazz Café Montparnasse (21h00), 13 rue du Commandant Mouchotte, 75014 Paris. Au programme : le répertoire de son dernier disque, “Tribute to Erroll Garner” (Camille Prod. / Socadisc).

 

-Laurent de Wilde au Sunside les 26 et 27 janvier. La sortie en 2017 d’un album consacré à Thelonious Monk dont le centenaire de la naissance fut abondamment fêté lui apporta de nombreux concerts et une importante couverture médiatique. J’ai moi-même rédigé en octobre dernier une chronique élogieuse de son “New Monk Trio”, hommage respectueusement décalé rendu à un pianiste unique à l’univers très personnel. Laurent de Wilde apporte d’autres couleurs et d’autres rythmes à la musique de Monk. Une réussite qu’il partage avec Jérôme Regard et Donald Kontomanou, étroitement associés au projet. Le premier fait magnifiquement chanter sa contrebasse. Le second greffe d’autres tempos sur des compositions qui, revues et transformées par Laurent, brillent plus que jamais dans la galaxie du jazz.

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Studio de l’Ermitage : www.studio-ermitage.com

-New Morning : www.newmorning.com

-Jazz Café Montparnasse : www.jazzcafe-montparnasse.com

 

Crédits Photos : Gil Evans Paris Workshop, Enrico Rava & Aldo Romano, Fred Nardin avec Ore Bareket et Leon Parker, Laurent de Wilde, Pierre Christophe © Philippe Marchin – Louis, François Moutin et Jean-Michel Pilc © Ursula K. – Hugues Panassié © Photo X /D.R.

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1 décembre 2017 5 01 /12 /décembre /2017 10:00
Le jazz : une nouvelle musique contemporaine ?

Décembre. Pour le journaliste de jazz un moment de répit, les sorties d’albums se faisant plus rares jusqu’à la mi-janvier. Décembre, c’est aussi le temps des bilans et des récompenses. L’Académie du Jazz se réunira dans quelques jours pour voter ses prix qui seront décernés en janvier. Pas facile de choisir entre plusieurs centaines d’albums, même si les vraies réussites restent peu nombreuses. Mes Chocs de l’année qui vous seront dévoilés à la mi-décembre m’inspirent quelques réflexions que je vous soumets ici.

 

Naguère de tradition orale, le jazz est aujourd’hui enseigné dans des écoles à de jeunes musiciens qui débutent souvent par des études classiques. Le swing n’est plus leur préoccupation première. Jointes à une technique souvent phénoménale, leurs connaissances harmoniques leur permettent d’improviser autrement. Bien qu’ouverte à toute sortes de musiques, leur culture est d’abord européenne. Le rythme reste important mais les couleurs, les agencements de timbres, le sont pour eux bien davantage. Déjà l’auteur d’un disque autour de Domenico Scarlatti, le pianiste Enrico Pieranunzi enregistra il y a quelques mois un album avec Bruno Canino, un ardent défenseur de la musique contemporaine, naguère l’accompagnateur attitré de la cantatrice Cathy Berberian. Ensemble, ils reprennent des pièces de compositeurs des deux Amériques. Jazz, musique classique ? On peut aussi se le demander à l’écoute du dernier album de Fred Hersch, un opus en solo que la musique classique imprègne fortement. Quant au “Re-Focus” du saxophoniste Sylvain Rifflet enregistré avec un orchestre de cordes, ou au disque récent d’Hervé Sellin judicieusement intitulé “Passerelles” et consacré à des relectures d’œuvres de Robert SchumannClaude Debussy, Erik Satie et Henri Dutilleux, ils mêlent habilement les deux genres.

 

Ce rapprochement du jazz et de la musique classique est également perceptible dans les derniers disques de Michel Portal et de Jean-Philippe Viret. Le premier, un merveilleux interprète de Mozart, l’a enregistré avec un quatuor à cordes. Le second aussi, remplaçant le second violon par sa contrebasse. Son hommage à François Couperin dont il emprunte un morceau, La muse plantine, et qui s’inspire de ses pièces pour clavecin, réunit jazz et musique de chambre. D’autres albums enregistrés avec des cordes témoignent d’un certain rapprochement du jazz et de la musique contemporaine. C’est ce que propose le trio réunissant Louis Scavis, Dominique Pifarély et Vincent Courtois, le violoncelle de ce dernier, associé à deux saxophonistes – Daniel Erdmann et Robin Fincker – parvenant à rendre profondément neuve et à donner des couleurs inédites à des musiques de films.

 

« Il faut agrandir le jazz pour ne pas avoir à en sortir. » écrivait André Hodeir dans “Hommes et problèmes du jazz”. Compositeur français, il fut le premier à intégrer le vocabulaire sériel à une partition de jazz et le premier à réaliser un morceau de jazz pour bande magnétique, piano et section rythmique. Ce jazz que l’on n’a jamais très bien pu définir, les musiciens européens l’agrandissent par leurs libres improvisations, en sautent les barrières ou en ouvrent les claies, barres de mesure souvent incompatibles avec la riche polyrythmie qu'ils proposent. Alors que la musique contemporaine officielle, très sèche, très aride et très peu mélodique, cherche désespérément un public, le jazz européen dont les réussites furent particulièrement nombreuses en 2017, en particulier dans le jazz français, dévoile une musicalité autrement plus séduisante. Et si le jazz était la musique contemporaine d’aujourd’hui ? On peut se poser la question.

 

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

-Sheila Jordan au Sunside le 1er et le 2 décembre. Née en 1928, la chanteuse n’est plus toute jeune et sa voix fragile qui tend vers l’épure n’est plus tout à fait la même que celle de ses débuts. “Portrait of Sheila”, son premier disque pour Blue Note en 1962 avec Steve Swallow, inaugura une série d‘albums enregistrés avec des bassistes, Arild Andersen, Harvie Swartz et Cameron Brown magnifiant et révélant sa voix dans plusieurs de ses disques. Enregistré pour ECM en 1979, “Playground” reste le meilleur disque du quartette qu’elle codirigea avec le pianiste Steve Kuhn de 1979 à 1982. Patrick Cabon (piano), Frédéric Loiseau (guitare), Gary Brunton (contrebasse) et Karl Jannuska (batterie) accompagneront au Sunside cette grande Dame du jazz vocal.

-François Couturier et son Tarkovsky Quartet au Bal Blomet le 2. Le violoncelle d’Anja Lechner, l’accordéon de Jean-Louis Matinier, le saxophone soprano de Jean-Marc Larché et le piano de François déploient les somptueuses couleurs d’une musique acoustique reflétant l’âme slave et inquiète d’Andreï Tarkovsky, le cinéaste préféré de Couturier. Véritable méditation poétique, “Nuit Blanche” (ECM), le troisième album de la formation publié au printemps dernier, nous fait passer de l’autre côté du miroir, dans le monde du rêve dont il rapporte des images.

-Si vous avez manqué le New Monk Trio de Laurent de Wilde au Bal Blomet en octobre, le Duc des Lombards lui ouvre ses portes trois soirs de suite, du 4 au 6 décembre. Avec Jérôme Regard à la contrebasse et Donald Kontomanou à la batterie, Laurent vient de publier un album entièrement consacré à Thelonious Monk dont vous trouverez la chronique dans ce blog. Relecture très personnelle de la musique du compositeur dont on fête ces jours-ci le 100ème anniversaire de sa naissance, “New Monk Trio” (Gazebo / L’Autre Distribution) donne d’autres couleurs, d’autres rythmes à des thèmes qui nous sont familiers. Auteur d’un livre incontournable sur Monk en 1996, Laurent ose enfin jouer sa musique et il le fait magnifiquement.

-Airelle Besson (trompette), Édouard Ferlet (piano) et Stéphane Kerecki (contrebasse) au Café de la Danse le 4. Un label de musique classique, les réunit dans un programme mêlant des œuvres classiques – la Pavane pour une infante défunte de Maurice Ravel, la Pavane Opus 50 de Gabriel Fauré – à des compositions originales. Ils sont tous les trois sensibles au répertoire classique, à l’harmonie et à la manière dont le son circule dans leurs morceaux. Ils improvisent avec toujours la mélodie en point de mire sans qu’un instrument domine les autres. Bénéficiant d’une prise de son très soigné, “Aïrés” (Alpha / Outhere) est un très beau disque de jazz de chambre. Soon de Kerecki, L’Histoire d’un enfant de Saint-Agil de Ferlet et la Valse Sentimentale Opus. 51 de Piotr Ilitch Tchaïkovsky sont des pièces très réussies.

-Le 5 au Studio de l’Ermitage (20h30), concert de sortie des deux albums que vient de faire paraître Hervé Sellin. Ce dernier s’est récemment produit à la tête d’un All Stars dans le Studio 104 de Radio France pour fêter le centième anniversaire de la naissance de Thelonious Monk. Très occupé par ses élèves – professeur au CNSM de Paris, il dirige aussi les ateliers jazz de Science-Po Paris –, le pianiste s’est fait discret ces dernières années. Aucun disque publié depuis “Marciac New-York Express” enregistré en tentet en 2008 jusqu’à ces deux nouveaux opus édités ces jours-ci. Hommage à Phil Woods, “Always Too Soon” réunit Pierrick Pédron (saxophone alto), Thomas Bramerie (contrebasse) et Philippe Soirat (batterie). Rencontre réussie du jazz et de la musique classique, “Passerelles” fait appel à une seconde pianiste, Fanny Azzuro, dans Les Scènes d’enfants de Robert Schumann, les autres musiciens étant trois de ses élèves du CNSM : Rémi Fox (saxophone soprano), Emmanuel Forster (contrebasse) et Kevin Lucchetti (batterie).

-Orbit, un nouveau trio réunissant le pianiste Stéphan Oliva, le bassiste Sébastien Boisseau et le batteur Tom Rainey, donnera son premier concert parisien à Paris le samedi 9 décembre à 20h30 au 19 Paul Fort, 19 rue Paul Fort dans le 14ème arrondissement, une ancienne usine devenu un lieu d’expositions, de concerts et le domicile d’Hélène Aziza qui invite les artistes qu’elle apprécie et accompagne. Faisant constamment circuler une musique très libre évoquant des sensations, des images, Orbit qui donna son premier concert en mai 2016 à l’Abbaye de l’Épau dans le cadre de l’Europa Jazz Festival, reprend d’anciennes compositions d’Oliva (Intérieur Nuit, Portrait of Gene Tierney, Spirales, Stéréoscope) et des thèmes de Boisseau (Wavin, Lonyayutca). Réservation conseillée (helenaziza@19paulfort.com). Tarif unique: 15€.

-La 15ème édition de l’incontournable You & The Night & The Music qu’organise chaque année la radio TSF Jazz, se déroulera le 11 à la Salle Pleyel. Au programme : douze orchestres comme autant de mois qui défilent, soit 3 heures de musique. Les deux orchestres de cérémonie sont le Bigre Big Band et le Projeto Coisa Fina. Au programme : Miles Sanko, Deva Mahal, Mathias Levy, China Moses, Shabaka Hutchings & Sons of Kemet, Julie Saury Sextet, Tony Allen, Camille Bertault, les Doigts de l’Homme, Jowee Omicil, André Manoukian, Laurent de Wilde Monk Trio, Gaël Horellou, Fred Nardin Trio, Rémi Panossian Trio, Arnaud Dolmen et des invités surprise. 

-La pianiste roumaine Ramona Horvath vient également de faire paraître un album et est attendue au Sunside le 13 pour en fêter la sortie. Enregistré avec Nicolas Rageau (contrebasse) et Philippe Soirat (batterie), André Villéger s’y faisant entendre au saxophone ténor dans trois plages, “Lotus Blossom” (Black & Blue / Socadisc) est largement consacré à des standards, Ramona signant toutefois trois compositions originales. Le disque contient des duos, des trios, des morceaux en quartette et une magnifique version en solo de Lotus Blossom (Billy Strayhorn) qui lui donne son titre. Avec sensibilité, la concertiste classique (Ramona Horvath est diplômée du Conservatoire de Bucarest) trempe ses mains agiles dans le swing d’un jazz intemporel. L’élégante Micutul Valse de Nicolas Rageau mérite bien sa place ici. Superbe version de All the Things You Are. Longuement introduite en solo, André Villéger y prend un tendre et émouvant chorus.      

-Après “The Key” en 2014, le pianiste Jerry Léonide sort un nouvel enregistrement “Source of the Ocean” (Assai / Socadisc). En quartette, il en présentera la musique au Sunside le 16 décembre. Avec lui, deux des musiciens de l’album, Sylvain Gontard (bugle) et Gino Chantoiseau (contrebasse), Christophe Chrétien remplaçant à la batterie Jhonny Joseph qui apporte une grande variété de rythmes à ce nouvel opus. L'album entremêle avec bonheur le jazz et le séga, la musique traditionnelle de l’île Maurice. Excellent pianiste – il fut en 2013 le lauréat du concours international de piano solo du festival de Jazz de Montreux –, Jerry Léonide ornemente, assure la primauté de la ligne mélodique, et pose de belles couleurs sur la musique d'un disque très réussi.

-Occupé par ses nombreux projets musicaux, le bassiste Jean-Philippe Viret délaisse un peu le trio qu’il partage avec le pianiste Édouard Ferlet et le batteur Fabrice Moreau. Ne manquez donc pas leurs retrouvailles au Sunside le 22. Nos trois musiciens servent les mélodies chantantes qu’ils inventent – certaines pourraient constituer de bonnes musiques de films – y déposent des harmonies quelque peu irréelles pour décrire des paysages brumeux et mélancoliques. Ici l’art de la fugue voisine avec le blues, le vocabulaire du trio relevant autant de la musique classique européenne que du jazz. D’autres morceaux plus abstraits reposent sur l’habileté des musiciens à penser de longues improvisations oniriques. Le silence aère alors la musique, et la fait magnifiquement respirer.

-Jacky Terrasson en trio au Sunside les 28, 29 et 30 décembre (deux concerts par soir, à 19h30 et à 21h30). Il habite New-York et joue moins souvent dans les clubs parisiens. Il y a un an, Jacky se produisait presqu’aux mêmes dates au Sunside avec Stéphane Belmondo pour y interpréter “Mother” (Impulse !), quatorze morceaux parmi lesquels des standards, des ballades mélancoliques à l’atmosphère feutrée. Pour ces trois soirs de concerts, il vient à Paris avec Ali Jackson, le batteur de Wynton Marsalis et du Lincoln Center Orchestra, l’excellent Thomas Bramerie complétant son trio. Possédant autant d’expérience que de technique, Jacky Terrasson peut difficilement donner un mauvais concert. En forme, il rejoint les plus grands. Rêveur ou énergique selon les besoins de son répertoire, son piano bénéficie de son jeu très physique. Ancré dans le blues et dans le rythme, il ne peut que s’accorder au groove de son batteur.

MAIS AUSSI EN JANVIER…

 

-Laurent Mignard et son Duke Orchestra au Pan Piper du 5 au 7 janvier (5 représentations) pour une adaptation scénique de “Mary Poppins. En 1964, Walt Disney adaptait le livre de Pamela Lyndon Travers. Quelques mois plus tard, Duke Ellington publiait un album d’arrangements des chansons du film. Richard et Robert Sherman en avaient écrit les musiques. Laurent Mignard en propose pour la première fois la mise en scène dans un spectacle musical participatif tout public avec, dans le rôle de Mary Poppins, la comédienne et chanteuse Sophie Kaufmann.

-Enrico Pieranunzi au Studio 104 de Radio France (20h00) le 13 janvier dans le cadre de l’émission Jazz sur le Vif. Avec lui, Diego Imbert (contrebasse) et André Ceccarelli (batterie), des musiciens qui l’accompagnent dans le formidable “Ménage à trois” (Bonsaï Music) publié l’an dernier. Un disque dans lequel le pianiste romain adapte des pièces du répertoire classique, des œuvres de Claude Debussy, Gabriel Fauré, Francis Poulenc, Erik Satie qu’il transforme en véritables morceaux de jazz. La chanteuse Claudia Solal et Benjamin Moussay (piano, Fender Rhodes, claviers), qui viennent de faire paraître “Butter in my Brain” chez Abalone, en assureront la première partie.

-Lauréate du Prix du Jazz Vocal de l’Académie du Jazz en 2013 et en 2015, Cécile McLorin Salvant se produira le 15 janvier dans l’auditorium de la Seine Musicale (20h30) avec Aaron Diehl (piano), Paul Sikivie (contrebasse) et Lawrence Leathers (batterie). Au programme : de larges extraits de “Dreams and Daggers” (Mack Avenue / Pias), un disque enregistré en public au Village Vanguard dont vous trouverez une excellente chronique dans ce blog. Lauréate de la prestigieuse Thelonious Monk Competition en 2010, Cécile possède une voix en or, chante magnifiquement le blues, et est considérée à juste titre comme la meilleure chanteuse de la planète jazz.

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-Le Bal Blomet : www.balblomet.fr

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Café de la Danse : www.cafedeladanse.com

-Studio de l’Ermitage : www.studio-ermitage.com

-19 Paul Fort : www.19paulfort.com

-Salle Pleyel : www.sallepleyel.com

-Pan Piper : www.pan-piper.com

-Radio France - Jazz sur le Vif : www.maisondelaradio.fr/concerts-jazz

-La Seine Musicale : www.laseinemusicale.com

 

-Crédits Photos : Sylvain Rifflet et cordes © Christian Rose – Sheila Jordan © Andrea Canter – Tarkovsky Quartet © Caterina Di Perri – Laurent de Wilde New Monk Trio © Pierre de Chocqueuse – Hervé Sellin © Jean-Baptiste Millot – Jerry Léonide © Sebastien “Pictange” Boisset – Trio Viret © Grégoire Alexandre – Jacky Terrasson, Enrico Pieranunzi © Photos X/D.R.   

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2 novembre 2017 4 02 /11 /novembre /2017 08:49

Novembre. Deux mois avant les fêtes, les piles de CD(s) atteignent des hauteurs vertigineuses chez les journalistes qui les reçoivent. Les écouter tous est bien sûr impossible. Pourquoi tant de musiciens inconnus qui peinent à survivre s’obstinent-ils à faire des disques qui peinent à se vendre ?  

 

Le musicien les vend aux rares concerts qu’il parvient à donner. Pour ce faire, il lui faut avoir enregistré un album qui est davantage distribué à la presse que vendu dans les rares magasins qui existent. Car le système est pour le moins pervers : pas de disques, pas de concerts et réciproquement. Fabriquer un disque n’est pourtant pas gratuit. Le studio, la maquette du livret ou de la pochette, le pressage, les taxes nécessitent un budget. Certains trouvent un distributeur ce qui restreint d’hypothétiques bénéfices mais permet une meilleure visibilité de l’album. Pourtant, son disque noyé au sein de milliers de références, le musicien de jazz n’a guère de chance de récupérer sa mise, même avec une presse dithyrambique. Avoir des élèves lui permet à peu près de gagner sa vie, mais il est musicien et tient aussi à jouer et à faire connaître sa musique.

 

Pour y parvenir, il peut essayer de la vendre dématérialisée sur le net après l'avoir enregistrée mais dans ce cas comment la promouvoir et trouver des concerts ? Car s’il n'envoie pas son disque aux médias, il n'aura pas d’articles pour légitimer sa musique et la faire connaître. Quant à l’amateur de jazz, qu’il soit ou non journaliste, il n’est pas prêt d’accepter cette dématérialisation. Les bacs des disquaires se remplissent à nouveau de vinyles, ce qui témoigne de son attachement à un support qui n’est pas prêt de disparaître. Alors, on s’organise, on tâche d’obtenir des aides financières auprès des sociétés civiles (SACEM, SCPP, FCM, ADAMI, SPEDIDAM...). Il y a aussi le mécénat privé, la Fondation BNP Paribas qui a beaucoup aidé les jazzmen ces dernières années. On compte aussi sur ses amis, ses relations pour financer son disque. Le crowdfunding le permet. Financement participatif, il s’adresse à tous et permet au musicien de limiter la casse. « Vous aimez ma musique, participez à la hauteur de vos possibilités et vous pourrez l’écouter chez vous ». Une forme moderne de troc qui réunit des gens autour d’un projet, des journalistes qui croient au musicien, des musiciens amis. Quant elle le peut, la famille donne un coup de main, l’artiste établissant une relation directe avec ceux qui l’écoutent. Distribué par Pias, le label Jazz&People existe sur ce mode économique. L’argent récolté sert à payer le pressage, le graphiste, l’imprimeur et l’attaché de presse. Reste à vendre tous ces disques. Si vous avez une idée ?

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

 

-Après le Duc des Lombards en février, c’est au Sunside qu’est attendu le 3 et le 4 novembre le trio réunissant Antonio Faraò (piano), Stéphane Kerecki (contrebasse) et Daniel Humair (batterie). S’il harmonise avec finesse et sensibilité une musique souvent modale, le pianiste peut à tout moment surprendre par des notes énergiques. Ralentir le rythme harmonique, c’est aussi laisser beaucoup d’espace aux musiciens. Sa section rythmique en bénéficie, la musique très ouverte leur laissant beaucoup d’initiative. Poser les bons tempos sur des harmonies raffinées n’exclut pas une prise de risque collective et des moments inattendus.

-Ambrose Akinmusire au New Morning le 6. La scène est pour lui et ses musiciens – Sam Harris (piano), Harish Raghavan (contrebasse) et Justin Brown (batterie) – un laboratoire qui lui permet d’inventer en temps réel sa musique. Portés par une section rythmique adoptant des tempos fluctuants, ses thèmes génèrent de longues improvisations souvent inventives, une musique labyrinthique et spontanée qui se développe naturellement, s’organise collectivement au fur et à mesure qu’elle se déroule. Les notes y coulent plus ou moins vite selon l’humeur du trompettiste qui occupe beaucoup l’espace sonore et joue des lignes mélodiques souvent inattendues.

-Dee Dee Bridgewater à la Cigale le 7 et le 8. Coproduit par le saxophoniste Kirk Whalum et intitulé “Memphis” (Okeh / Sony Music), son nouvel album relève de la soul. Dee Dee en écouta beaucoup dans cette ville du Tennessee. Une radio locale, WDIA y diffusait exclusivement de la musique afro-américaine et son père y travaillait comme D.J. sous le nom de Matt the Platter Cat. Sur scène : Curtis Pulliam (trompette), Bryant Lockhart (saxophones), Frarindell "Dell" Smith (orgue, piano et direction musicale), Charlton Johnson (guitare), Barry Campbell (basse) et Carlos Sargeent (batterie). Shontelle Norman-Beatty et Monet Owns assurent avec Dee Dee les parties vocales.

-En trio avec Blake Meister (contrebasse) et Eric Kennedy (batterie), le pianiste Larry Willis revient jouer au Duc des Lombards le 13 et le 14. Sa présence au sein du sextet de Carla Bley dans la seconde moitié des années 80 le fit connaître à un large public, mais Willis, né en 1940, commença bien plus tôt sa carrière. Dès l’âge de dix-sept ans, il joue dans les clubs de New York avec Eddie Gomez et Al Foster. Engagé par le saxophoniste Jackie McLean, il tient le piano dans “Right Now !” (Blue Note 1965), sa première apparition sur un disque. Plus de 300 albums suivront. Apprécié pour ses voicings et ses combinaisons harmoniques, il peut tout jouer et a pratiqué bien des genres tout en n’oubliant jamais le swing.

-Ahmad Jamal au Palais des Congrès le 14 avec ses musiciens habituels, James Cammack à la contrebasse, Manolo Badrena aux percussions et Herlin Riley à la batterie. Ce n’est que récemment que m’est parvenu son dernier disque “Marseille”, publié en début d’année   (merci Pascal Bussy), trop tardivement pour que je puisse en faire la chronique. Pour chanter Marseille et rendre hommage ce grand port méditerranéen chargé d’histoire et tourné vers l’Afrique, Jamal a invité Mina Agossi et Abd Al Malik qui seront avec lui sur scène à cette occasion.

-Dave Liebman et Émile Parisien (saxophones soprano), Jean-Paul Celea (contrebasse) et Wolfgang Reisinger (batterie) au Sunside le 14 et le 15 (concerts à 19h30 et à 21h30). C’est en 2016, à Marciac que les quatre hommes donnèrent leur premier concert. En 2001, associé à Celea et à Reisinger, Liebman enregistrait “Ghosts” pour le défunt label Night Bird de Jean-Jacques Pussiau. En 2012, ce dernier produisait “Yes Ornette !” pour le label Out Note dont il assurait la direction artistique, un disque en trio avec la même section rythmique pour accompagner Parisien. Aujourd’hui un seul groupe les rassemble tous les quatre.

-Leïla Olivesi au Sunside le 16 (21h30) avec Jean-Charles Richard (saxophones), Yoni Zelnik (contrebasse) et Donald Kontomanou (batterie) pour un hommage à la pianiste Geri Allen décédée à l’âge de 60 ans le 27 juin dernier. Au programme, des compositions de cette dernière qui enregistra de grands disques en trio avec Charlie Haden et Paul Motian, Ron Carter et Tony Williams. Enregistré en solo et inspiré par Cecil Taylor, McCoy Tyner et Herbie Hancock, “Flying Toward The Sound” (Motema) fut un de mes 13 Chocs de l’année 2010.

 

-Lew Tabakin en trio au Sunside le 18 (21h30) avec Philippe Aerts (contrebasse) et Mourad Benhammou (batterie). Connu pour son association avec la pianiste japonaise Toshiko Akiyoshi, son épouse avec laquelle il codirigea un grand orchestre, cette légende du saxophone, 77 ans depuis le 26 mai, travaille souvent sans filet, sans pianiste pour asseoir la tonalité des morceaux qu’il reprend. Il excelle au saxophone ténor mais est aussi un flûtiste hors pair, un des seuls jazzmen qui improvise réellement sur l’instrument.

-Stacey Kent à la Salle Pleyel le 19 (20h00) dans le cadre du Blue Note Jazz Festival. Son répertoire relève en partie de la variété, mais elle chante toujours juste et très bien en français. En vente depuis le 20 octobre, son nouvel album “I Know I Dream” (Okeh / Sony Music) a été enregistré à Londres avec un orchestre réunissant une trentaine de musiciens. Un écrin qui habille somptueusement les chansons qu’elle reprend, des standards, des classiques de la musique brésilienne, Avec le temps du grand Léo Ferré et quelques compositions de son mari, le saxophoniste Jim Tomlinson. Elle sera rejointe sur scène par l'Orchestre Symphonique Confluences dirigé par Philippe Fournier.

-Comprenant Dave Douglas à la trompette, Chet Doxas aux saxophones, Steve Swallow à la guitare basse et Jim Doxas, le frère de Chet, à la batterie, The Riverside Quartet dont le nouvel album, “The New National Anthem”, est paru en juillet dernier sur le label Greenleaf, se produira au New Morning le 20 avec Carla Bley au piano. Normal, car ce sont les compositions de cette dernière qui sont à l’honneur dans cet enregistrement évoquant l’époque au cours de laquelle Ornette Coleman et Don Cherry jouaient ensemble. On peut se laisser tenter.

-Chucho Valdés et Gonzalo Rubalcaba à l’auditorium de la Seine Musicale le 20 (20h30) pour un duo de piano. L’exercice est périlleux car il est bien difficile de tenir une telle conversation sans se perdre dans un pathos de notes inutiles. Fondateur en 1973 du célèbre groupe Irakere avec lequel il rénova la musique afro-cubaine, Chucho Valdés a enregistré d’excellents albums ces dernières années sur le label World Village à la tête de ses Afro-Cuban Messengers. C’est aussi un des meilleurs pianistes cubains avec Gonzalo Rubalcaba. Né en 1963, ce dernier a également de grands disques à son actif sur les labels Messidor et Blue Note. Publié en 2015 et enregistré dix ans plus tôt au Blue Note de Tokyo avec Charlie Haden à la contrebasse,, “Tokyo Adagio” (Impulse !) reste un de ses plus beaux opus.

-Fred Hersch au Sunside le 21 et le 22 avec les musiciens de son trio habituel, John Herbert à la contrebasse et Eric Mc Pherson à la batterie. Né en 1955, Hersch est un des plus grands pianistes de la planète jazz. Il excelle sur tous les tempos, expose souvent plusieurs lignes mélodiques au sein d’un même morceau et parvient à rendre sa musique si fluide que l’on en oublie sa complexité. Il peut tout aussi bien reprendre un standard qu’un classique du bop dont il renouvelle les harmonies. Souvent dédiées à des familiers ou à des artistes qu’il admire, ses compositions aux progressions d’accords souvent labyrinthiques bénéficient de la douceur de son phrasé. Enregistré en solo, “Open Book” (Palmetto), son disque le plus récent, fera l’objet d’une prochaine chronique dans ce blog.  

-Légende du piano né à Memphis en 1936, Harold Mabern est attendu au Duc des Lombards avec le saxophoniste ténor Eric Alexander le 27 et le 28 (19h30 et 21h30). Ils se sont déjà produits au Duc avec Darryl Hall qui tiendra à nouveau la contrebasse, Bernd Reiter assurant la batterie. Influencé par Phineas Newborn son mentor auquel il dédia une de ses compositions Blues for Phineas, le pianiste joue un bop puissant et solidement rythmé. Une main gauche percussive assure les basses ; la droite plaque des accords et joue d’élégantes lignes mélodiques. Le jeu lyrique imprégné de blues d’Eric Alexander convient très bien à ce grand du piano.

-Le 29 à 21h00, Diego Imbert fêtera au Studio de l’Ermitage la sortie de son nouvel album “Tribute to Charlie Haden” (Trebim Music). Vous en lirez ma chronique dans le numéro de novembre de Jazz Magazine. Au cœur du disque, Enrico Pieranunzi (piano), André Ceccarelli (batterie) et Diego à la contrebasse. Arrangés par Pierre Bertrand, des cordes (violons et violoncelles), une flûte, une clarinette (Stéphane Chausse) et un hautbois complètent l'orchestration. Ils seront bien sûr sur scène pour jouer la musique de ce très bel opus.

-Aldo Romano au Triton le 30 avec les deux trios qui l’accompagnent sur deux albums de la collection Live au Triton. Publié en 2015, “Liberi Sumus” fait entendre Vincent Lê Quang aux saxophones et Henri Texier à la contrebasse dans un programme entièrement improvisé. Édité récemment, “Mélodies en noir & blanc”, un recueil de compositions du batteur, réunit le pianiste Dino Rubino, Michel Benita à la contrebasse et Aldo. Chanté par ce dernier, le dernier morceau du disque, une reprise de Gérard Manset Il voyage en solitaire, est particulièrement émouvant.

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-New Morning : www.newmorning.com

-La Cigale : www.lacigale.fr

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Palais des Congrès : www.viparis.com/fr/site/palais-des-congres-paris

-Salle Pleyel : www.sallepleyel.com

-La Seine Musicale : www.laseinemusicale.com

-Studio de l’Ermitage : www.studio-ermitage.com

-Le Triton : www.letriton.com

 

 

Crédits photos : Antonio Faraò / Stéphane Kerecki / Daniel Humair, Ambrose Akinmusire, Larry Willis, Fred Hersch, Harold Mabern & Eric Alexander © Philippe Marchin – Ahmad Jamal © Jean-Marc Lubrano – Leïla Olivesi © Solène Person – Lew Tabakin © Hans Speekenbrink.nl – Stacey Kent © Benoît Peverelli – Diego Imbert © C.C. Cordat – Jean-Paul Celea / Dave Liebman / Émile Parisien / Wolfgang ReisingerThe Riverside Quartet + Carla Bley © Photos X/D.R.

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16 octobre 2017 1 16 /10 /octobre /2017 08:50
Une quinzaine qui interpelle

Dizzy Gillespie pour président : le trompettiste aurait fait un bien meilleur chef d’état que le Donald aujourd’hui au pouvoir. Il se présenta par deux fois à la présidence des Etats-Unis (1964 et 1972). Sans succès malgré sa notoriété. Car Dizzy ne fut pas seulement le musicien qui rendit populaire le be-bop, il fut aussi son ambassadeur. À partir de 1956, le Département d’État le chargea de faire connaître le nouveau jazz au Moyen-Orient, en Amérique du Sud, en Yougoslavie et en Grèce. Détenteur de la National Medal of Arts, Commandeur des Arts et des Lettres, Dizzy Gillespie, né le 21 octobre 1917, aurait eu cent ans dans quelques jours. Que sa musique soit aujourd’hui moins jouée que celle de Thelonious Monk, n’explique pas l’étrange silence qui entoure cet anniversaire. Les hommages pleuvent sur le pianiste dont on fête le centenaire de la naissance (il est du 10 octobre 1917) et Jazz Magazine lui consacre ce mois-ci un volumineux dossier. Rien sur Dizzy, oublié dans ce concert de louanges, sauf par la page Facebook de l'Académie du Jazz*. Il est encore temps de réparer cette injustice.

 

Jazz sur Seine c’est parti ! Entre le 13 et le 28 octobre, à l’initiative de l’association Paris Jazz Club, les clubs de la capitale et de l’île de France s’associent pour nous offrir des concerts à prix doux. Je vous en ai parlé au début du mois. Reportez-vous à mon dernier édito. L’autre événement incontournable d’octobre pour l’amateur de jazz, c’est le festival Jazz en Tête de Clermont-Ferrand, le seul de l’hexagone qui programme du jazz en majorité afro-américain. Point de musiques invertébrées qui remplissent amphithéâtres, vélodromes, pots de yaourt, boîtes à chaussures, grands magasins et ascenseurs mais un jazz inventif qui, nullement coupé de ses racines, ressemble encore à du jazz.

 

* Académie du Jazz / Facebook : http://fr-fr.facebook.com/academiedujazz/  

-Bruno Angelini & Stephan Oliva en solo le 17 (20h00) à la Cité Internationales des Arts (18 rue de l’Hôtel de Ville 75004 Paris – Billetterie sur place. Tarif unique : 10€). Un double concert au cours duquel le jazz se penchera sur des musiques de films. Bruno Angelini poétisera deux partitions d’Ennio Morricone, “Il était une fois la révolution et “Le bon, la brute et le truand deux films de Sergio Leone. Sorti en 2015, “Leone Alone”, est toujours disponible sur www.illusionsmusic.fr. Cinéphile passionné, Stephan Oliva jouera des œuvres de Bernard Herrmann qu’Alfred Hitchcock a souvent fait travailler. Hélas épuisé, l’album qu’il lui a consacré en 2007, “Ghosts of Bernard Herrmann”, s’impose par ses relectures décalées, les jeux d’ombre et de lumière qu’il projette sur une musique teintée de noir.

-Le trompettiste Wallace Roney au New Morning le 18 (et au festival Jazz en Tête de Clermont-Ferrand le 26), avec Emilio Modeste au saxophone ténor, Oscar L. Williams Jr. au piano, Curtis Lundy à la contrebasse et Eric Allen à la batterie, presque le groupe qui l’accompagna au Sunside en mars dernier, Modeste étant un nouveau venu. Miles Davis lui offrit sa trompette lors du dernier concert qu’il donna à Montreux. Il brilla au sein de la formation du batteur Tony Williams (quintette puis sextette) dans les années 80, et enregistra quantité d’albums sous son nom dont les derniers sont malheureusement mal distribués en France. Produit par Teo Macero et enregistré en 1995 avec déjà Eric Allen à la batterie, “The Wallace Roney Quintet” (Warner Bros.) reste pour moi une de ses grandes réussites.

-Danilo Pérez (piano), John Patitucci (contrebasse) et Brian Blade (batterie) au New Morning le 18. Ils accompagnent Wayne Shorter depuis des années, se pliant aux bizarreries du grand saxophoniste, donnant souvent une direction à sa musique totalement improvisée. Ces trois grands musiciens ont donc une grande habitude de jouer ensemble et leurs concerts pleins de surprises car d’une grande interactivité peuvent se révéler très créatifs. On attend donc une suite à “Children of The Light” (Mack Avenue 2015), leur seul album à ce jour en trio.

-Sylvain Rifflet au Flow le 19 (20h30), une péniche amarrée rive gauche, 4 Port des Invalides, contenant restaurant et salle de spectacle. Un concert donné à l’occasion de la sortie de “Re-Focus” son nouvel album, mon coup de cœur de la rentrée (vous lirez ma chronique dans le numéro d’octobre de Jazz Magazine). Le modèle est bien sûr “Focus” que Stan Getz enregistra pour Verve, en 1961, un disque à part dans sa discographie et l’un de ses chefs-d’œuvre. Hommage à Getz “Re-Focus” est toutefois un autre disque. Il contient de nouveaux morceaux superbement arrangés par Fred Pallem (le Sacre du Tympan) et n’est nullement un pastiche. Sylvain Rifflet l’interprétera sur scène avec les cordes de l’Ensemble Appassionato que dirige Mathieu Herzog, présentes dans l’enregistrement, Florent Nisse à la contrebasse et Guillaume Lantonnet à la batterie remplaçant Simon Tailleu et Jeff Ballard, la section rythmique de cet album étonnant.

-Le samedi 21 à 20h00, dans le cadre de l’émission Jazz sur le Vif, le Studio 104 de Radio France accueille le pianiste Hervé Sellin pour fêter en big band le centième anniversaire de la naissance de Thelonious Monk (il aurait eu 100 ans le 10 octobre). Sa musique arrangée par Hall Overton, Monk se produisit à deux reprises en grande formation. La première en février 1959 au Town Hall de New York et la seconde en décembre 1963 au Philharmonic Hall du Lincoln Center. Les deux concerts furent enregistrés. C’est le répertoire que Monk joua au Town Hall que reprend Sellin qui, lui-même au piano, a réuni autour de lui Nicolas Folmer (trompette), Lucas Spiler (trombone), Pierrick Pédron, Rick Margitza et André Villéger (saxophones), Armand Dubois (cor), Franz Langlois (tuba), Thomas Bramerie (contrebasse), et Philippe Soirat (batterie). Le quartette de Pierrick Pédron (je donne les noms de ses musiciens dans la notice que je lui consacre dans cette même rubrique) assurera la première partie de ce concert événement.

-Studio d’enregistrement, mais aussi label, La Buissonne fête le 23 octobre au New Morning son trentième anniversaire. Marc Copland, Stephan Oliva, Bill Carrothers, Bruno Angelini, pianistes que j’apprécie y ont enregistré mais aussi nombre de musiciens qui inventent une musique séduisante et souvent inclassable, de la musique improvisée, du jazz de chambre, de la musique tout simplement. Philippe Ghielmetti et Jean-Jacques Pussiau, aujourd’hui retiré ont fait confiance à Gérard de Haro pour enregistrer des disques inoubliables. Le label La Buissonne accueille les musiciens amis, une certaine avant-garde qui sait prendre des risques. Il y aura du monde au New Morning le 23 au soir, le label publiant à cette occasion sa trentième référence “Bandes Originales” de Vincent Courtois. Ce dernier en jouera la musique avec Daniel Erdman et Robin Fincker (saxophones) qui l’accompagnent dans ce nouvel album, librement inspiré par des bandes-son plus ou moins célèbres. D’autres musiciens seront aussi sur scène à l’occasion de cet anniversaire. Inscrits sur l’affiche, leurs noms ne peuvent laisser indifférents.

-On retrouve le saxophoniste (alto) Pierrick Pédron au Duc des Lombards pour fêter la sortie de “Unknown” (Crescendo), un album que Pierrick a enregistré avec Carl-Henri Morisset au piano, Thomas Bramerie à la contrebasse et Greg Hutchinson à la batterie. Ils seront avec lui au Duc les 23, 24 et 25 octobre (2 concerts par soir, 19h30 et 21h30) et nous aussi. Car ce vrai disque de jazz est probablement le meilleur opus du saxophoniste. Les ballades sont particulièrement réussies. Carl-Henri, vingt-trois ans, épaule Pierrick au piano. Ses doigts agiles colorent la musique, surprennent par ses harmonies et ses accords inattendus. Un quartet à découvrir sur scène .

Maison de la Culture de Clermont-Ferrand, salle Jean Cocteau :

Festival Jazz en Tête 30ème édition du 24 au 28 octobre.

 

Mardi 24 : Tigran Hamasyan (piano, en solo) – Charenée Wade (chant) avec TBE (saxophone alto), Darryl Hall (contrebasse) et Justin Faulkner (batterie). Mercredi 25 : Baptiste Herbin (saxophones alto et soprano) en quintette avec Renaud Gensane (trompette), Eduardo Farias (piano), Darryl Hall (contrebasse) et Justin Faulkner (batterie) – Eric Harland (batterie) avec James Francies (piano et claviers). Jeudi 26 : Logan Richardson (saxophone alto) en trio avec Joe Sanders (contrebasse) et Jeff Ballard (batterie) – Wallace Roney (trompette) en quintette avec Emilio Modeste (saxophone ténor), Oscar L. Williams Jr. (piano), Curtis Lundy (contrebasse) et Eric Allen (batterie). Vendredi 27 : E.J. Strickland (batterie) en quintette avec Marcus Strickland (saxophone ténor), Godwin Louis (saxophone alto), Taber Gable (piano) et Josh Ginsburg (contrebasse) – Donald Brown (piano) avec Steve Nelson (vibraphone), Ed Cherry (guitare), Robert Hurst (contrebasse), Eric Harland (batterie) + invités. Samedi 28 : Massif Collectif avec Davy Sladek (saxophones soprano et alto), Franck Alcaraz (saxophone ténor), Yannick Chambre (Fender Rhodes), Dominique Mollet (contrebasse) et Marc Verne (batterie) – Roy Hargrove (trompette) en quintette avec Justin Robinson (saxophone & flûte), Tadataka Unno (piano), Ameen Saleem (contrebasse) et Quincy Phillip (batterie).

 

-À l’occasion de Jazz en Tête, le photographe Michel Vasset à qui l’on doit de très belles photos en noir et blanc (voir l’affiche ci-contre) expose Salle Gaillard, 2 rue Saint Pierre, du 6 octobre au 11 novembre, plus de 200 photographies retraçant l’histoire du festival.    

-Directeur artistique du nouveau disque de Pierrick Pédron, le pianiste Laurent De Wilde sort aussi un album en octobre. Comme son nom l’indique, “New Monk Trio” (Gazebo / L’Autre Distribution) est entièrement consacré à Thelonious Monk. Laurent en a joué le répertoire au Sunside en février dernier avec les musiciens qui l’ont enregistré avec lui, Jérôme Regard à la contrebasse et Donald Kontomanou à la batterie. Ils sont programmés au Bal Blomet le 26, pour y désosser les compositions de Monk, en modifier les tempos, en altérer les formes. On peut faire confiance à Laurent De Wilde qui, l'ayant longuement étudié, disséqué et digéré, connaît sa musique mieux que personne. Loin de la paraphraser, il l'a arrangée à sa manière, donnant d’autres couleurs, d’autres rythmes aux thèmes familiers d'un compositeur abondamment fêté ces jours-ci.

-Réunissant Pierre Perchaud (guitare), Nicolas Moreaux (contrebasse) et Jorge Rossy (batterie) le trio Fox s’est associé avec le saxophoniste Chris Cheek pour enregistrer un second album, “Pelican Blues”, pour le label jazz&people. Un opus en vente depuis le 6 octobre. Ils en joueront les morceaux au Studio de l’Ermitage le 26 (21h00) avec un autre invité, Vincent Peirani à l’accordéon, également présent dans le disque. L’instrument s’y prête car sa musique est une sorte de rêverie sur les musiques entremêlées de la Louisiane  blues, cajun, zydeco , terre longtemps nourrie de culture française.

-Marc Copland au Sunside le 28. Le pianiste n’a pas joué à Paris depuis août 2016, un concert au New Morning au sein du groupe du regretté John Abercrombie. C’est en solo qu’il est attendu dans un club qu’il connaît bien et qui l’accueille régulièrement. Membre du trio du bassiste Gary Peacock qui vient de sortir un des meilleurs disques de sa longue carrière, Marc possède désormais son propre label, InnerVoiceJazz et édite ses propres disques qui ne sont pas distribués en France. Deux albums sont parus cette année : “Better By Far” en quartette avec Ralph Alessi (trompette), Drew Gress (contrebasse) et Joey Baron (batterie) et “Nightfall” en solo. C’est probablement le répertoire de ce dernier qu’il interprétera. Outre de nouvelles compositions très réussies, ce nouvel opus contient deux thèmes d’Abercrombie, un de Ralph Towner et une belle reprise de Jade Visions de Scott LaFaro.

-Guilhem Flouzat au Sunside le 30 octobre et le 1er novembre. Compositeur, arrangeur et batteur, il a enregistré en 2016 pour Sunnyside 9 portraits de musiciens amis. L’un d’entre eux est Desmond White, son bassiste,. C’est avec lui et le pianiste Sullivan Fortner qu’il est attendu dans un Sunside rénové pour fêter la sortie de leur disque en trio. Entièrement consacré à des standards, “A Thing Called Joe” (Sunnyside / Socadisc) rassemble des mélodies naguère popularisées par Frank Sinatra (There’s No You), Doris Day (When I Fall In Love), Peggy Lee et Ella Fitzgerald (Hapiness is a Thing Called Joe, un extrait de la comédie musicale “Cabin in the Sky” qui vit le jour en 1943). A ce répertoire s’ajoutent des compositions de Thelonious Monk, Jaki Byard et Joe Zawinul, Midnight Mood figurant dans “Money in the Pocket”, un de ses disques des années 60. Sur un tel répertoire, Sullivan Fortner fait des merveilles et se montre bien plus convaincant que dans son propre disque publié l’an dernier sur le label Impulse. Jouant de délicates notes perlées dans There’s No You, une ballade au tempo très lent, il colore subtilement la musique, adopte un jeu varié et inattendu et, dans Walking My Baby Back Home que chanta si bien Nat King Cole, introduit une dose d’humour appréciable. Une rythmique en apesanteur, aussi souple qu’inventive, chemine avec lui. Quarante précieuses minutes de bonne musique. 

-New Morning : www.newmorning.com

-Le Flow Paris : www.flow-paris.com

-Radio France - Jazz sur le Vif : www.maisondelaradio.fr/concerts-jazz

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Jazz en Tête : www.jazzentete.com

-Le Bal Blomet : www.balblomet.fr

-Studio de l’Ermitage : www.studio-ermitage.com

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

 

Crédits Photos : Sylvain Rifflet © Sylvain Gripoix – Thelonious Monk © Getty Images – Pierrick Pédron, Trio Fox + Chris Cheek & Vincent Peirani © Philippe Marchin – Marc Copland © Guido Werner – Dizzy Gillespie, Wallace Roney, Danilo Pérez / John Patitucci / Brian Blade, Laurent De Wilde © Photos X/D.R.

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2 octobre 2017 1 02 /10 /octobre /2017 10:09
De gauche à droite : Ambrose Akinmusire, Vincente Archer, Walter Smith III, Lionel Loueke, Robert Glasper & Eric Harland - Clermont-Ferrand 2006 - © Michel Vasset

De gauche à droite : Ambrose Akinmusire, Vincente Archer, Walter Smith III, Lionel Loueke, Robert Glasper & Eric Harland - Clermont-Ferrand 2006 - © Michel Vasset

Octobre. Les feuilles mortes s’amoncellent et se ramassent à la pelle, les érables prennent la couleur de l’aurore et, sous un cortège de nuages gris saturés de pluie, les champignons champignonnent. Les concerts aussi. Il y en a tant à Paris que mes « Concerts qui interpellent » ne portent que sur les quinze premiers jours du mois – vous patienterez jusqu’au 15 pour connaître ceux de la seconde quinzaine d’octobre que je vous recommande, un choix subjectif mais qui peut aussi être le vôtre. À l’initiative de l’association Paris Jazz Club, 25 clubs de la capitale et de l’île de France (Le Triton, le Carré Bellefeuille, l’Espace Carpeaux de Courbevoie) proposent la 6ème édition de leur festival Jazz Sur Seine, rendez-vous annuel désormais incontournable de notre automne culturel. Pour seulement 40€, un « pass » à utiliser dans trois lieux différents donne accès à trois concerts, une « offre découverte » étant également proposée aux étudiants, demandeurs d’emploi et élèves de conservatoires. Rassemblant 450 musiciens, 180 manifestations musicales vous sont ainsi proposées entre le 13 et le 28 octobre. Une soirée « showcases » en entrée libre est également prévue le 17 dans les clubs de la rue des Lombards. Ne manquez pas les concerts de Frédéric Nardin et d’Aaron Goldberg (mes « concerts qui interpellent » ne les ont pas oubliés) en attendant de découvrir à la mi-octobre la totalité de ma sélection du mois.

 

L’autre événement d’octobre, c’est le 30ème anniversaire de Jazz en Tête, le festival pas comme les autres, que la Maison de la Culture de Clermont-Ferrand abritera entre le 24 et le 28. Vous trouverez la programmation complète sur le site du festival en attendant que je vous la transmette. Son directeur artistique, Xavier « Big Ears » Felgeyrolles, le chef indien du massif central, en a, comme chaque année, préparé le programme. Tigran Hamasyan, Wallace Roney, Donald Brown et Roy Hargrove sont les têtes d’affiche de cette 30ème édition. Tigran mis à part, ce sont tous des afro-américains, « Big Ears » privilégiant un jazz en osmose avec ses racines, son canal historique. Il reste toutefois ouvert à un jazz européen de qualité. La liste impressionnante et incomplète des musiciens européens invités depuis trente ans que je vous communique ci-dessous en témoigne*. Car si « Big Ears » a bien sûr ses préférences (ce jazz ancré dans la tradition pour lequel il bataille depuis des années), il a aussi des oreilles, des grandes, l’aspect qualitatif de la musique ne leur échappant pas. On ne sait trop où il est allé les chercher, mais il nous a aussi fait découvrir de grands musiciens, et pas seulement de la grande Amérique. Robert Glasper (en 2003), Lionel Loueke (en 2004), Ambrose Akinmusire & Walter Smith III (en 2006), Gregory Porter (en 2011), Cory Henry (en 2014) ont tous donné leur premier concert français à Jazz en Tête. Bon anniversaire Monsieur Felgeyrolles.

 

* Franck AmsallemStéphane & Lionel Belmondo Pierre de Bethmann Pierre Boussaguet André Ceccarelli Laïka Fatien Richard GallianoStéphane GuillaumeBaptiste HerbinDaniel HumairAlain Jean-MarieBireli LagrèneGéraldine LaurentEric LegniniJulien Lourau Sylvain LucGrégoire MaretGilles NaturelPierrick PédronVincent PeiraniMichel PetruccianiEnrico PieranunziJean-Michel PilcMichel PortalManuel Rocheman Aldo RomanoHervé SellinMartial SolalJacky TerrassonToots ThielemansAndré VillégerLaurent De Wilde.

 

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT (première quinzaine d’octobre)

-Le 3 au Sunside, André Villéger (saxophones), Philippe Milanta (piano) et Thomas Bramerie (contrebasse) fêtent la sortie de “Strictly Strayhorn” (Camille Productions), disque consacré comme son nom l’indique à la musique de Billy Strayhorn. Villéger et Milanta nous ont déjà régalé l’an dernier avec “For Duke and Paul” (Duke Ellington et Paul Gonsalves), un album également produit par Michel Stochitch que je salue ici. Nouveau Président de la Maison du Duke, Claude Carrière en a de nouveau rédigé les notes de pochette, donnant quantité d’informations sur les compositions de Strayhorn que contient ce nouvel opus. Lotus Blossom, Lush Life et Passion Flower en sont les plus célèbres. André Villéger qui utilise plusieurs saxophones les reprend successivement au soprano, ténor et baryton. Auteur d’une bonne partie des arrangements de l’album, il joue aussi de la clarinette basse et nous offre avec Cap Strayhorn, écrit pour cette séance qu’il aborde avec suavité au ténor, un joli portrait musical du compositeur. Philippe Milanta fait de même avec Exquise, une délicieuse ballade aux tendres couleurs harmoniques. Ce jazz certes classique et donc indémodable est à écouter sans modération.

-Enrico Pieranunzi au Sunside les 6 et 7 octobre. En trio avec toujours André Ceccarelli à la batterie (personne ne s’en plaindra) mais Diego Imbert laissant la contrebasse à Darryl Hall. Enrico est un peu chez lui au Sunside. Il y joue souvent, les nombreux admirateurs de son merveilleux piano (je suis l’un d’entre eux) s’y pressant pour l’entendre. Très demandé mais souvent oublié par les festivals de l’hexagone, le maestro enregistre beaucoup. Il tient le piano dans “Tribute to Charlie Haden, un disque de Diego Imbert qui sort ces jours-ci. André Ceccarelli en est le batteur. Pierre Bertrand a arrangé la moitié du disque, des plages au sein desquelles des cordes et des bois s’ajoutent au trio. Enrico s’y montre éblouissant et apporte beaucoup à l’album. Ecoutez son piano dans In the Wee Small Hours of the Morning. De la grande musique tout simplement.

-Diana Krall à l’Olympia du 7 au 9 octobre. Après plusieurs albums dans lesquels elle aborde d’autres musiques, la chanteuse est revenue au jazz au début de cette année avec “Turn Up the Light, un disque entre swing et glamour produit par Tommy LiPuma qui devait décéder peu de temps après son enregistrement. On y retrouve ses musiciens habituels, les guitaristes Russell Malone et Anthony Wilson, le pianiste Gerald Clayton, le batteur Jeff Hamilton. Le disque n’est toutefois pas aussi convaincant que ses grands opus, “When I Look in your Eyes”, “The Look of Love” et “The Girl in the Other Room”, le seul dans lequel elle s’essaye à la composition. En outre, le prix très élevé des places (de 79,50€ à 156,50€ !!!) est pour le moins dissuasif.

-Refait à neuf, le Bal Blomet (33 rue Blomet 75015 Paris) programme du jazz avec le 12 octobre à 20h30 le nonet du pianiste Laurent Marode, auteur d’un album très réussi publié en début d'année chez Black & Blue. Arrangé avec talent et plein de bonnes idées, “This Way Please” swingue avec élégance, la présence d’un vibraphone donnant une touche originale à une musique aux arrangements très soignés. Pour l'accompagner rue Blomet, la même fine équipe que celle du disque, Fabien Mary (trompette), Jerry Edwards (trombone), Luigi Grasso (saxophone alto), David Sauzay (saxophone ténor), Frank Basile (saxophone baryton), Nicholas Thomas (vibraphone), Fabien Marcoz (contrebasse) et Mourad Benhammou (batterie). On peut difficilement trouver mieux.

-Le 13, Daniel Humair (batterie) Stéphane Kerecki (contrebasse) et Vincent Lê Quang (saxophone) fêtent au cinéma Le Balzac (1, rue Balzac 75008 Paris), la sortie de “Modern Art” (Incises), album de moments musicaux composés au regard d’une sélection d’œuvres de peintres du XXème siècle, des amateurs de jazz pour la plupart. Jackson Pollock, Bram Van Velde, Pierre Alechinsky, Cy Twombly et quelques autres dont les travaux sont reproduits dans le livret grand format accompagnant le disque inspirent au trio une musique aventureuse en correspondance avec les formes, les couleurs, les paysages intérieurs de ces peintres visionnaires. Consacré à la peinture et à la musique de Daniel Humair, “En résonnance”, film de Thierry Le Nouvel (52 minutes), sera projeté à cette occasion.

-De grands pianistes sont attendus au Sunside ce mois-ci. Parmi eux, Aaron Goldberg s’y produit trois soirs de suite (le 13 et le 14 à 21h30 et le 15 à 20h00) avec Yasuchi Nakamura à la contrebasse et Leon Parker à la batterie. C’est avec lui qu’Aaron a donné ses derniers concerts parisiens au Duc des Lombards en octobre 2015. Il n’a pas enregistré sous son nom depuis “The Now” (Sunnyside) en 2014, un recueil de compositions personnelles qui voisinent avec des standards du bop, des pièces sud-américaines et un morceau traditionnel haïtien. On n’est jamais déçu par ses prestations souvent enthousiasmantes en trio, format qui lui permet de révéler pleinement ses harmonies raffinées et la richesse de son jeu pianistique.

-Le 13 et le 14 au Duc des Lombards, club dans lequel il se produit souvent, Fred Nardin jouera le répertoire de son premier disque en trio en vente depuis le 15 septembre. Avec lui, Or Bareket à la contrebasse et Rodney Green à la batterie, ce dernier remplaçant Leon Parker indisponible. “Opening” (Jazz Family) contient des compositions originales, deux reprises de Thelonious Monk et une remarquable version de You’d Be So Nice to Come Home to, un morceau de Cole Porter qui témoigne de la grande maturité de ce jeune pianiste (Prix Django Reinhardt de l’Académie du Jazz l’an dernier), de l’ancrage de son instrument dans la tradition. D’autres thèmes méritent également l’attention Lost in Your Eyes et Hope sont des ballades très réussies. Porté par un rythme irrésistible, Travel To… révèle une petite mélodie espiègle et chantante et raconte une histoire. C’est du très beau piano, même si Fred Nardin s’abandonne parfois à tricoter trop de notes, à exhiber une virtuosité qu’il n’a plus à prouver. On lui pardonne aisément ce péché de jeunesse.

-Jazz en Tête : www.jazzentete.com

-Sunset-Sunside : www.sunset-sunside.com

-Olympia : www.olympiahall.com

-Le Bal Blomet : www.balblomet.fr

-Cinéma Le Balzac : www.cinemabalzac.com

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

 

Crédits Photos : Ambrose Akinmusire / Vincente Archer / Walter Smith III / Lionel Loueke / Robert Glasper & Eric Harland © Michel Vasset – Enrico Pieranunzi © Stefano Cioffi – Vincent Lê Quang / Daniel Humair / Stéphane Kerecki © Olivier-Charles Degen – Aaron Goldberg © Dominique Rimbault. 

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5 septembre 2017 2 05 /09 /septembre /2017 09:59
En marche

Septembre. L’air un peu plus frais fait du bien aux bronches. Les marcheurs respirent mieux. Certains marchent à l’ombre, d’autres à droite. Même la République s'est mise à marcher. Il était temps ! C’est toutefois la gauche qui a le plus d’expérience dans ce domaine. Leurs longues marches à pied les dispensent de tout régime. Excellentes pour l’hygiène générale, elles réduisent les toxines et musclent les jambes. Les Insoumis qui la pratiquent assidûment nous promettent une rentrée sportive. De longs déplacements les verront battre interminablement les pavés parisiens. De bonnes chaussures sont conseillées. Attention aux attaques des indiens, aux piqûres de moustiques. Le chameau de bât est recommandé pour les très longs trajets. Le Paris - Caracas formellement déconseillé. Leur « líder máximo » ne marche pas sur l’eau.  

 

La grande majorité des français aspire toutefois à une rentrée plus calme, à des chants moins guerriers. Elle se fait à petits pas, doucement, tout doucement car, bien qu’un peu voilé, le soleil brille encore dans le bleu du ciel et invite à sortir. L’amateur de jazz en profite pour voler encore un peu de temps au temps avant de reprendre son travail, ses habitudes. Propice à des plongées dans la musique, la période estivale m’a donné l’occasion de réécouter des œuvres classiques. Les “13 Barcarolles” et les “Nocturnes” de Gabriel Fauré, mais aussi son “Second quintette pour piano et cordes opus 115” dont le troisième mouvement, une andante moderato, est une page admirable de la musique française. Se replonger dans Brahms (ses “10 Intermezzi pour piano” par Glenn Gould, disque que me fit connaître le pianiste Guillaume de Chassy), dans les quatuors à cordes méconnus de Carl Nielsen et de Joseph-Ermend Bonnal, (ce dernier écrivit aussi sous pseudonyme des pièces de ragtime), ou dans les œuvres pour piano de Jean Cras et de Gabriel Dupont (“Les Heures Dolentes”) procure un bonheur indicible.

 

Je n’en ai pas pour autant négligé le jazz, me penchant sur quelques disques déjà anciens de Tethered Moon. Seul survivant de ce trio qui comprenait les regrettés Masabumi Kikuchi et Paul Motian, Gary Peacock publie chez ECM “Tangents”, un des grands disques de cette rentrée. Très présente, sa contrebasse n’a jamais été aussi bien enregistrée. À la batterie, Joey Baron colore subtilement une musique que le piano de Marc Copland rend étonnamment abstraite. Vous lirez ma chronique de cet album dans le numéro de septembre de Jazz Magazine. Les sorties de disques se faisant plus rares, l’été m’a également permis de redécouvrir quelques trésors de ma discothèque. Parmi eux, “Dreamer” du pianiste Russ Lossing, un de ses premiers opus ; “Line On Love” du saxophoniste Marty Ehrlich (avec Craig Taborn au piano), un enregistrement de 2002 que Gilles Coquempot (Crocojazz) me fit découvrir ; “First Meeting” du bassiste Miroslav Vitous et “Illusion Suite” de Stanley Cowell, deux vinyles ECM. À l’heure du triomphe des musiques invertébrées, de la sous-culture de masse, jazz et classique sont des chefs-d’œuvre en péril dont il semble urgent de conserver la mémoire. Souhaitons qu’ils ne soient pas oubliés. 

 

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

-Jazz à La Villette 2017 : il y en a pour tous les goûts, le festival, largement ouvert à toutes sortes de musiques se poursuivant jusqu’au 13 septembre. Le 8, Laurent de Wilde retrouve son complice Ray Lema à la Cité de la Musique (20h00) pour un duo de piano au sommet. Ils ont enregistré un bien beau disque l’an dernier, mais leurs concerts leurs permettent d’aller plus loin, d’associer plus étroitement encore rythmes et mélodies colorées, d’exprimer librement les musiques qui leur trottent dans la tête. – Le dimanche 10, Dianne Reeves (photo) s’offre la Grande Halle de La Villette (19h00). La chanteuse reste une valeur sûre du jazz afro-américain. Une déjà longue et fructueuse carrière en témoigne. – Le 12, Archie Shepp, 80 ans, est attendu à la Philharmonie (20h00). Un duo avec le pianiste Jason Moran constituera la première partie de son concert. Puis, Olivier Miconi (trompette), Amina Claudine Myers (orgue et piano), Wayne Dockery (contrebasse), Hamid Drake (batterie) et un chœur entoureront le saxophoniste dans un hommage au gospel. Si vous supportez mal et les fausses notes (et Shepp en joue beaucoup), allez plutôt écouter la veille (le 11) à la Cité de la Musique (20h00) le New Jawn Quartet de Christian McBride, admirable bassiste dont le jazz moderne reste ancré dans la tradition. Avec lui au sein d’un quartette sans piano, deux souffleurs expérimentés : Josh Evans (trompette) et Marcus Strickland (saxophone), une vieille connaissance. A la batterie, Nasheet Waits est également bien connu des amateurs de jazz. Avec McBride, il forme une paire rythmique éblouissante qui donne des ailes à la musique.

-Musicien trop discret, Vincent Bourgeyx est attendu au Duc des Lombards les 18 et 19 septembre (19h30 & 21h30). Avec lui, les musiciens de “Short Trip (Fresh Sound), son dernier album, un disque de jazz comme on aimerait en entendre souvent. Matt Penmann (James Farm) à la contrebasse, Obed Calvaire (souvent avec Monty Alexander) à la batterie, mais aussi David Prez, le saxophoniste de la séance, deux plages de “Short Trip bénéficiant également de la chanteuse Sara Lazarus. Très à l’aise avec le blues, le pianiste, pose de belles couleurs sur une musique dont il connaît l’histoire et qui n’a pour lui plus de secrets, un jazz moderne imbibé de swing et de notes bleues mais aussi lyrique et tendre comme en témoigne les ballades qu’il transcende, arc-en-ciel de son répertoire éclectique.

-Anne Ducros et Christian Escoudé au Sunset les 22 et 23 (21h00). Avec ces deux là, on est sûr de passer une soirée inoubliable, voire deux, leur association inédite se poursuivant deux soirs. Cela fait des années que Christian fait chanter sa guitare. Quant à Anne, c’est la meilleure de nos chanteuses de jazz : une diction parfaite, un scat éblouissant mais aussi une manière unique de faire vivre les textes des chansons qu’elle reprend. Dans “Brother, Brother !”, son dernier disque, elle revisite des morceaux qu’elle apprécie depuis longtemps, des thèmes associés à Marvin Gaye, Sting, Joe Cocker, mais aussi à Juliette Gréco (Déshabillez moi) et à Yves Montand (La bicyclette), la bonne chanson française restant un vivier de mélodies inoubliables.

-Pianiste des deux derniers albums du trompettiste Avishai Cohen, un artiste ECM, Yonathan Avishai enregistre les siens avec ses musiciens et poursuit une fructueuse carrière sous son nom. Après “Modern Time” réalisé en trio, il a étoffé sa formation et enregistré l’an dernier un disque étonnant, “The Parade, nous menant dans les Caraïbes et à la Nouvelle-Orléans, un voyage au sein duquel son jeu de piano minimaliste aère un jazz raffiné au swing entêtant. Au Sunside le 23 (21h30), la chanteuse Monique Thomas rejoint sa formation habituelle, un quintette comprenant César Poirier (clarinette et saxophone alto), Yoni Zelnik (contrebasse), Donald Kontomanou (batterie) et Inor Sotolongo (percussions).

 

-Aldo Romano au Triton le 23 (21h00) avec Michel Benita à la contrebasse et Dino Rubino, pianiste à propos duquel le batteur ne tarit pas d’éloges. Les trois hommes ont enregistré au Triton un nouvel album “Mélodies en Noir & Blanc” dont ils fêtent la sortie. Aldo y reprend des titres de son répertoire, Song for Elis qu’il écrivit à la mémoire d’Elis Regina, Inner Smile qui donne son nom à un de ses albums, Dreams and Water qu’il enregistra plusieurs fois, la première en 1991 pour Owl Records, « (…) des morceaux que j’ai composés il y a un certain temps. Le temps passe, la musique reste, intemporelle. Intemporelle comme la chanson de Gérard Manset Il voyage en solitaire, que je chante ici mais qui chante en moi depuis la première fois que je l’ai entendue. »

-Habitué du Duc des Lombards – il y donna deux concerts en juin dernier –, le pianiste Dominique Fillon retrouve son club préféré les 26 et 27 septembre (19h30 et 21h30) pour rendre hommage à Al Jarreau, décédé cette année le 12 février à Los Angeles. Les musiciens de son trio habituel, Laurent Vernerey à la contrebasse (il joue dans l’électrique “Born in 68” publié en 2014, dernier disque à ce jour de Dominique) et Francis Arnaud à la batterie (présent dans “As It Comes”, un autre disque acoustique de Dominique), se verront rejoindre sur scène par le saxophoniste Yannick Soccal le 26 et le trompettiste Sylvain Gontard le 27.

-Jeremy Pelt au Sunside le 29 et le 30 pour souffler les notes brûlantes d’un bop moderne qu’il revendique et qu’il cisèle comme un orfèvre. Véloce et inspiré, ce trompettiste est un sculpteur de sons, des sons éphémères mais porteurs de swing et de lumière. Naguère membre du Mingus Big Band, du Roy Hargrove Big Band et du Village Vanguard Orchestra, accompagnateur de Nancy Wilson et des pianistes Cedar Walton et John Hicks, cet habitué du Festival Jazz en Tête a enregistré une dizaine de disques sous son nom. Victor Gould (piano), Vicente Archer (contrebasse), Jonathan Barber (batterie) et Jacquelene Acevedo (percussions) seront avec lui sur la scène du Sunside.

-Le samedi 30, dans le cadre de l’émission Jazz sur le Vif, le Studio 104 de Radio France fêtera les 20 ans du Jazz Ensemble, formation du contrebassiste Patrice Caratini. Des variations autour de la musique de Louis Armstrong en 1998 (“Darling Nellie Gray”), des chansons de Cole Porter en 2000 (“Anything Goes”), de la musique des îles (“Chofé biguine la” en 2001 et “Latinidad” en 2009), mais aussi des programmes consacrés à André Hodeir, au tandem Miles Davis / Gil Evans (“Birth of the Cool”), à Charles Mingus (“The black Saint And The Sinner Lady”), sont quelques-unes des créations / recréations que le Jazz Ensemble nous a offert en deux décennies. Cet anniversaire, Patrice le partagera bien sûr avec les musiciens d’un orchestre qui en a vu passer beaucoup. Parmi eux, les trompettistes Claude Egea et Pierre Drevet, le tromboniste Denis Leloup, les saxophonistes Matthieu Donarier et André Villéger, les pianistes Alain Jean-Marie et Manuel Rocheman. À la batterie Thomas Grimmonprez et Sara Lazarus aura mission des parties vocales. Je ne vous donne pas le nom du contrebassiste. C’est à 20h30 le 30 septembre. En trio, Matthieu Donarier (saxophones), Manu Codjia (guitare) et Joe Quitzke (batterie) assureront la première partie de ce concert exceptionnel.

-Jazz à la Villette : www.jazzalavillette.com

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-Le Triton : www.letriton.com

-Radio France - Jazz sur le Vif : www.maisondelaradio.fr/concerts-jazz

 

Crédits photos : Gary Peacock © Caterina di Perri / ECM – Dianne Reeves © Jerris Madison – Anne Ducros & Christian Escoudé, Dino Rubino / Michel Benita / Aldo Romano, Dominique Fillon © Philippe Marchin – Yonathan Avishai Quintet © Eric Garault – Jeremy Pelt © Hans Speekenbrink – Patrice Caratini © Jean-Yves Ruszniewski – Vincent Bourgeyx © Photo X / D.R.

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7 juillet 2017 5 07 /07 /juillet /2017 15:46
Adieu l'ami

Impitoyable faucheuse ! Après Philippe Adler et tant d’autres cette année, c’est Christian Bonnet qui s’en va là-haut retrouver nos chers et regrettés disparus. Claude Carrière me le présenta au début des années 90. Je préparais alors pour la Fnac Music la réédition des principaux enregistrements que John Hammond avait produit pour le label Vanguard. Né en 1945, Christian connaissait beaucoup mieux que moi ces disques historiques. Certaines faces de Jimmy Rushing comptaient beaucoup pour lui. Il les avait écoutées très jeune et en conservait pieusement le souvenir. Il travaillait place de l’Alma dans une agence de la Société Générale et c’est dans un restaurant proche de son bureau qu’il me remit des photocopies de toutes les pages concernant les années Vanguard du producteur, soit le 39ème chapitre de ses mémoires, “John Hammond On Record”, livre qui était alors difficile à trouver.

 

La rédaction de “Passeport pour le jazz” que j’écrivis un peu plus tard avec Philippe Adler fut une autre occasion de lui demander conseil. J’avais besoin de renseignements sur les grands orchestres de la « swing era » et il était parfaitement apte à me les fournir. Directeur de la collection Masters of Jazz, il rééditait depuis 1991 l’œuvre complète des grands de l’histoire du jazz. Une activité qu’il poursuivit avec BD Jazz puis avec la collection Cabu, ce dernier dessinant les pochettes. Saxophoniste, il joua pendant quarante ans dans les rangs du Swing Limited Corporation Big Band (SLC), orchestre dont Patrice Caratini fut un temps le bassiste. Ces dernières années, il possédait sa propre formation, le Black Label Swingtet pour laquelle il écrivait la plupart des arrangements. Membre de l’Académie du Jazz depuis 2009, il en devint le trésorier après la disparition de Jacques Bisceglia en 2013, réclamant patiemment aux retardataires leurs cotisations, s’occupant activement de cette institution.

 

D’humeur égale, Christian Bonnet ne se mettait jamais en colère. Diplomate, il ménageait les susceptibilités. Nos désaccords sur le jazz moderne, nos discussions passionnées sur la musique ne dégénéraient jamais en affrontements. Scrupuleusement honnête, il écoutait sur Deezer tous les disques appelés à concourir à l’Académie du Jazz. Nous avions depuis longtemps l’habitude de déjeuner ensemble tous les vendredi au Mékong près des arènes de Lutèce avec Francis Capeau, Philippe Etheldrède et Xavier « big ears » Felgeyrolles. Rejoint par Claude Carrière et occasionnellement par Philippe Coutant, notre petit groupe émigra au Petit Saigon, restaurant de la rue des Carmes que nous fit connaître Gilles Coquempot, présent lui aussi à nos agapes jazzistiques.

 

Très impliqué dans la bonne marche de la Maison du Duke, association qu’il présidait et dont il était également le trésorier, Christian Bonnet avait récemment contribué à rendre intelligible le message ducal en supervisant la traduction de “Music is my Mistress”, les mémoires de Duke Ellington. Opiniâtre, il était parvenu à les faire éditer en France, 43 ans après leur publication en Amérique. Sa disparition inattendue est douloureuse. Il laisse une veuve, deux fils et un grand vide. Je le vois encore à mon domicile où se réunissait souvent le Bureau de l’Académie, assis sur le fauteuil le plus solide dont je disposais car il était grand et possédait un physique athlétique comme le montre cette photo. Comment imaginer qu’il ne sera plus jamais avec nous lors de ces réunions conviviales qu’il ne manqua qu’une seule fois, la dernière, déjà appelé ailleurs, en une terra incognita dont personne n’est encore revenu.

 

Outre le décès à l’âge de 60 ans de Geri Allen, grande pianiste souvent présente dans ce blog – son disque “Flying Toward the Sound” (Motéma) fut un de mes 13 Chocs de 2010 –, j’apprends la disparition d’Alain Tercinet. Membre de l’Académie du Jazz, rédacteur et maquettiste de Jazz Hot pendant de longues années, collaborateur de Jazzman, Alain est l’auteur de plusieurs livres et de biographies remarquables – “Be-bop”, “Parker’s Mood”, “Stan Getz”. Sa contribution la plus importante à l’histoire du jazz reste son fameux “West Coast Jazz”, bible de tous les amateurs de jazz californien rééditée aux Éditions Parenthèses en 2015 dans une version modifiée et complétée. Alain signa également les notes de livret de la collection Jazz in Paris qu’Universal inaugura à l’automne 2000 et qui compte aujourd’hui plus de 130 références.

 

Comme chaque année, ce blog sera prochainement mis en sommeil jusqu’aux premiers jours de septembre. Vous en serez bien sûr avertis.          

 

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

-Originaire de Wilmington (Delaware) et depuis longtemps installée à Paris, Sarah Lazarus donne peu de concerts, enregistre parcimonieusement mais n’en est pas moins une grande chanteuse de jazz, une des meilleures. Pour vous en convaincre, écoutez “Short Trip, le dernier album du pianiste Vincent Bourgeyx. Les deux standards qui lui sont confiés comptent parmi les grands moments de ce très bel opus. I’ve Grown Accustomed To His Face a même rarement été aussi bien chanté. Le Sunside l’accueille le 8 juillet dans le cadre de la 26ème édition de l’American Jazz Festiv’Halles. Avec elle, Alain Jean-Marie au piano, Gilles Naturel à la contrebasse et Andréa Michelutti à la batterie. Personne ne s’en plaindra.

-Naguère batteur des groupes Weather Report et Steps Ahead, Peter Erskine a toujours recherché les aventures musicales. Ses quatre albums en trio pour ECM avec John Taylor et Palle Danielsson, ses deux opus avec Nguyên Lê et Michel Benita pour ACT et “Sweet Soul enregistré avec Joe Lovano, Kenny Werner et Marc Johnson sont de grandes réussites. Flirtant à nouveau avec la fusion, Erskine sera au Sunside le 11 avec The Dr. Um Band, formation avec laquelle il a enregistré deux albums. Le plus récent, “Second Opinion (Fuzzy Music), réunit Bob Sheppard (saxophone ténor), John Beasley (claviers) et Benjamin Sheperd (basses). Le batteur a fait le voyage avec eux. Ne manquez pas cette occasion inespérée de découvrir leur musique en concert.

-Laurent de Wilde et Ray Lema au Parc Floral de Vincennes (Espace Delta, 16h00) le 15 dans le cadre du Paris Jazz Festival. Se connaissant depuis longtemps, ils avaient toujours souhaité enregistrer ensemble. Ils l’ont fait l’an dernier, avec “Riddles” (Gazebo), duo de pianos dont la musique dansante associe avec bonheur rythmes et mélodies colorées. Le blues rencontre une mélodie traditionnelle du Sahel, une comptine se superpose à un ragtime de la Nouvelle Orléans. Le tango y croise le reggae. Dans cette invitation au voyage, l’Afrique y reste bien présente. Les cordes de son piano parfois enduites de Patafix, Laurent fait parfois sonner l’instrument comme un balafon. Loin d’un déluge de notes, la musique évite tout bavardage inutile et en sort constamment inventive.

-Le pianiste Joey Alexander au New Morning le 18 dans le cadre de son Festival All Stars. Né à Bali, ce jeune prodige de 14 ans a déjà enregistré deux albums sous son nom. Le premier contient une version époustouflante de Giant Steps. Beaucoup plus conséquent, “Countdown le second impressionne davantage. Émouvant dans ses ballades, éblouissant sur tempo rapide, l’adolescent possède une technique phénoménale et une vraie culture jazzistique. Les nombreux concerts qu’il donne à travers le monde lui ont permis de grandir, d’acquérir de l’assurance. On constatera les progrès accomplis en allant l’écouter rue des Petites-Écuries avec les musiciens de son trio, Alex Claffy à la contrebasse et Willie Jones III à la batterie.

-Buster Williams au Duc des Lombards le 19 et le 20 avec les musiciens de son quartette : Steve Wilson (saxophones), Georges Colligan (piano) et Kush Abadey (batterie). Né en 1942 dans le New Jersey, il reste l’un des grands bassistes de sa génération. Naguère membre des Jazz Crusaders et de la formation électrique d’Herbie Hancock (celle qui enregistra les sommets du genre que sont “Mwandishi”, “Crossings” et “Sextant”), il a joué avec les plus grands. Il possède une sonorité bien reconnaissable, tire de belles harmoniques de son instrument, la souplesse de son jeu de walking bass apportant une parfaite assise rythmique à la musique qu’il interprète.

-Le Gil Evans Paris Workshop au Sunside le 27. Les lecteurs de ce blog n’ignorent pas que Laurent Cugny a constitué il y a trois ans un nouvel orchestre de jeunes musiciens pour jouer la musique de Gil Evans et ses propres arrangements. Après une série de concert dans différents clubs de la capitale, la formation a fait paraître cette année un premier disque, deux CD(s) consacrés à des reprises de morceaux que Laurent affectionne (Lilia de Milton Nascimento), à des compositions d’Evans (Time of the Barracudas) ou à des arrangements de ce dernier, tel Spoonful du bluesman Willie Dixon qui donne son nom à ce premier double album. Un grand espace de liberté est laissé aux solistes – Antonin-Tri Hoang (saxophone alto), Martin Guerpin (saxophones soprano et ténor), Adrien Sanchez (saxophone ténor), Quentin Ghomari (trompette), Bastien Ballaz (trombone) pour n’en citer que quelques-uns – pour faire vivre et revivre une musique subtilement modernisée.  

-René Marie également le 27 le Duc des Lombards – deux concerts 19h30 et 21h30, ce qui permet aussi de se rendre au Sunside. Avec elle, les musiciens de son Experiment in Truth Band John Chin (piano), Elias Bailey (contrebasse) et Quentin Baxter (batterie) – qui l’accompagnent dans “Sound of Red”, son dernier album, un opus largement autobiographique dont elle a écrit toutes les chansons. C’est le meilleur disque de jazz vocal de l’an dernier. Éclectique, il s’ouvre à d’autres musiques, les racines musicales de la chanteuse la portant vers la soul, le blues, le gospel et le folk. Né à Séoul et excellent pianiste, John Chin assure offre à sa voix chaude et sensuelle de superbes harmonies. Très à l’aise sur une scène, René Marie, grande chanteuse de la grande Amérique subjugue et impressionne. Laissez-vous donc séduire.

-Le quatuor à cordes Supplément d’âme au Parc Floral de Vincennes (Espace Delta, 16h00) le 30. Il réunit depuis 2011 sous la houlette de Jean-Philippe Viret (contrebasse), Sébastien Surel (violon), David Gaillard (alto) et Éric-Maria Couturier (violoncelle). Au programme, de larges extraits de leur nouveau disque, “Les idées heureuses”, qui tourne autour de la musique de François Couperin. Car si certains morceaux s’inspirent de quelques-unes des pièces pour clavecin de Couperin, les autres sont des compositions personnelles aux mélodies séduisantes. Confiées à un quatuor à cordes dont le second violon est remplacé par une contrebasse, ce jazz de chambre mâtiné de musique baroque tient ses bienheureuses promesses.

-XIIème édition du festival Pianissimo en août au Sunside. Quelques concerts à ne pas manquer : Pierre de Bethmann et son trio le 8 avec Sylvain Romano (contrebasse) et Tony Rabeson (batterie) – Alain Jean-Marie et son Be Bop Trio le 17 et le 18 avec Philippe Aerts (contrebasse) et Lukmil Perez (batterie) – Fred Nardin et Jon Boutellier le 23 avec Patrick Maradan (contrebasse) et Romain Sarron (batterie) – René Urtreger en trio le 25 et le 26 avec Yves Torchinsky (contrebasse) et Eric Dervieu (batterie) – Tony Paeleman en quartette le 29 avec Julien Pontvianne (saxophone ténor), Nicolas Moreaux (contrebasse et Karl Jannuska (batterie) – Edouard Ferlet “Think Bach Opus 2” le 30.

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-Paris Jazz Festival : www.parisjazzfestival.fr

-New Morning : www.newmorning.com

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

 

Crédits Photos : Christian Bonnet © Pierre de Chocqueuse – Le Bureau de l'Académie du Jazz en janvier 2017 © Bénédicte de Chocqueuse – Sarah Lazarus © Olivier Humeau – Ray Lema & Laurent de Wilde © Jean-Baptiste Millot – Buster Williams © R. Cifarelli / Phocus – Jean-Philippe Viret  © Philippe Marchin – Pierre de Bethmann, Sylvain Romano, Tony Rabeson © Christophe Charpenel – Joey Alexander, Gil Evans Paris Workshop, René Marie © Photo X/D.R.

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1 juin 2017 4 01 /06 /juin /2017 08:32
La bonne musique fait-elle encore recette ?

Lundi 29 mai : je découvre émerveillé l’auditorium de la nouvelle Seine Musicale située sur l’île Seguin qui, je vous rassure, n'est pas celui de la photo. Au programme, Menahem Pressler, 93 ans, une légende qui marche difficilement mais joue encore un magnifique piano. La communauté jazzistique s’est déplacée. Les pianistes Pierre Christophe, Olivier Hutman, Fred Nardin, la chanteuse Elise Caron et de nombreux membres de l’Académie du Jazz sont venus applaudir le maestro. La salle est pourtant loin d’être pleine. Peu de jeunes au sein d’un public averti comme si Mozart, Debussy et Chopin n’intéressait que les vieux. Même constatation une semaine plus tôt au Sunside. Faute de réservations suffisantes, l’un des trois concerts que devait y donner Fred Hersch fut annulé. Un pianiste de cette envergure ne parvenant pas à remplir une salle de 200 places à Paris, on se pose bien des questions.

 

Proie facile pour les radios et les télévisions commerciales, le Français qui n’a jamais été éduqué à la musique et ignore tout de son histoire s’est précipité sur l’événement musical de l’année, l’Eurovision, mascarade télévisuelle, triomphe de la vulgarité et du mauvais goût. Représentant la France, la jolie Alma y poussa une bien médiocre chansonnette pour trébucher, juste retour des choses, devant un concurrent inattendu, Salvador Sobral, 27 ans, représentant le Portugal, le seul qui avait quelque chose à chanter, pas grand chose, juste une petite mélodie, denrée rare aujourd’hui, la seule de ce show planétaire ridicule célébrant le niveau zéro de la musique.

 

Car il est plus facile de la vendre insipide que de proposer du jazz, de la musique classique ou contemporaine, musiques qui demandent un effort, une écoute attentive. On préfère niveler par le bas, médiatiser celles, jetables et vides, que le public réclame. Si Herbie Hancock, Ahmad Jamal, Chick Corea ou Keith Jarrett, têtes d’affiche de grands festivals, débutaient aujourd’hui leur carrière, arriveraient-ils à sortir du circuit des petits clubs dans lesquels tant de musiciens restent aujourd’hui confinés ? Apparu dans les années 90, Brad Mehldau y est parvenu mais que Fred Hersch, Enrico Pieranunzi ou Marc Copland, eux aussi de grands pianistes, restent prioritairement abonnés au Sunside, au Duc des Lombards ou au New Morning (pour ne citer que des clubs parisiens) relève du scandale. Les « majors » ne signent plus que les artistes que plébiscite un public peu cultivé facilement piégé par ses émotions. Rarement inventifs, les nouvelles vedettes remplissent les grandes salles, les festivals. Rares sont ceux qui proposent encore du jazz au sein de programmations éclectiques qui privilégient la rentabilité. La bonne musique ne fait hélas plus guère recette. Aidée par Jean-Michel Blanquer, notre nouveau Ministre de l‘Éducation Nationale, Françoise Nyssen, notre nouvelle Ministre de la Culture, femme cultivée, parviendra t-elle à renverser la situation, à éduquer dès l‘école primaire les enfants à la musique ? Un vœu pieux je vous l‘accorde. On peut toujours rêver.  

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

 

-Valeur sûre du saxophone, David Sauzay est attendu le 2 juin au Duc des Lombards avec un sextet comprenant Fabien Mary à la trompette, Vincent Bourgeyx au piano, Michael Joussein au trombone, Michel Rosciglionne à la contrebasse et Bernd Reiter à la batterie. Tous pratiquent un jazz moderne ancré dans la tradition. David Sauzay joue aussi avec Fabien Mary au sein de l’octet du pianiste Laurent Courthaliac, dans les Jazz Workers du batteur Mourad Benhammou et le nonet du pianiste Laurent Marode. Le saxophoniste qui a également enregistré un disque avec le pianiste Harold Mabern sait très bien s’entourer. La présence à ses cotés de Vincent Bourgeyx, un des meilleurs pianistes de l’hexagone, en témoigne.

-Ce n’est pas parce que l’on soupçonne l’ancien premier ministre d’avoir mis les doigts dans le pot de confiture que l’on doit bouder le petit frère, le vrai talent de la famille. Dominique Fillon s’est fait discret ces temps derniers ce qui est compréhensible. Son dernier disque “Born in 68 date de 2014, bien avant le brouhaha fait autour de son nom. Le pianiste prend donc son temps pour enregistrer et nous revient en trio pour quatre concerts hommages à Al Jarreau au Duc des Lombards le 3 et le 4 (deux concerts par soir, à 19h30 et 21h30). Avec lui, Laurent Vernerey le bassiste de l’électrique “Born in 68” et le batteur de Francis Arnaud présent dans “As It Comes”, un disque acoustique de 2011. Le trompettiste Sylvain Gontard le 3 et le saxophoniste Yannick Soccal le 4 se joindront à eux pour pimenter quelques morceaux.

-Do Montebello à bord de la péniche Le Marcounet (Pont des Célestins, quai de l’Hôtel de Ville) le 8 juin à 20h00 avec comme équipage Hervé Morisot et Serge Merlaud (guitares) et Ricardo Feijão (baixolão). Après “Adamah”, un disque à la musique très brésilienne qui la voit chanter les arbres, le vent, la pluie, les océans d’une terre malmenée, elle a enregistré un nouvel album à l’instrumentation sobre et dépouillée. On y découvre Jacques Morelenbaum, arrangeur de plusieurs opus de Caetano Veloso au violoncelle et un duo avec le guitariste Toninho Horta. Do passe aisément d’une langue à une autre, chante en portugais, en français et en anglais et nous tient sous le charme d’une voix très pure et très belle.

-Toujours dirigé par l’infatigable Laurent Mignard, Le Duke Orchesta sera à l’Entrepôt le 8 juin à partir de 20h30 (7/9 rue Francis de Pressensé 75014 Paris) pour jouer Duke Ellington. Avec Didier Desbois, Aurélie Tropez, Fred Couderc, Hugo Afettouche, Philippe Chagne (saxophones & clarinettes), Claude Egéa, Gilles Relisieux, François Biensan, Richard Blanchet (trompettes), Nicolas Grimonprez, Michael Joussein, Jean-Claude Onesta (trombones), Philippe Milanta (piano), Bruno Rousselet (contrebasse), Julie Saury (batterie) et un invité : Patrick Bacqueville.

-On retourne au Duc des Lombards le 13 juin pour un concert très attendu du pianiste Pierre Christophe dont le nouvel album “Tribute to Erroll Garner” (Camille Productions) est en vente depuis le 15 mai. Avec lui les musiciens de son disque, Raphaël Dever à la contrebasse, Stan Laferriere à la batterie et Laurent Bataille aux congas, instrumentation que l’elfe Garner appréciait. Au programme, des compositions de ce dernier, 7-11 Jump, Dreamy, Dancing Tambourine et l’incontournable Misty, le morceau le plus célèbre d’un enchanteur du piano dont la principal inspirateur fut le grand Fats Waller. Remercions Pierre Christophe, Prix Django Reinhardt 2007 de l’Académie du Jazz, de nous faire revivre sa musique.

-Le 15 à 21h00, le Studio de l’Ermitage accueille l’Orchestre de la Lune, grande formation dirigée par le saxophoniste et compositeur Jon Handelsmann réunissant chanteurs et chanteuses (Kania Allard, Brad Scott et Rosa Grace) et instrumentistes de talent. Point de contrebasse ni de claviers, Didier Havet au tuba assure les basses de cet orchestre festif et funky qui mêle jazz et reggae et joue des compositions aux arrangements très soignés. Il réunit de bons musiciens dont Daniel Zimmermann au trombone, Bobby Rangell au saxophone alto, Michael Felberbaum à la guitare et Xavier Desandre-Navarre aux percussions. Disponible depuis le 5 mai, leur disque s’intitule “Dancing Bob” (Cristal Records) et mérite une écoute attentive.

-Eric Le Lann au Sunside le 16 avec les musiciens de “Life on Mars”, un album de 2015, un des meilleurs de sa discographie. Cette réussite, on la doit également à Paul Lay qui joue un merveilleux piano, à Sylvain Romano dont la solide contrebasse porte la musique et au drumming subtil de Donald Kontomanou. Avec eux, Le Lann exprime ses sentiments, son lyrisme. En quelques notes, le mélodiste installe l’émotion. On pense à Chet Baker auquel il a rendu hommage dans un disque récent. Attendons-nous à un répertoire varié. Dans “Life on Mars”, la Danse Profane de Claude Debussy rencontre Life on Mars de David Bowie et Everytime We Say Goodbye de Cole Porter. Laissons nous donc surprendre.

-Franck Avitabile que l’on a un peu perdu de vue ces dernières années et qui n’a pas fait de disques sous son nom depuis 2009 (“Paris Sketches” consacré à ses propres compositions) est attendu au Duc des Lombards le 16 et le 17 avec Diego Imbert à la contrebasse et André Ceccarelli à la batterie. Le premier album que Franck fit paraître chez Dreyfus Jazz en 1998 (“In Tradition”) fut parrainé par Michel Petrucciani. “Right Time” qui lui succéda en 2000 fut enregistré en trio avec Niels-Henning Ørsted Pedersen à la contrebasse. On se réjouit de revoir sur une scène parisienne ce pianiste sensible et exigeant qui possède une technique éprouvée.

-Rémi Toulon au Sunside le 22 avec sa section rythmique habituelle – Jean-Luc Aramy (contrebasse) et Vincent Frade (batterie) –, mais aussi avec Sébastien Charlier à l’harmonica diatonique qui est l’invité de “Adagiorinho”, son nouvel album, « rencontre imaginaire entre un adagio européen et un chorinho du Brésil », dont ils fêtent la sortie. Je ne l’ai pas reçu mais le pianiste nous invite « à un voyage festif et mélodique où la samba côtoie le blues, Gainsbourg croise Djavan et Musset danse le Boogaloo » indique l’argumentaire de presse. Naguère élève de Samy Abenhaïm et de Bernard Maury à la Bill Evans Piano Academy, le pianiste nous a habitué à des compositions originales traduisant un réel savoir harmonique et à des reprises très personnelles. Il a précédemment enregistré deux albums sous son nom, “Novembre” en 2011 et “Quietly” en 2014.

-Herbie Hancock à la Seine Musicale le 29 juin (20h30), un concert événement bien sûr. Légende vivante du jazz, le pianiste américain né en 1940 a beaucoup apporté à son histoire. Membre du second quintet de Miles Davis, fondateur d’un sextette qui donna ses lettres de noblesse au jazz fusion, puis des Headhunters, l’auteur de Watermelon Man, Cantaloupe Island, Maiden Voyage s’intéressa aussi à la danse, à la musique électronique. Aimant s’amuser avec de nouveaux instruments, il s’impliqua aussi dans des projets commerciaux. Il n’a plus rien publié depuis “The Imagine Projecten 2010, superproduction plutôt réussie enregistrée avec des musiciens du monde entier. La Seine Musicale accueillera Herbie Hancock en quintet. Lionel Loueke (guitare, voix), James Genus (basse) et Vinnie Colaiuta (batterie) nous sont familiers. Producteur de disques de soul et de funk, le multi-instrumentiste Terrace Jamahl Martin (saxophone, claviers) sera pour beaucoup une découverte. Puissent-ils nous offrir un bon concert de jazz.

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Péniche Le Marcounet : www.peniche-marcounet.fr

-Studio de l’Ermitage : www.studio-ermitage.com

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-La Seine Musicale : www.laseinemusicale.com

 

Crédits Photos : "Salle désespérément vide" © Photo X/D.R. – David Sauzay, Dominique Fillon, Pierre Christophe, Eric Le Lann, Franck Avitabile © Philippe Marchin – Do Montebello © Pierre de Chocqueuse – Duke Orchestra © Pascal Bouclier – L’Orchestre de la Lune © Jean-François Humbert – Rémi Toulon © Amélie Gamet.

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4 mai 2017 4 04 /05 /mai /2017 09:10
Émois de mai

Joli mois de mai dit la comptine, mais cette année un mois de tous les dangers pour une France mise à mal depuis des années par ses Politiques, grands privilégiés de notre République. On tremble à juste titre devant le péril dans lequel peut conduire ces élections présidentielles. Le pire peut encore arriver. J’en ai un avant-goût ce 1er mai avec la centaine d’enragés qui cassent, pillent, vocifèrent et tempêtent devant mes fenêtres (j’habite tout près de la Bastille), qui cherchent à en découdre avec la police, bouclier d’une société depuis longtemps désemparée, comme si le tout gratuit et les belles promesses d’un État-providence étaient encore possibles. Cocktails Molotov, mais aussi pierres, pavés, cailloux, boulons, tout ce qui peut tomber sous la main des agités pleut sur des CRS caparaçonnés comme des troupes au combat. Pessimiste de nature, ce tumulte me trouble moins que les jours à venir. En attendant, entre deux pétarades assourdissantes de bombes lacrymogènes, j’écoute de la musique, du jazz dont le bleu n’est pas du tout marine, “Bitter Ending”, “Jazz et Jazz”, “Anna Livia Plurabelle” qui, 50 ans après son premier enregistrement (1966), reste d’une modernité stupéfiante. Ces disques d’André Hodeir me donnent du baume au cœur, m’isolent du bruit et de la fureur de ces jours incertains.

 

Ces réécoutes attentives, je les dois à Pierre Fargeton, à la pertinence de ses commentaires et de ses analyses. Maître de conférences à l’université Jean Monnet de Saint-Étienne, titulaire d’un doctorat de musicologie consacré à la musique d’André Hodeir, il vient de faire paraître “André Hodeir le jazz et son double” aux Éditions Symétrie (préface de Martial Solal) un bouquin, lourd et épais, pas loin de 800 pages, une somme très complète et détaillée enrichie d’une abondante iconographie. Fargeton s’est livré à plusieurs entretiens avec Hodeir et a eu accès à ses archives ce qui rend son livre passionnant. J’y suis plongé depuis deux semaines, redécouvrant un des rares compositeurs français qui laisse une œuvre importante au regard de l’histoire du jazz.

 

Compositeur, homme de radio, fondateur du Jazz Groupe de Paris, auteur de nombreux articles (notamment dans Jazz Hot dont il fut dès après guerre un des plus éminents collaborateurs) et de plusieurs livres, les plus célèbres étant “Hommes et problèmes du jazz” et “Les Mondes du jazz”, ouvrages fondamentaux pour ceux qui veulent réfléchir sur le jazz, André Hodeir (1921-2011) est malheureusement trop oublié et trop peu joué. Le dernier concert donné autour de ses œuvres date du 3  décembre 2011. On le doit au Patrice Caratini Jazz Ensemble qui ce jour-là, dans le studio 105 Charles Trenet de Radio-France, interpréta quelques-unes de ses compositions (et arrangements) dont sa célèbre et admirable Jazz Cantata. Je ne vais pas vous détailler ici le livre de Pierre Fargeton qui malgré son prix (70€) et la difficulté de compréhension que pose une partie de l’ouvrage (sa deuxième et troisième partie, analyses des techniques du langage musical du compositeur), me semble incontournable. Je consacrerai prochainement un article à André Hodeir dans les pages de ce blog. Il vous faudra attendre un peu. La patience n’est-elle pas mère de toutes les vertus ?

QUELQUES CONCERTS QUI INTERPELLENT

 

-Concert de sortie au Triton le 4 mai de “Spirit Dance, nouveau disque d’Yves Rousseau (contrebasse) et de Christophe Marguet (batterie). Après 15 ans de complicité et de concerts partagés, ils ont réuni un nouvel orchestre pour jouer leurs musiques, de beaux thèmes brillamment orchestrés. Fabrice Martinez (trompette et bugle), David Chevallier (guitare électrique) et Bruno Ruder (piano & Fender Rhodes) créent avec eux une texture sonore plus ou moins électrique selon les plages. Certaines sont fondées sur la pulsion et l’énergie, d’autres privilégient la mélodie et le lyrisme. L’imagination fertile canalise les influences au profit d’une parfaite lisibilité du discours musical. Une formation à suivre assurément.

-Du 9 au 11 mai, Catherine Russell occupera la scène du Duc des Lombards. Mark Shane (piano), Matt Munisteri (guitare), Nicki Parrott (contrebasse) et Mark McLean l’accompagnent depuis longtemps et constituent un véritable groupe. Fille de Luis Russell qui fut l’un des pianistes et directeur musical de Louis Armstrong, la chanteuse travailla longtemps comme choriste avant de posséder sa formation. Sa voix chaude et sensuelle fait revivre d’anciennes mélodies de l’histoire du jazz, des joyaux de l’ère du swing et des blues éternels. Son album “Strictly Romancin a reçu en 2012 le Prix du Jazz Vocal de l’Académie du Jazz.

-Le 10, le pianiste Bruno Angelini présentera au Sunside Open Land, un quartette comprenant Régis Huby aux violons, Claude Tchamitchian à la contrebasse et Sylvain Darrifourq (remplaçant ce soir là Edward Perraud) à la batterie. La musique fait suite à celle de l’album “Instant Sharings” enregistré en 2014 avec les mêmes musiciens. Récompensé par un Choc dans le numéro de Jazz Magazine de juin 2015, ce disque inclassable réunit jazz moderne et musique contemporaine. Les compositions de Bruno voisinent avec des thèmes de Paul Motian, Wayne Shorter et Steve Swallow, la musique évoluant librement sous l’action collective des musiciens. Au Sunside, le groupe jouera également de nouvelles compositions, prélude à l’enregistrement d’un nouvel album en juin prochain à La Buissonne.

-Ne manquez pas le 12 au Duc des Lombards le concert de sortie de “Princess”, album réunissant le pianiste Stephan Oliva, la chanteuse suisse Susanne Abbuehl et le percussionniste norvégien Øyvind Hegg-Lunde. Largement consacré à la musique de Jimmy Giuffre peu interprétée par les jazzmen, son répertoire comprend aussi Great Bird, un thème que Keith Jarrett enregistra pour Impulse, une version inattendue de What a Wonderful World et des musiques de Stephan qui écrit pour Susanne des mélodies douces et tendres, enveloppe sa voix de notes soyeuses et met en valeur son timbre aérien. Cette dernière y ajoute ses propres paroles ou met en musique des poèmes qu’elle affectionne, allongeant ou contractant leurs syllabes pour leur donner du rythme.

-Le 13 à 20h30, dans le cadre de la cinquième édition de son Tempo Jazz, l’Espace Sorano de Vincennes invite la pianiste Geri Allen et le trompettiste Enrico Rava, deux musiciens exceptionnels qui ne se sont jamais rencontrés, à constituer un duo inédit. Outre ses propres albums, en solo ou avec Ron Carter et Tony Williams, Charlie Haden et Paul Motian, cette grande dame du piano fit partie du groupe de Charles Lloyd et accompagna Ornette Coleman. Apôtre du free jazz dans les années 70, Enrico Rava préfère aujourd’hui souffler de la douceur et privilégier le lyrisme, sa trompette servant le cantabile avec une grande variété d’inflexions. Il s’est toujours entouré de bons pianistes – Franco d’Andrea, Stefano Bollani, Giovanni Guidi – jouant des mélodies très simples et très belles dont son association avec Geri Allen devrait bénéficier.

-Steve Kuhn au Sunside le 13 (19h00 et 21h30) et le 14 mai (20h00) avec David Wong à la contrebasse et Billy Drummond à la batterie. Le pianiste a une longue carrière et une impressionnante discographie derrière lui. Il a enregistré avec Scott LaFaro, accompagné Kenny Dorham, Stan Getz et Art Farmer et, de janvier à mars 1960, a même été le pianiste de John Coltrane auquel il a consacré un magnifique album en 2008. Ancrant son piano dans la tradition du bop, Steve Kuhn est aussi un musicien lyrique, un disciple de Bill Evans qui aime diversifier son jeu. Ses propres compositions révèlent le styliste aux harmonies élégantes qui excelle en solo. “Ecstasy”, un disque ECM de 1974, en témoigne.

-Le 17 mai à 20h00, le Mona Bismarck American Center (34 avenue de New York, 75116 Paris) accueille Jacky Terrasson en solo dans un programme entièrement consacré à des standards de l’histoire du jazz. Le pianiste excelle dans cet exercice qui le voit prendre des risques, greffer de nouvelles notes, de nouvelles harmonies sur de vieux thèmes indémodables. Il joue pourtant trop rarement en solo. Ne manquez pas cette rare occasion d’écouter ce face à face avec lui-même, son jeu physique ancré dans le blues, dans le rythme, la scène apportant une autre dimension à sa musique.

-Guitariste italien installé à Paris depuis plusieurs années, Federico Casagrande fêtera le 18 au Sunside (21h30) la sortie sur le label CAM Jazz de “Fast Forward”, un album en trio enregistré avec le bassiste américain Joe Sanders (remplacé par Simon Tailleu pour ce concert) et le batteur israélien Ziv Ravitz, compagnon de route de Yaron Herman. Né à Trévise, Federico Casagrande étudia la guitare au Berklee College of Music de Boston. Séduit par ses timbres et ses couleurs, Enrico Pieranunzi a enregistré en duo avec lui “Double Circle” en 2014. À la guitare acoustique Federico y révèle la finesse de son jeu, ses harmonies sophistiquées. On les retrouve intactes dans les deux plages acoustiques de son nouveau disque, un opus électrique tout aussi audacieux.

JAZZ à SAINT-GERMAIN-DES-PRÉS - 17ème ÉDITION

-Le 18 également, le grand amphithéâtre de l’Université Panthéon-Assas (92 rue d’Assas) accueillera Anne Ducros. Accompagnée par ses musiciens – Benoit De Mesmay (piano), Olivier Louvel (guitare), Gilles Nicolas (contrebasse et basse électrique), Bruno Castellucci (batterie) – et un orchestre symphonique, elle interprétera le répertoire de “Brother Brother !” (Adlib), son nouvel album, un florilège de chansons célèbres – You Are So Beautiful, La Bicyclette, Samba Saravah, Déshabillez moi – merveilleusement chantées et bénéficiant d’arrangements très soignées.

-Ce concert est donné dans le cadre de la 17ème édition du festival Jazz à Saint-Germain-des-Prés qui se déroulera cette année du 11 au 22 mai dans diverses salles et lieux des 5ème et 6ème arrondissements de Paris – Les églises de St. Germain et de Saint-Sulpice, la salle des fêtes de la mairie du 6ème, le Lucernaire, l’Amphithéâtre Richelieu de la Sorbonne, la Maison des Océans – mais aussi au Sunside qui abritera les 13 et 14 mai le Tremplin Jeunes Talents.

 

-Un festival soutenu par la Fondation BNP Paribas et que créèrent Donatienne Hantin (co-fondatrice et co-directrice en charge de la production du festival) et Frédéric Charbaut (son co-fondateur, directeur en charge de l’artistique) avec le regretté Joël Leroy. Autour d’eux se bouge une équipe formidable. Je pense à Géraldine Santin la responsable de la communication qui est à droite sur la photo avec à son côté le pianiste Joran Cariou, vainqueur du Tremplin Jeunes Talents 2016 (Frédéric et Donatienne sont à gauche sur cette même photo), à Sophie Louvet l’attachée de presse, et à Véronique Tronchot dont le papa reste cher à mon cœur.

 

-Le programme est à découvrir sur le site internet du festival. Il y en a pour tous les goûts avec des concerts du pianiste Shahin Novrasli, du Stefano Di Battista / Flavio Boltro Quintet (qui invite la chanteuse Robin McKelle) de Baptiste Trotignon, du saxophoniste David Sauzay (en solo au Musée de Cluny le 20 mai à 21h00) et de la chanteuse Linda Lee Hopkins.

-L’un des points forts du festival sera le concert de sortie du nouvel album ECM du trompettiste Avishai Cohen, “Cross My Palm With Silver”, le 19 mai à 21h30 à la Maison des Océans, 195 rue Saint-Jacques. Déjà présents dans “Into The Silence” son disque précédent (Grand Prix 2016 de l’Académie du Jazz), le pianiste Yonathan Avishai et le batteur américain Nasheet Waits sont à nouveau de l’aventure, le bassiste Barak Mori indisponible se voyant remplacer par Yoni Zelnik. Les cinq compositions de ce nouvel opus laissent beaucoup de place à l’improvisation, la musique souvent modale restant largement confiée à la discrétion des musiciens qui y déposent leurs idées et concourent à la création de pièces ouvertes et subtilement interactives.

 

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-L’association « Partage dans le monde » que soutient activement le pianiste Nicola Sergio nous donne rendez-vous le dimanche 21 mai (18h00) au New Morning pour la 4ème édition de « Jazz pour le Népal », un concert de soutien en faveur des sinistrés des séismes de 2015 au Népal. Au programme le Nicola Sergio Quartet (avec Francesco Baerzatti au saxophone), Antoine Hervé en trio avec François et Louis Moutin et l’Orchestre Pee Bee. Les bénéfices de ce concert financeront des missions médicales et éducatives.

-Pat Metheny est attendu à l’Olympia le 23 à 20h00, avec un nouveau groupe comprenant Gwilym Simcock aux claviers, Linda Oh à la basse et Antonio Sanchez à la batterie, seul rescapé de sa formation précédente. Le prix des places : entre 117€ et 62€, cher pour un guitariste qui ces dernières années n’a pas toujours été au meilleur de sa forme. Mais sur scène Metheny se lâche, improvise tout feu tout flamme avec un lyrisme dont manque un peu ses derniers albums studio. Sans Chris Potter, saxophoniste parfois envahissant, et renouant avec la formule du quartette qui a fait son succès (ses grands disques avec Lyle Mays), Metheny devrait donner le meilleur de lui-même.

-Fred Hersch au Sunside le 23 (21h00) et le 24 (19h30 et 21h30) avec son trio habituel, John Hébert (contrebasse) et Eric McPherson (batterie). Musicien inspiré, Hersch joue une musique si fluide que l’on ne perçoit pas l’immense technique qu’elle nécessite. Les standards qu’il reprend et actualise avec un grand souci de la forme révèlent la profonde intimité qu’il partage avec son piano. Rythmiquement, il fascine par son sens du tempo, sa conception très souple du rythme qui lui permet de passer du stride au boogie ou de jouer une bossa avec un brio sans pareil. Interprète coutumier de Thelonious Monk, les accords anguleux et abstraits, ne lui font pas peur. La contrebasse d’Hébert instaure avec lui une conversation quasi permanente. Quant à son batteur il adapte son jeu à toutes les situations. Des concerts incontournables.

-Au Sunset le 25, le trio AérophoneYoann Loustalot (trompette et bugle), Blaise Chevallier (contrebasse) et Frédéric Pasqua (batterie) – fêtera la sortie d’“Atrabile” (Bruit Chic / L’Autre Distribution), son troisième album, un opus au sein duquel le trio devient quartette avec l’arrivée de Glenn Ferris, tromboniste invité. Une musique plus riche sur le plan sonore, mais aussi sur celui des échanges en résulte. Assurant d’habiles contre-chants, les cuivres organisent une véritable polyphonie de timbres autour des compositions structurées de Loustalot, un répertoire souvent mélancolique dans lequel Ferris, qui sera présent au Sunset, se révèle l’interlocuteur idéal du trompettiste.

-Avec Stéphane Kerecki et Daniel Humair, Antonio Faraò était en février au Duc des Lombards. Il retrouvera le Sunside le 26 (à 21h00) et le 27 (à 21h30) avec un autre trio pour l’accompagner. Thomas Bramerie (contrebasse) et Jean-Pierre Arnaud (batterie) poseront leurs tempos sur son phrasé fluide, ses harmonies élégantes. Il peut aussi se montrer énergique, donner swing et intensité à ses notes et peindre des paysages plus durs et plus abstraits. Il reste toutefois attaché à la ligne mélodique des thèmes qu’il aborde et qu’il ré-harmonise. Avec lui, point de notes inutiles mais un jazz raffiné qui se laisse constamment fêter.

-Dans le cadre du festival Villette Sonique 2017, Annette Peacock se produira en solo le 27 (chant, piano & claviers) dans la salle des concerts de la Cité de la Musique. Figure lunaire du jazz et des musiques expérimentales, elle épousa le contrebassiste Gary Peacock puis devint la femme de Paul Bley avec lequel elle enregistra quelques albums de jazz électronique, elle-même utilisant un prototype de Mood Synthétiser. Elle a signé des thèmes inoubliables – Open To Love, Blood, Albert’s Love Theme, Touching – que la pianiste Marilyn Crispell a réuni en 1996 dans “Nothing Ever Was, Anyway”, un album ECM en trio. Son dernier disque, “An Acrobat’s Heart” (ECM) date de 2000. Un concert événement. 

-Le Triton : www.letriton.com

-Le Duc des Lombards : www.ducdeslombards.com

-Sunset - Sunside : www.sunset-sunside.com

-Festival Jazz à Saint-Germain-Des-Prés : www.festivaljazzsaintgermainparis.com

-Espace Sorano : www.espacesorano.com

-Mona Bismarck American Center : www.monabismarck.org

-New Morning : www.newmorning.com

-Olympia : www.olympiahall.com

-La Philharmonie de Paris : www.philharmoniedeparis.fr

 

Crédits photos : Yves Rousseau / Christophe Marguet 5tet © Jérôme Prébois – Catherine Russell © Sandrine Lee – Bruno Angelini, Steve Kuhn, Fred Hersch, Antonio Faraò © Philippe Marchin – Stephan Oliva / Susanne Abbuehl / Øyvind Hegg-Lunde © Maxim François – "Un Premier mai très parisien", Geri Allen, Fredéric Charbaut / Donatienne Hantin / Joran Cariou /Géraldine Santin © Pierre de Chocqueuse – Jacky Terrasson © Jean-Baptiste Millot – Federico Casagrande © Boris Wilensky – Anne Ducros © Robert Pasquier / Ropas – Pat Metheny © J. Peden – Avishai Cohen, Aérophone, Annette Peacock © Photos X/D.R.

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