« Chaque thème doit
mener à l’improvisation et chaque improvisation doit permettre de revenir à l’écriture. De cette façon l’énergie n’est jamais perdue. Elle se conserve et se transforme. » Ces propos de
Stéphane Kerecki sur sa propre musique conviennent parfaitement à celle qu’Amy Gamlen nous offre dans ce disque. Partant de l’écriture, un dialogue permanent s’instaure entre les membres de l’orchestre. Ces derniers peaufinent les thèmes, y reviennent, leurs
chorus contribuant à structurer les compositions sur le plan de la forme. Thomas Savy a, paraît-il, naguère été conquis par la
saxophoniste pour l’avoir entendue en trio avec Stéphane Kerecki à la contrebasse et Karl Jannuska à la batterie. Il joue depuis plus de deux ans de la clarinette basse avec ces derniers, le guitariste Michael Felberbaum complétant le quintette de cette jeune anglaise installée à Paris depuis 2001. “Cold Light“ s’ouvre sur un duo entre Amy et Thomas. Le timbre chaleureux de la clarinette
basse contraste avec la sonorité tranchante de l’alto. Le morceau s’intitule Exit et les deux instruments esquissent les notes d’une ritournelle dont s’empare la section
rythmique. Egalement construites autour d’un leitmotiv humoristique, There Was et Fanfare génèrent de
passionnantes improvisations, Fanfare entrecroisant habilement plusieurs discours, chacun possédant sa propre logique. A la fois souple et
énergique, la section rythmique épouse les sinuosités mélodiques de compositions pleines de surprises et de fantaisies dans lesquelles se fait entendre un vrai son de groupe. La contrebasse de
Stéphane Kerecki porte les notes de Undertow. Autour d’elle s’organisent les échanges, se dessinent les délicates nuances d’un
morceau qui, abstrait de prime abord, devient une véritable danse. Ailleurs, dans Invisible Woman, une walking bass pneumatique et un batteur
au drive subtil offrent un superbe écrin à la clarinette de Thomas qui converse fréquemment avec le saxophone. La guitare de Michael
Felberbaum assure de passionnants contrepoints aux souffleurs et égraine les accords un peu magiques de Sleeping Potion, composition
baignant dans un climat onirique dans laquelle la clarinette basse peint les couleurs du rêve. Quant à Amy Gamlen elle sait raconter des histoires. Ses saxophones (alto ou
soprano selon les plages) chantent de bien belle façon dans Acceptance et Lil, courte pièce de
transition avant l’envoûtant In the cold Light of Day, une pièce
ouverte, aérée, dans laquelle les instruments se font tendres pour mieux nous séduire.
Amy Gamlen et ses musiciens seront le 15 janvier sur la scène du Sunset. On viendra nombreux les applaudir.