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18 octobre 2019 5 18 /10 /octobre /2019 09:14
Franck AMSALLEM : “Gotham Goodbye” (Jazz&People / Pias)

Il fait peu parler de lui, pas assez au regard de son talent, sa déjà longue carrière. Né à Oran, élevé à Nice, Franck Amsallem vécut vingt ans aux Etats-Unis où il s’installa en 1982. Diplômé du Berklee College of Music de Boston deux ans plus tard, il poursuivit ses études à la Manhattan School of Music de New York obtenant un Master de composition jazz avec Bob Brookmeyer. Le jazz, Franck en connaît la grammaire et le vocabulaire. Mettant son piano au service des autres avant de créer sa propre musique, il a beaucoup joué de standards dans les nombreux clubs de jazz de la ville, apprenant à bien les connaître pour les ré-harmoniser, les réinventer à sa manière. Gagner sa vie comme musicien de jazz à New-York l’obligea à compter parmi les meilleurs, à jouer avec les meilleurs. Gerry Mulligan, Charles Lloyd, Joe Chambers (qui tient la batterie sur l’un de ses albums), Roy Hargrove et beaucoup d’autres le sollicitèrent comme pianiste. Gary Peacock et Bill Stewart l’accompagnent sur “Out A Day”, son premier disque enregistré en 1990. Car Franck Amsallem sait mettre en valeur les lignes mélodiques d’un thème qu’il soit de lui ou fasse partie de l’inusable Great American Song Book, bible des musiciens de jazz. Appréciant les belles mélodies, il accompagne avec finesse les chanteurs et les chanteuses qui le lui demandent. Phrasant comme un instrumentiste, il les chante également et leur a consacré deux albums. “Sings Vol.II a été l’un de mes Chocs de l’année 2014. Vous en trouverez la chronique dans ce blog.

Ces thèmes, Franck Amsallem les garda en mémoire lorsqu’il retrouva Paris en 2004, vingt ans après avoir quitté la capitale. Fort de son expérience new-yorkaise, il devint une figure familière des clubs parisiens, du Sunside, du Duc des Lombards. Ce dernier l’accueillit en juillet 2016 avec les musiciens de ce nouvel album, Irving Acao au saxophone ténor, Viktor Nyberg à la contrebasse et Gautier Garrigue à la batterie. Après avoir enregistré un disque en piano solo en septembre 2016 – publié en début d’année le coffret “At Barloyd’s” (Jazz&People) le contient –, il sort enfin avec eux un album de ses compositions, “Gotham Goodbye”, un adieu à New York, à une mégalopole dont il n’a pas oublié la musique, du jazz moderne que le blues et de solides racines irriguent, du jazz habité par le rythme comme à ses plus beaux jours.

De nationalité cubaine, Irving Acao se plaît à enrouler ses phrases sensuelles autour des thèmes et possède un son bien à lui au saxophone ténor. Ce familier d’un autre club de la rue des Lombards, le Baiser Salé, ensorcèle par une sonorité chaude, chaleureuse qui donne un aspect solaire à la musique. La section rythmique est européenne. Le bassiste suédois Victor Nyberg vit depuis longtemps en France. Ancien élève du CSNM de Paris, il a également appris son métier en Amérique, à la North Texas University. Ses racines européennes lui apportent aussi un précieux bagage harmonique comme en témoigne A Night in Ashland, une ballade qu’il introduit conjointement avec le piano. Des ballades, il y en a plusieurs dans ce disque. Franck Amsallem improvise avec bonheur sur leurs belles mélodies. La partie de piano de Last Night When We Were Young, seul standard de l’album, est d’une rare élégance. Confiées au saxophone, les notes enveloppantes d’In Memoriam évoquent le générique d’une célèbre série TV. Je vous laisse deviner laquelle. Hamsa et son rythme chaloupé, son doux balancement, est également très séduisant. Batteur très demandé (Flash Pig, le défunt Gil Evans Paris Workshop), Gautier Garrigue officie aux tambours. Qu’il les martèle ou qu’il en caresse tendrement les peaux, il donne constamment du swing aux pièces toujours chantantes de l’album et ce malgré des métriques parfois impaires et inhabituelles. From Twelve to Four, un blues au tempo plutôt rapide, en témoigne. Ne manquez surtout pas cet opus que met en valeur sa pochette, une magnifique photo en noir et blanc de Philippe Lévy-Stab.

 

-Concert de sortie le 29 octobre au Sunside (21h00).

 

Photos © Philippe Lévy-Stab (pochette & Portrait) & Leonard Courtaux (quartet).

 

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