Les Editions Montparnasse mettent en vente depuis le 7 février le DVD du film que Michael Radford (“1984”, “White Mischief”, “Il postino”) consacre à Michel Petrucciani. En
juin 2011, peu avant sa sortie en salle, il fut projeté à la SACEM en présence du réalisateur britannique, mais aussi de quelques-unes des nombreuses personnes dont les témoignages nourrissent ce
passionnant documentaire. Grâce à eux se dessine un portrait fidèle du musicien dont la carrière fut aussi brève qu’exceptionnelle. Né à Orange en 1962, atteint d’une grave maladie des os qui
limita sa taille à 91 centimètres, il
décédait en 1999 à l’âge de trente-six ans, souffrant d’un vieillissement physique accéléré, épuisé par de trop nombreux concerts. Edités sur Owl Records et produits par
Jean-Jacques Pussiau, ses premiers disques témoignent de la maturité d’un pianiste lyrique et impétueux influencé par Bill
Evans, mais dont le toucher délicat au service de la ligne mélodique se combinait à une attaque puissante de la note. Michel rêvait de l’Amérique, la
terre sur laquelle le jazz était né. À Big Sur (Californie), il rencontra Charles Lloyd qui ressortit son saxophone longtemps délaissé
pour jouer avec lui. Installé à New York, les plus grands jazzmen l’adoubèrent. Après deux disques pour George Wein, dont un en solo
enregistré au Kool Jazz Festival, les disques Blue Note accueillirent le pianiste. Michel enregistra avec Jim Hall, Wayne
Shorter, Roy Haynes, Joe Lovano (“From the Soul” sous le nom de ce dernier). “Pianism” (décembre 1985) est probablement le meilleur album de cette période. Rentré en France après d’innombrables concerts
et tournées, Michel signa avec le label Dreyfus. Ceux qu’il réalisa pour lui ne sont pas tous réussis, malgré deux belles rencontres avec Eddy Louiss et Stéphane Grappelli. Mieux vaut écouter les enregistrements qu’il effectua pour Owl, avec Lee
Konitz dans le fascinant “Toot Sweet”, ou en solo, “Oracle’s Destiny” dédié à Bill Evans.
Sachant qu’il n’allait pas vivre très vieux, Michel goûta pleinement à la vie, en quatrième vitesse,
pour reprendre le titre du film de Robert Aldrich. Il craignait la mort, mais voulait tout essayer, s’investissant à fond dans ce qu’il
entreprenait. Il aimait beaucoup les femmes, en épousa plusieurs et eut une vie sentimentale tourmentée. Toutes parlent de lui avec nostalgie et tendresse. J’avais fait sa connaissance au
début des années 80, rue Lliancourt, dans le petit bureau que Jean-jacques Pussiau partageait avec Geneviève
Peyregne, son agent à l’époque. Nous nous revîmes, à Paris avec Aldo Romano son porteur
attitré, au Festival de jazz de Montréal, à l’Archéo Jazz de Blainville-Crevon en Normandie. Nos rapports furent toujours amicaux. Michel, pas commode avec les gens qu’il n’aimait pas, avait ses
défauts, mais était profondément humain. Lors de notre dernière rencontre, il avait beaucoup grossi. Grâce à des interviews, à des images d’archives et à de nombreux films d’amateurs,
Michael Radford parvient à faire revivre ce drôle et talentueux petit bonhomme, nous fait à nouveau entendre sa voix, son rire, son langage et
donne grande envie d’écouter sa musique.
“Michel Petrucciani” de Michael Radford – 1 DVD Editions Montparnasse. Durée du film 1h39.
CREDITS PHOTOS : Michel Petrucciani & Erlinda Montano Hiscock à Big Sur © X/D.R. - Michel Petrucciani, photo noir & blanc © Philippe Etheldrède