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10 octobre 2008 5 10 /10 /octobre /2008 08:47

Après avoir travaillé longtemps en quintette et possédé un grand orchestre, Dave Holland nous propose un nouveau groupe, un sextette avec trois souffleurs, le fidèle Robin Eubanks au trombone et deux musiciens de son défunt big band : Alex Spiagin à la trompette et Antonio Hart au saxophone alto. Eric Harland s’installe à la batterie, mais la grande nouveauté c’est la disparition du vibraphone au profit du piano. Mulgrew Miller l’occupe et ce choix n’est pas anodin. Il sait accompagner subtilement le discours des solistes. Le piano remplaçant le vibraphone introduit dans le quintette du contrebassiste en 1995, c’est une nouvelle sonorité de groupe que nous découvrons, la musique restant toutefois très semblable. Le très long Rivers Run témoigne de son goût pour la polyphonie et l’improvisation collective ; Son admiration pour les rythmes latins et les mesures impaires se manifeste dès la première plage, The Sums of All Parts, morceau dans lequel Eric Harland se révèle une recrue appréciable. Mulgrew Miller se taille la part du lion dans Equality, une des deux ballades de ce disque. L’autre est Processional, un morceau à l’arrangement très soigné, comme Lady Snake et ses riffs séduisants qui ponctuent les chorus éclatants des solistes. Holland dispose d’une formidable équipe de musiciens qui s’écoutent et font circuler avec fluidité leurs idées musicales. On croirait entendre un orchestre beaucoup plus important. L’explication est simple : la contrebasse qui le porte pèse des tonnes de feeling.
Meilleurs Morceaux : The Sum of All PartsLady Snake, Equality, Processional.

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8 octobre 2008 3 08 /10 /octobre /2008 10:05

On se souvient de “Day Trip“, album en trio de Pat Metheny avec Christian McBride à la contrebasse et Antonio Sanchez à la batterie publié sur Nonesuch en février dernier. Les nombreux inconditionnels du guitariste réclamant d’autres morceaux, Nonesuch, en proposa cinq autres en téléchargement sur son site puis décida de les sortir en CD. Enregistrées live au Blue Note de Tokyo, ces pièces inédites témoignent de l’étonnante cohésion du trio. Utilisant plusieurs guitares (acoustiques, électriques mais aussi de la guitare-synthé), Metheny développe longuement un thème onirique (Tromso), se fait tendre dans une ballade (Inori), s’envole avec fougue dans des improvisations inspirées saturées d’électricité. Contrebasse et batterie soulignent et ponctuent subtilement le jeu mélodique du guitariste. Warner n’a pas l’intention de sortir ce petit disque en France et donc n’en assure pas la promotion. On le trouve en import dans quelques points de vente, au rayon jazz des bonnes Fnac parisiennes et dans les quelques magasins qui croient encore au jazz.
Meilleurs Morceaux : Tromso, Inori, The Night Becomes You.

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6 octobre 2008 1 06 /10 /octobre /2008 11:44

Ce batteur-là ne joue pas comme les autres. Son drive, sa ponctuation n’appartiennent qu’à lui. Le temps nous a révélé un compositeur habile qui place la respiration au cœur de sa musique. Car Paul Motian suggère souvent les rythmes au lieu de les marquer, pratique l’ellipse, la musique circulant alors plus librement, non balisée, comme libérée de ses barres de mesure. En 2007, le label Winter & Winter nous régala d’un “Live at the Village Vanguard, Vol.I“, enregistrement réunissant son trio 2000 (Chris Potter au saxophone ténor, Larry Grenadier à la contrebasse) augmenté de deux musiciens pas manchots, Greg Osby à l’alto et Masabumi Kikuchi au piano. Impressionnant dans If You Could See Me Now, un standard de Tadd Dameron introduit longuement en solo, monkien en diable dans Last Call, ce dernier occupe une place centrale dans le dispositif orchestral. Récemment paru, “Live at the Village Vanguard Vol. II“ nous offre sept autres morceaux, davantage que dans le premier volume, et permet de suivre le groupe sur scène, pendant ces trois mêmes soirées de décembre 2006. Des compositions de Motian, une courte reprise de If You Could See Me Now et Till We Meet Again, une chanson sentimentale de 1918 en constituent le programme. Le pianiste étonne encore par la variété de ses clusters, ses notes et accords dissonants. Quant aux deux souffleurs, s’ils se retrouvent pour exposer à l’unisson les thèmes anguleux du batteur, ils croisent le cuivre, questionnent, se soufflent mutuellement des réponses. La section rythmique, distendue et souple, accorde beaucoup d’espace à leurs longues improvisations qui racontent toujours quelque chose. Sur deux titres, le violoniste Mat Manieri rejoint les cinq musiciens. Partant des thèmes, d'un vocabulaire harmonique très structuré, tous creusent la matière sonore et prennent des risques particulièrement inventifs.
Meilleurs morceaux: Till we Meet Again, Sunflower, The Divider.

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3 octobre 2008 5 03 /10 /octobre /2008 12:39

D'emblée, Matt Turner utilise son violoncelle comme une contrebasse. Ses doigts en pincent les cordes, les tirent, les font vibrer. La caisse de l’instrument amplifie des accords de blues. Peg Carrothers en dévoile la mélodie dans la pièce suivante, My Old Kentucky Home, une reprise du premier morceau, un thème qui occupe cinq plages de l’album, toutes différentes. Un piano (Bill Carrothers), une voix et un violoncelle nous donnent du vague à l’âme, la nostalgie de vieilles chansons associées à l’histoire de la grande Amérique, des mélodies qui, aujourd’hui encore, parviennent jusqu’à nous. Coproducteur de cet album, à commander de toute urgence sur http://www.illusionsmusic.fr/ , Philippe Ghielmetti a découvert My Old Kentucky Home dans un film de John Ford, “The Sun Shines Bright“ (“Le Soleil brille pour tout le monde“). Son auteur, Stephen Foster (1826-1864) est un des pères de la musique américaine. Ses compositions se retrouvent dans tous les genres musicaux dont ce pays donna naissance, le folk, la country music, le rock, le jazz et même chez Charles Ives, dont l’œuvre, parsemée de singularités harmoniques et rythmiques, résonne d’échos de musiques populaires. Comme Matt Turner l’explique dans ses notes de pochette, les « amples sauts harmoniques » de Foster favorisent l’improvisation. Si la voix respecte fidèlement l’aspect mélodique des partitions, ces dernières inspirent au violoncelle et au piano des accords, des harmonies très personnelles. Matt et Bill jouent parfois les thèmes avec dévotion (My Old Kentucky Home, plage 10), mais offrent aussi de nouveaux habits à ces morceaux. Relectures rythmiques (Oh ! Susanna, Hard Times Come Again No More) et dissonances orchestrées (l’introduction de Beautiful Dreamer, Camptown Races) font ici bon ménage, la voix et les deux instruments parvenant à créer un climat, une féerie sonore grandiose et inquiétante - Jeanie with the Light Brown Hair. S’il vivait encore, Stephen Foster serait probablement surpris par certaines versions très libres que le trio donne de ses œuvres. Il reconnaîtrait ses chansons, mais comme nous serait bien en peine d’en définir les magnifiques musiques.

Meilleurs morceaux : Ils le sont tous.

Photo: ©Emmanuelle Prétot

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29 septembre 2008 1 29 /09 /septembre /2008 17:03

De beaux accords exposés par un piano électrique inventif, des harmoniques superbes jouées par une contrebasse qui ébauche les pas d’une danse légère et gracieuse : les premières mesures de ce disque diffusent d’emblée une lumière estivale. Découvert auprès du batteur Dré Pallemaerts – il joue dans le “Pan Harmonie“ de ce dernier – Jozef Dumoulin lui offre une large palette de couleurs, tant au piano acoustique (Portrait of Cendrine, les trois derniers morceaux le mettant particulièrement en valeur) qu’électrique, son Fender Rhodes sonnant comme nul autre pareil. Les musiciens invités, Julien Lourau et Manu Codjia, apportent également à la musique un éclairage spécifique. Le premier possède un son de ténor qui lui est propre ; le second trempe To Bee or not to Bee dans le grand fleuve du rock, mais donne une autre sonorité à sa guitare dans Where is my Way, ballade aux longues notes oniriques. Emmanuel Codjia jouait déjà dans “Namaste“, le précédant album du contrebassiste, un enregistrement de 2006 longtemps mûri, souvenirs d’une jeunesse passée en Inde et jamais oubliée. L’Orient et ses couleurs n’inspirent ici que Pharaon’s Dance, mais c’est toujours Christophe Wallemme que l’on retrouve dans ces musiques fraîches comme de la rosée de petit matin. Le mélodiste sait agencer leurs rythmes, leur donne surtout un cœur pour battre et faire rêver.
Meilleurs morceaux : Quartz, Portrait of Cendrine, Where is my Way, Certainly Tomorrow.

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24 septembre 2008 3 24 /09 /septembre /2008 09:20

Féru de musique contemporaine, parisien depuis bientôt vingt ans, le pianiste américain Ronnie Lynn Patterson est un homme d’une rare discrétion. Auteur de « Mississipi », album paru en 2003 sur le label Night Bird Music, mais aussi d’un disque consacré au compositeur Morton Feldman dont il admire les œuvres, Ronnie Lynn n’oublie qu’une chose, c’est de faire parler de lui. La parution récente d’un nouvel album aussi bon qu’inattendu, et un concert au New Morning le 21 octobre prochain font ainsi figure d’évènements. « Freedom Fighters » confirme l’excellence d’un pianiste réservé qui loin de faire étalage d’un trop plein de savoir-faire, de notes savantes pleines de poudre aux yeux, construit un discours poétique et exigeant qui lui est infiniment personnel. Il contient deux pièces de ou arrangées par Keith Jarrett (l’un de ses principaux modèles), et la variation d’un thème  de Rachmaninov, mais surtout des compositions originales rigoureuses et diversifiées. Le pianiste possède un jeu aussi subtil que délicat et d’une grande richesse harmonique. Le suivre demande une écoute attentive et constante. La main gauche assure un parfait contrepoint à la droite, souvent proche des lignes du blues, et donne à la musique un très grand équilibre rythmique. Ronnie Lynn Patterson n’est pas le seul à fasciner : Stéphane Kerecki et Louis Moutin interpellent par leur pertinence. La contrebasse du premier trouv les notes justes pour répondre à celles, parfois abstraites, d’un piano fragile qui prend son temps pour révéler sa profondeur, un piano qui suggère, entrouvre pudiquement la porte de ses rêves.
Meilleurs morceaux : Freedom Fighters Adagio, Camariñas, Santa Fe.

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22 septembre 2008 1 22 /09 /septembre /2008 18:53

Publié dans les premiers jours de juillet, ce disque de Bill Frisell m’a suivi en vacances, sa folie douce, sa diversité étonnante le rendant très attachant. Les cordes y occupent une place importante, celles de la guitare de Frisell, mais aussi celles qui se jouent avec un archet, le violon se faisant beaucoup entendre dans ce double album aux musiques très variées. Frisell n’est pas seulement un jazzman. Sa culture s’élargit au blues, à la soul, au folk, à une country music purement américaine, mais aussi à l’image. Après avoir improvisé sur des films de Buster Keaton, le guitariste met en musique le travail du dessinateur de BD Jim Woodring, d’où cette succession de pièces souvent concises, véritables morceaux d’un puzzle qui révèle progressivement son unité, Frisell ayant choisi de les découper pour en répéter les thèmes, les rendre récurrents. « History, Mystery » rassemble deux CD. Le premier contient dix-sept morceaux ; le second treize. La plage la plus courte dure 37 secondes et la plus longue près de 9 minutes. Il s’agit d’une reprise instrumentale de A Change is Gonna Come immortalisé par Sam Cooke en 1964, une plage enregistrée live. Ces deux disques en contiennent d’autres. Parmi elles, une reprise déjantée de Jackie-ing de Monk et le Sub-Conscious Lee de Konitz joué sur un tempo fiévreux , deux vrais morceaux de jazz dans un album fourre-tout abritant toutes sortes de musiques. Outre un trio de cordes, « History, Mystery » accueille le cornet de Ron Miles et les saxophones de Greg Tardy. Le bassiste (Tony Scherr) et le batteur (le fidèle Kenny Wollesen) jouent surtout des rythmes binaires. Rassurez-vous, Bill Frisell soigne les moindres détails de ses miniatures, de petites pièces lyriques et pleines d’humour qui bénéficient d’arrangements délicats et subtils. Une fois écouté, ce disque vous trotte dans la tête et vous accompagnera longtemps.
Meilleurs Morceaux : Struggle (parts 1 & 2), A Change is Gonna Come, Heal, Lazy Robinson (Parts 1 & 2), Monroe (parts 1 & 2), Waltz for Baltimore.

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17 septembre 2008 3 17 /09 /septembre /2008 17:55

Consacré à la musique de G.I. Gurdjieff et complété par quelques pièces de Vassilis Tsabropoulos, « Chants, Hymns and Dances » pour violoncelle et piano fit sensation lors de sa parution en 2004. Dans « Melos », les œuvres du pianiste grec prédominent, celles de Gurdjieff n’ étant plus que trois, comme le nombre de musiciens en présence. Anja Lechner et Vassilis Tsabropoulos ont en effet enregistré ce nouvel album en trio. Bien que discret dans son approche rythmique, le batteur italien U.T. Gandi permet aux musiciens d’improviser davantage, Gift of Dreams et Vocalise se déployant en de splendides variations modales. Les belles mélodies greco-byzantines du pianiste se rapprochent ainsi du jazz, domaine que ces trois musiciens connaissent bien. Tsabropoulos est membre du trio d’Arild Andersen et Anja Lechner joue sur « Nostalghia – Song for Tarkovsky », magnifique album que François Couturier, fasciné par les films du célèbre metteur en scène, a enregistré. « Melos » n’est sans doute pas un disque de jazz. Il se situe au-delà d’une catégorie musicale précise et n’a point de frontières. L’Orient y rejoint l’Occident ; des danses s’y font entendre, rythmées et colorées, mais aussi une harmonie savante demandant une maîtrise instrumentale irréprochable, le jeu des musiciens s’inscrivant dans une approche classique de la musique.
Meilleurs morceaux : Melos, Gift of Dreams, Sayyid Dance, Promenade, Vocalise.

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12 septembre 2008 5 12 /09 /septembre /2008 17:27

Le disque vocal de la rentrée ? Certainement le plus original. Enregistré en 2006, produit par ses soins sous la direction artistique de Philippe Ghielmetti (Sketch, Minium, Illusions), « Chronos in USA » a enfin trouvé un distributeur, une maison de disque plus courageuse que les autres pour héberger un ovni, un album confié à un petit groupe de musiciens de jazz dans lequel, entre de courtes séquences instrumentales presque classiques, se déploient des airs d’opéras saupoudrés d ‘effets électroniques. Jazz ? Musique contemporaine ? Marjolaine Reymond mêle habilement les deux genres. Elle s’est produite à Darmstadt, a chanté Berio, Ohana, Messiaen et Stockhausen avant d’apprendre à interpréter des standards du jazz, à se familiariser à une autre technique. Opéra en trois actes sur des textes empruntés à des poètes anglais et américains, « Chronos in USA » reflète parfaitement son désir d’improviser librement et innove ainsi sur le plan de la forme. Le sprechgesang des compositeurs viennois y croise des airs de bel canto. Une voix de tête jongle sur trois octaves, éructe, dérange ou se fait miel. C’est selon, chaque plage de cet album étant une aventure dont on sort difficilement indemne.

Meilleurs morceaux : On écoutera à la suite les trois actes de cet opéra. Sa durée (55 minutes environ) le permet aisément.

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11 septembre 2008 4 11 /09 /septembre /2008 15:02

Un excellent disque que l’on n’attendait pas ! Il nous vient d’Argentine, d’un trio de jazzmen jouant des compositions de Lee Konitz, Warne Marsh, Billy Bauer et Lennie Tristano, pianiste virtuose et aveugle pour qui le jazz était avant tout une façon de sentir. Né en 1973, Ernesto Jodos ne cache nullement ce qu’il doit à ce dernier. Adoptant une esthétique linéaire, jouant de longues lignes mélodiques, le pianiste nous tient toujours en haleine par la construction savante de ses phrases qui, telles des histoires policières, conduisent à des dénouements surprenants ou abrupts. Le morceau d’ouverture, Subconscious-lee, certainement le plus abstrait du recueil, ne reflète pas vraiment ce que contient ce disque. Naguère d’avant-garde, la musique de Tristano et de ses élèves – Konitz et Marsh en furent les plus brillants – ne pose plus guère de difficultés d’écoute. De conception presque classique, elle s’inscrit dans l’évolution du bop, s’organise autour d’une contrebasse et d’une batterie (Hernan Merlo et Eloy Michelini) qui n’oublient jamais de marquer la cadence. Disposant d’une section rythmique confortable et par ailleurs étonnamment réactive (Subconscious-lee), Ernesto Jodos prend tout son temps pour choisir ses couleurs, organiser méthodiquement un discours aussi chaleureux que logique. Il  va jusqu’au bout de ses idées, économise ses notes (la main gauche, parcimonieuse, est souvent en attente) et parvient à les rendre essentielles.
Meilleurs morceaux : Dreams, Kary’s Trance, mais tous méritent une écoute attentive.

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